Véronique a de la chance d’être en vie.
L’incendie qui a détruit une maison composée de trois logements au centre de Maureillas en début de nuit du jeudi 2 janvier 2025 n’a pas fait de blessés graves, mais aurait pu avoir une toute autre issue. Véronique, sinistrée de 62 ans, vivant seule dans son duplex, a souhaité témoigner.
Comment avez-vous été alerté de l’incendie ?
Il était 23 heures, je dormais quand j’ai entendu mon détecteur de fumée se déclencher. Ma chambre est au sommet du duplex et mon instinct était de tirer une chaise pour l’éteindre. C’est en tournant la tête que j’ai aperçu de la fumée qui sortait des escaliers et que je n’avais pas encore sentie.
Pourquoi ce réflexe de le désactiver ?
En fait, j’étais à moitié endormi et je pensais que j’avais encore un autre détecteur défectueux, ayant déjà eu plusieurs qui sonnaient sans raison au point que je les ai débranchés. C’est à Noël que je me suis dit que ce n’était pas raisonnable et j’en ai installé un nouveau deux jours avant l’incendie. J’ai eu la chance d’avoir pris un modèle avec une batterie préinstallée car sinon j’aurais probablement tergiversé quelques jours pour me procurer une batterie.
Qu’avez-vous fait lorsque vous avez pris conscience de l’incendie ?
Quand j’ai vu cette fumée dans les escaliers, j’ai juste pris mes chaussons, mes lunettes, mon téléphone et ma veste, je suis descendu et j’ai ouvert la porte d’entrée qui donne sur le palier (situé au 2ème étage et qui mène à deux appartements dont celui en feu, ndlr). La fumée avait tout envahi et s’engouffrait dans l’appartement. J’ai étouffé, je ne voyais rien, j’entendais juste ma voisine crier de la suivre, je ne la voyais pas, elle m’a pris le bras et m’a tiré dans les escaliers. Elle est revenue me chercher après avoir mis son fils à la rue, alors que les gens lui disaient d’attendre les pompiers.
Quel est votre état d’esprit aujourd’hui avec quelques jours de recul ?
J’ai la chance d’être entouré, j’ai mes trois enfants. Une amie avait un logement qu’elle a pu me louer et j’ai un salaire. Je n’ai pas été choqué de voir les flammes qui ne se sont propagées que plus tard dans mon appartement, avant que les sols ne s’effondrent. Je sais que j’ai tout perdu d’un point de vue matériel, mais je pense que tout peut être reconstruit. Dans cet immeuble, une maman d’enfant a tout perdu et se trouve désormais dans un mobil-home, la voisine du dessous venait d’arrêter de travailler pour se consacrer à sa nouvelle activité de couture à domicile, spécialisée dans l’upcycling et elle n’a plus d’outils de travail, tout son équipement est sous les décombres. Je suis le moins à plaindre.
Pourquoi témoignez-vous aujourd’hui ?
Je voulais envoyer le message aux gens de se munir d’un détecteur de fumée et de ne jamais l’éteindre, même s’il sonne lorsque vous cuisinez. C’est cet appareil qui m’a réveillé et m’a sauvé. J’ai une porte blindée derrière laquelle on n’entend pas les bruits du couloir, ni même quand quelqu’un frappe. Ma voisine a frappé fort plusieurs fois sans que je l’entende. J’avais récemment installé une sonnette, mais avec la fumée et la panique, elle ne l’a pas vu. Si je n’avais pas eu cette alerte, le résultat n’aurait pas été le même. Je voulais aussi la remercier d’être venue me chercher car j’étais perdu dans cette fumée étouffante. Grâce à elle, je n’ai pas eu besoin d’être hospitalisé, même si j’ai craché de la suie pendant plusieurs jours. J’ai de la chance d’être en vie. Je voulais aussi remercier les résidents pour leur générosité qui nous a tous beaucoup touché, même si je ne me sens pas prioritaire.
