C’est une preuve supplémentaire que le Football français ne va pas bien : John Textor, l’homme que personne ne comprend lorsqu’il évoque le fonctionnement de son propre club, s’est montré plutôt crédible lorsqu’il a énuméré les vices et les travers de notre championnat. L’Américain n’est pas devenu d’un coup un sage, et il aura sans doute du mal à trouver des alliés tant qu’il ne se remettra pas en forme. Certains termes utilisés dans l’émission Rothen s’enflamme de RMC, diffusée lundi, n’étaient pas dignes d’un manager d’un des plus grands clubs français.
Ses mots n’ont vraiment pas besoin de ça pour avoir du poids. Textor est et sera toujours écouté pour la simple raison qu’il est le seul à s’opposer avec autant de force à la gouvernance actuelle du football français. Cela ne veut pas dire qu’il aura toujours raison sur tout. Impossible de le suivre, par exemple, dans son combat contre la DNCG. Le corps est loin d’être parfait mais c’est le gendarme du football français, et non des galaxies du timeshare dont le tour de passe-passe fait passer l’argent d’un pays à l’autre.
Le PSG a-t-il vraiment besoin de Kvaratskhelia ? “Ça n’a pas de sens”
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Mais dans cette même interview, John Textor a soulevé d’autres questions avec des avis bien plus sensés. A commencer par le rôle de Nasser Al-Khelaïfi. “En juillet, j’étais complètement choqué car on parlait des droits TV et le président de la Ligue, qui était censé diriger les débats, ne disait presque rien.il a expliqué. C’est Nasser qui dirigeait les débats, alors qu’il n’aurait même pas dû être présent, en tant que responsable d’une chaîne de télévision directement impliquée dans les débats. S’il y a eu une voix discordante, Nasser Al-Khelaïfi a « aboyé » contre cette personne, il y a eu aussi beaucoup d’intimidations.»
La double casquette d’Al-Khelaïfi pose problème
Le double rôle de celui qui est à la fois président du Paris Saint-Germain et de beIN MEDIA GROUP pose problème. Pas seulement aux yeux de Textor. Le rapport de la mission sénatoriale rendu public en octobre dernier dénonçait déjà : «gestion insatisfaisante des conflits d’intérêts“et son”effets délétères dans la gestion de la Ligue de Football Professionnel.»
Le poids du « NAK », et sa relation plus que privilégiée avec Vincent Labrune – régulièrement présent au Parc des Princes – lui ont permis de jouer un rôle direct dans la plupart des décisions qui ont tourmenté le football français ces derniers mois : les droits d’attribution à un diffuseur sorti de terre depuis longtemps – Al-Khelaïfi ne souhaitait surtout pas la création d’une chaîne par la Ligue, contrairement à l’OL -, la redistribution (très inégale) des richesses aux clubs français, ou encore… . l’organisation du dernier Trophée des Champions au Qatar.
« Mandanda aurait mérité plus de considération »
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-Le dirigeant parisien défend avant tout les intérêts de son club. Ce qui n’est pas vraiment surprenant. Mais ce n’est pas toujours très judicieux. Quand Paris fait toujours tout pour se tailler les plus grosses parts des revenus (contrat CVC, droits TV), les clubs de Premier League s’engagent pour une redistribution plus équitable, et surtout basée sur un modèle rationnel (classement, visibilité…). C’est ainsi que l’Angleterre maintient la meilleure ligue du monde – et les milliards qu’elle génère. C’est aussi ainsi que le PSG développe, financièrement et sportivement, une Ligue qui intéresse de moins en moins les diffuseurs et les spectateurs. Et qui perd donc de sa valeur.
Le produit montré par la Ligue à la télévision est nul
La L1 est désormais un championnat de second ordre qui n’a plus grand chose à promettre à ceux qui la regardent. Et qui n’a pas d’idées pour se rendre un peu plus attractive. “Nous devons raconter des histoiresinsista Textor. Pourquoi regarder ce match ? Le Havre par exemple ? Où se trouve-t-il ? Normandie? Quel temps fait-il? Les filles là-bas sont jolies ? Idem pour le Paris FC. C’est un milliardaire qui l’a acheté. Qui est-il ? Avec qui s’entend-il ou pas ? L’épouse du propriétaire rennais est Salma Hayek, ça aussi on devrait pouvoir en parler. Parlez-moi des villes, des gens, des joueurs.»
Cette proposition ressemble à une autre formulée par Cyril Linette, battu (sans surprise) dans la course à l’élection du président de la LFP. Et même si certaines formulations peuvent surprendre – Textor dans le texte ! – l’idée générale a déjà été testée dans d’autres disciplines, comme la F1 ou le cyclisme. Mais aussi dans le football, avec une série à succès bâtie autour du club de Sunderland.
“Le produit présenté par la Ligue à la télévision, en général, est nul.a ajouté le patron de l’OL. Mais personne ne s’en soucie.» Les acteurs du football français ne s’intéressent qu’à leurs intérêts personnels. Sans comprendre qu’ils seraient mieux servis par un projet collectif fort et sensé. Textor en est conscient. Mais il est toujours seul. Trop seul.
La L1 est déjà jouée, à qui la faute ?
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