«J’aimerais retrouver le côté ludique de mon enfance»

Votre roman graphique est drôle, touchant et émouvant. Pourquoi vouliez-vous raconter cette histoire ?

J’ai toujours été fasciné par la mécanique des conversations. Comment le choix des mots et la manière de les dire peuvent transformer un simple échange en une véritable connexion entre individus. Je me suis retrouvé dans des discussions où j’ai dit des choses auxquelles je ne croyais pas ou qui ne m’intéressaient pas, juste pour m’en sortir indemne. Quand j’agis de cette façon, et que j’ai l’impression que la personne en face de moi répète le même schéma, j’ai juste envie de crier : « Mais pourquoi faisons-nous cela ? Pour qui jouons-nous et faisons-nous semblant ?

©404 Éditions

En réalité, nous nous rendons rarement vulnérables face aux autres – mais c’est peut-être plus une habitude anglaise que française. J’ai le sentiment que je peux toucher physiquement mes interlocuteurs, mais que je ne peux pas accéder à qui ils sont réellement à l’intérieur. J’ai toujours eu cette frustration. Je voulais écrire un livre sur tout cela, sur ce qui se passe lorsqu’une conversation se transforme en une véritable connexion et sur ce que cela nous fait ressentir en tant qu’êtres humains. J’ai toujours eu cette idée en tête et je voulais l’exprimer de manière visuelle.

Au fil des pages, le lecteur passe du rire aux larmes. Pourquoi était-il important pour vous d’aborder des thèmes difficiles, comme la maladie ou la mort, par le prisme de la comédie ?

Ce passage de la comédie à la tristesse et de la lumière aux ténèbres est peut-être la partie la plus autobiographique de ce livre. C’est exactement ce qui se passe dans ma vie : chaque fois que j’ai été triste, l’humour m’a aidé à m’en sortir.

« À l’intérieur est une fiction inspirée de ma propre vie. »

Dans quelle mesure cette histoire est-elle autobiographique ? Vous reconnaissez-vous dans le personnage de Nick ?

Certains éléments sont clairement autobiographiques, mais je dirais queÀ l’intérieur est une fiction qui s’inspire de ma propre vie, plutôt que l’inverse. Je m’identifie beaucoup à Nick, mais bizarrement, je ressemble plus à Wren. Chaque personnage a sa propre façon de cacher ses vraies couleurs : Nick le fait en regardant le monde de l’extérieur, sa mère cache sa vraie personnalité en étant définie par son fils comme une maman plutôt qu’un adulte, et Wren se cache derrière l’humour. tout le temps. Je me reconnais beaucoup dans sa manière de travailler.

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Nick réfléchit constamment. Avez-vous aussi ce monologue intérieur perpétuel dans votre tête ?

Oh oui! Je partage définitivement cela avec lui. J’ai un monologue constant dans ma tête, mais je ne pense pas qu’il soit aussi anxieux et analytique que celui de Nick. En Angleterre, on a une expression pour parler de cela : « Être loin des fées » [“être à côté de ses pompes”, en français, ndlr]. Je suis constamment coincé avec mon imagination, dans de petites envolées de fantaisie. Ces réflexions personnelles se font parfois au détriment des conversations que j’ai en temps réel, car je suis coincé dans ma tête et je ne suis pas du tout dans l’instant présent, avec les autres.

Les moyens de communication n’ont jamais été aussi développés qu’aujourd’hui. Avez-vous le sentiment qu’ils multiplient les conversations superficielles dont vous parlez dans À l’intérieurou qu’au contraire, ils favorisent des discussions approfondies ?

D’un point de vue général, j’ai l’impression qu’avoir le monde entier et toutes les connaissances de l’humanité à portée de main, dans un espace de quelques centimètres carrés, est une mauvaise chose. En réalité, la possibilité d’envoyer des SMS à vos amis et à votre famille est le seul avantage des téléphones. Je me débarrasserais complètement du reste. Les réseaux sociaux nous donnent la possibilité de nous parler à tout moment, mais ils ne nous connectent pas vraiment. C’est peut-être démodé, mais j’ai le sentiment que cette relation authentique dont je parle dans mon livre ne peut se produire que dans la vraie vie.

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Nick essaie de sortir de ces discussions superficielles en étant sincère avec son entourage. Il échoue à chaque fois, sauf lorsqu’il parle avec son neveu, âgé de 4 ans. Avez-vous le sentiment que l’âge adulte nous enlève une partie de notre sincérité ?

Absolument. Nick tisse des liens avec des personnes très différentes : un inconnu, le plombier dans sa salle de bain, des membres de sa famille, Wren… Mais celui avec son neveu est probablement le plus simple, car quand on est jeune, on est déjà dans un état de vulnérabilité et honnêteté. Il n’y a pas de filtre, on dit ce qu’on pense. Et nous passons presque toute notre vie à essayer de revenir à cet état. C’est ce que je ressens aussi par rapport à mon parcours : j’aimerais (et j’essaie de) retrouver cette forme de jeu que j’avais quand j’étais enfant. Je pense que c’était la meilleure version de moi-même.

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Lorsque les autres s’ouvrent à Nick, il accède à leur monde intérieur. A quoi ressemble le vôtre ?

Bonne question… Si tu tombais dans mon monde intérieur, je pense que tu te retrouverais dans une sorte de piscine remplie de lave volcanique (rires). Au début tu te dirais “Oh, c’est cool.”mais ensuite tu réaliserais que c’est horrible et tu aimerais partir (rires).

Enfin, avez-vous un message à transmettre à vos lecteurs ?

Parle à ta mère.

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