A l’occasion de l’anniversaire des attentats de 2015, le journal satirique Charlie Hebdo un numéro spécial sort ce mardi avec la publication d’une enquête sur l’évolution de l’opinion des Français concernant la liberté d’expression, la satire et les dessins de presse. Un droit fondamental pour 76% des personnes interrogées. Pourtant, un tiers des jeunes de moins de 35 ans soutiennent l’idée selon laquelle on ne peut rien dire et caricaturer sous couvert de liberté d’expression.
Ce mardi, la France commémore le 10e anniversaire des attentats de janvier 2015. 17 personnes ont été tuées entre le 7 et le 9 janvier. Le 7 janvier 2015, douze personnes, dont huit membres de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdoont perdu la vie dans l’attaque du journal par deux terroristes ayant prêté allégeance à Al-Qaida.
Le journal satirique publie ce mardi dans ses colonnes une enquête Ifop. Avec cette question : comment a évolué l’opinion des Français concernant la liberté d’expression dans la satire et les dessins de presse ?
Et 76 % d’entre nous considèrent la liberté d’expression comme un droit fondamental, soit 18 points de plus qu’en 2012. 62 % des Français pensent qu’on peut critiquer outrageusement une croyance, un symbole ou un dogme religieux contre 50 % en 2020.
Mais derrière ces chiffres rassurants, se cache une fracture générationnelle. Un tiers des jeunes de moins de 35 ans soutiennent l’idée qu’on ne peut rien dire ou caricaturer sous couvert de liberté d’expression, contre seulement 21% des 35-64 ans.
Samy a vu beaucoup de caricatures du prophète Mahomet ces 10 dernières années, et pour cet étudiant, musulman pratiquant, il est difficile de les regarder.
“Je ne comprends pas comment on peut encore en rire alors qu’on se moque librement de cette religion”, estime-t-il.
Un travail pédagogique à faire
Un avis que son ami Hugo ne partage pas totalement. « Je ne vois pas pourquoi nous ne pouvons pas le faire alors que la liberté d’expression nous le permet. Et puis c’est une façon de parler des choses », dit-il. Mais pas de quoi convaincre Samy. « Ce que je n’aime pas dans la caricature, c’est le moment où on a envie d’en rire au point de vouloir rabaisser la chose en fait », insiste-t-il.
Clara, 18 ans, partage elle aussi ce sentiment que les caricatures vont trop loin. « En tant que chrétien, je trouve qu’il y a beaucoup de blasphèmes. Ces caricatures sont vraiment choquantes. C’est quelque chose qui devrait être limité », juge-t-elle.
La réaction de ce lycéen ne surprend pas Charlotte Laizet, professeur d’histoire à Bordeaux.
« Nous ressentons effectivement une certaine tension. Ils y voient quelque chose de discriminatoire, comme un manque de respect. Notre travail consiste à créer un dialogue qui aide les étudiants à évoluer sur ces questions et cela fonctionne bien », dit-elle.
Depuis les attentats, l’enseignant a décidé de continuer à montrer les Unes de Charlie Hebdo aux élèves, tout en veillant à ce que toutes les religions soient représentées.
Pierre Bourgès avec Guillaume Descours