« Mayotte, une vraie leçon de vie » : de retour à Nice, trois pompiers azuréens racontent leur mission au lendemain du cyclone Chido

Ils n’étaient pas encore revenus que d’autres avaient déjà pris le relais. Les neuf pompiers azuréens dépêchés à Mayotte ont atterri dimanche à Nice après une quinzaine éprouvante sur l’île dévastée par le Chido. Huit camarades du SDIS 06 leur succèdent. Ils ne seront pas de trop pour aider les Mahorais à se remettre sur pied.

« J’étais habitué aux cyclones. Mais ici, la violence était encore importante ! confie le capitaine Vincent Manuel, chef du détachement des Alpes-Maritimes. Nous avons traversé des paysages lunaires. Les arbres ont été déracinés à la base. Plus de feuilles sur les branches. Les conteneurs ont bougé de plusieurs mètres. Nous avons trouvé des bateaux à l’intérieur des terres, dans les mangroves… »

C’est dans ce décor apocalyptique que Vincent Manuel, 44 ans, a fouetté avec huit camarades. Parmi eux, le lieutenant Thierry Filhol, 54 ans, chef d’unité opérationnelle. Et l’infirmier Laurent Bouchama, 39 ans, pompier volontaire. Ce mardi à Nice, tous les trois nous racontent leur voyage dans une autre , un autre monde.

Préparer la rentrée et l’avenir

Laurent Bouchama, l’infirmier, a été particulièrement touché par les soins prodigués aux enfants. Photo SDIS 06.

Leur mission principale ? « Sécuriser les écoles, résume Thierry Filhol. C’est la priorité du gouvernement mais aussi celle des collectivités locales. Les maires souhaitent que les étudiants reviennent pour éviter qu’ils ne s’égarent. D’autant que souvent, c’est à l’école qu’ils prennent leur seul repas de la journée… »

En toute autonomie, les pompiers de la Riviera ont établi leur camp de base dans un lycée, à Dzoumogné, au nord de Mayotte. Faisant partie d’un contingent de 63 pompiers de la zone sud, ils ont déployé 1 000 m2 de bâches sur quatorze écoles.

Ils ont également abattu des arbres, défriché « pour que les étudiants puissent rentrer sans risquer de se blesser ». Moins d’un mois après la catastrophe du 14 décembre, ils peuvent donc envisager la rentrée scolaire lundi prochain. Et un avenir sur l’île.

La force de l’habitude

Les pompiers azuréens ont dû soigner de nombreuses blessures infectées. Photo SDIS 06.

Avant Noël, le SDIS 06 avait dépêché huit spécialistes USAR (unités de secours, de soutien et de recherche). Tous habitués aux crises climatiques. Avant Mayotte, le lieutenant Filhol était de nouveau intervenu en Martinique et à la Réunion. “On a vécu la tempête Alex, les attentats… Sur le plan émotionnel, on commence à être brisés.”

Pour Laurent, l’infirmier du groupe, c’était la première mission de ce type. “Mais j’ai vécu en Afrique, j’ai vécu ce genre de situations.”

Tout le monde a dû s’adapter. Faire face à des pluies tropicales, des températures qui culminent à 40 degrés, une humidité ambiante qui oblige à boire « jusqu’à six litres d’eau par jour ». Commencez les chantiers à 6 heures du matin, décidez de rentrer tôt pour ne pas finir dans le rouge.

Guérir les corps et les âmes

Les pompiers de la Riviera ont sécurisé 14 écoles, permettant aux jeunes Mahorais d’anticiper la rentrée scolaire. Photo SDIS 06.

Nos pompiers ont réparé du matériel prioritaire. Ils prenaient aussi soin des corps et des âmes. Ils parcouraient les bangas (cabanes mahoraises) au gré des besoins et des urgences.

« Il y avait beaucoup de blessures aux mains et aux pieds, qui se sont infectées et ont nécessité des antibiotiques », raconte Laurent. « Nous étions souvent accompagnés par des locaux pour nous faire comprendre. Voyant qu’on était là pour eux, je pense que ça leur a fait du bien aussi… »

Il fallait gagner la confiance, y compris parmi les immigrés illégaux. Vincent Manuel a pu compter sur ses origines mauriciennes et sur le commandant Saïd, son camarade de classe Filt 73 devenu chef de groupe à Mayotte. Il a participé à la gestion du fret aérien depuis la Réunion. Il rejoint ensuite le poste de commandement des opérations, menées dans un rayon d’une vingtaine de kilomètres.

De retour en France métropolitaine, il se dit « fier » de son équipe et du travail accompli. Bluffé par « l’envie de bien faire » de ces hommes dont il a dû freiner l’enthousiasme. Profondément marqué par la résilience des Mahorais aussi. Et par leur sourire. « Ils ont tout perdu. Ils ont enterré leurs morts, retroussé leurs manches et se sont remis au travail. Pour moi, c’est une vraie leçon de vie.

 
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