Le fragile accord conclu mercredi entre Israël et le Hamas prévoit trois phases : une trêve à partir de dimanche, la libération de 33 otages israéliens en échange d’un millier de prisonniers palestiniens, ainsi qu’une augmentation de l’aide humanitaire.
Après plus d’un an de blocage, les négociations indirectes à Doha se sont accélérées avec le départ de Joe Biden de la Maison Blanche, remplacé lundi par Donald Trump. Ils ont abouti à la formalisation d’un accord mercredi.
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Il entrera en vigueur dimanche 19 janvier, a annoncé le Premier ministre qatari Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani, dont le pays est l’un des médiateurs entre Israël et le Hamas.
Accord en trois phases
La première phase de l’accord, qui devrait durer 42 jours, verra la libération de 33 otages, dont des femmes, des personnes âgées et des blessés, en échange d’un millier de prisonniers palestiniens détenus par Israël. Les otages israéliens font partie des 94 captifs toujours détenus à Gaza depuis le 7 octobre 2023, parmi lesquels 34 ont été déclarés morts par l’armée israélienne.
“Un mécanisme de suivi de la mise en œuvre de l’accord sera mis en place au Caire et sera géré par l’Egypte, le Qatar et les Etats-Unis”, a ajouté Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani.
Le président américain Joe Biden a de son côté confirmé que la première phase durerait six semaines avec un cessez-le-feu « complet et total », accompagné d’un retrait israélien des zones densément peuplées. L’aide humanitaire doit également augmenter lors de cette première phase, ce qui doit permettre aux négociations d’accéder à la deuxième phase. Quelque 600 camions d’aide humanitaire devraient entrer chaque jour à Gaza.
La deuxième phase, qui vise « une fin définitive de la guerre », doit aussi permettre la libération des derniers otages, toujours en échange de prisonniers palestiniens, et un retrait israélien complet de Gaza, a encore détaillé Joe Biden. La troisième et dernière phase doit être consacrée à la reconstruction de Gaza et à la restitution des corps des otages tués pendant leur captivité.
Cependant, plusieurs éléments restent incertains. Le gouvernement israélien doit notamment encore donner son feu vert à l’accord. Il l’a conditionné à la résolution d’une « crise » de dernière minute provoquée selon lui par une remise en cause de « certains points » par le Hamas, accusations rejetées par le mouvement islamiste.
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Quel avenir pour Gaza ?
Au-delà de la mise en œuvre de l’accord, le chemin reste complexe. En effet, malgré l’annonce de la trêve, la Défense civile de la bande de Gaza a fait état jeudi d’une « forte intensification » des bombardements de l’armée israélienne.
Interrogé dans La Matinale de la RTS, Sébastien Boussois, docteur en sciences politiques et spécialiste du Moyen-Orient, a mis en garde contre un optimisme excessif : « Tout le monde s’emballe et est convaincu que c’est un accord définitif, qu’il y aura la paix demain. Nous en sommes évidemment très loin.
Alors que Joe Biden avait évoqué un possible retour des Gazaouis dans leurs quartiers après le retrait des troupes israéliennes, cette éventualité paraît « totalement utopique » pour l’expert. « Le retour des populations, à ce stade, n’a absolument aucun sens, puisqu’il n’y a pratiquement plus de maisons debout », souligne-t-il.
L’accord ne résout pas non plus la question de l’avenir du territoire, d’un point de vue politique ou de la reconstruction de l’enclave, ravagée par 15 mois de guerre. « Qui reconstruira Gaza et surtout qui l’administrera ? demande l’expert.
Israël a rejeté toute hypothèse impliquant le Hamas et n’est pas non plus favorable à la prise du pouvoir par l’Autorité palestinienne, qui dispose de prérogatives limitées en Cisjordanie occupée. « Tout cela laisse beaucoup de doutes sur la façon dont Gaza va pouvoir se relever, à commencer par les Gazaouis », conclut Sébastien Boussois.
Emilie Délétroz avec les agences