Disparition. Jean-Marie Le Pen, le « Menhir », est décédé à 96 ans

Avec le décès de Jean-Marie Le Pen ce mardi à l’âge de 96 ans, l’extrême droite française a perdu son leader historique. Celui qui, pour la première fois en 2002, a emmené le Front national (FN) au second tour d’une élection présidentielle. Son exploit politique qui ne manquera pas de rappeler, dans leur devoir d’inventaire, les militants frontistes de la première heure, restés fidèles à « Jean-Marie ». C’était le 21 avril 2002. Le président du FN (16,86 % des voix) élimine le socialiste Lionel Jospin face à Jacques Chirac. Une explosion du paysage politique qui, le 1er mai, a fait descendre des millions de personnes dans la rue. Le 5 mai, Le Pen est largement battue par Chirac (82,21%) qui profite de ce front républicain inédit. Cinq ans plus tard, le représentant de l’extrême droite ne rééditera pas son score.

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Un anniversaire déjà discret

Aujourd’hui en deuil, la « génération Bardella » pourrait s’en tenir au service minimum. Elle connaissait ou fréquentait à peine le leader frontiste. Les qualifications de sa fille, Marine Le Pen, aux élections présidentielles de 2017 et 2022 (près de 42 % des voix), ont d’ailleurs relégué l’exploit du président du FN à un lointain souvenir. Surtout, trop d’hommages risque de nuire aux jeunes leaders du Rassemblement national. À l’image de Marine Le Pen et du reste de la famille politique, qui œuvrent depuis des années à gommer l’image d’un « Menhir » devenu trop encombrant. En cause : le passé et surtout les propos racistes, antisémites et négationnistes qui ont valu à Jean-Marie Le Pen de multiples condamnations.

En 2022 déjà, le cinquantième anniversaire du parti d’extrême droite avait été célébré avec retenue. «Je suis le Fantômas de la politique», ironise Jean-Marie Le Pen, non invité. Ghosted, après un demi-siècle tumultueux sur la scène politique.

La bio express de Jean-Marie Le Pen

  • 20 juin 1928 : Birth in La Trinité-sur-mer (Morbihan). He is the son of Jean Le Pen, fisherman, and Anne-Marie Hervé, seamstress.
  • 5 octobre 1972 : Création du Front National, présidé par Jean-Marie Le Pen.
  • 1er novembre 1976 : Une explosion détruit l’immeuble de la Villa Poirier à Paris, où réside la famille Le Pen. Cette attaque n’a jamais été revendiquée.
  • 13 septembre 1987 : Il prononce la phrase sur les chambres à gaz, un « détail » de la Seconde Guerre mondiale.
  • 5 décembre 1998 : Conseil national du FN à Paris où 300 cadres insultent Jean-Marie Le Pen. C’est une scission : Bruno Mégret crée immédiatement le MNR.
  • 21 avril 2002 : Jean-Marie Le Pen accède au second tour de l’élection présidentielle face à Jacques Chirac. Il devance Lionel Jospin d’environ 200 000 voix.
  • 16 janvier 2011 : Il laisse la présidence du FN à Marine Le Pen, élue face à Bruno Gollnisch. Il devient président d’honneur.
  • 20 août 2015 : Jean-Marie Le Pen est exclu du FN par le bureau exécutif réuni en formation disciplinaire. Une décision confirmée un an plus tard par le tribunal de grande instance de Nanterre.
  • 10 mars 2018 : Jean-Marie Le Pen est déchu de son poste de président d’honneur. Les militants ont largement adopté la modification des statuts du parti prévoyant la suppression du titre. Le Front National est rebaptisé Rassemblement National.
  • 3 février 2022 : Jean-Marie Le Pen, 93 ans, est hospitalisé suite à un accident vasculaire cérébral. Il ressort deux jours plus tard avec cette phrase : « Ce n’est pas cette fois. »

Vous IIIe Reich sur FN

Orphelin de son père à 14 ans et pupille de la nation, le « Breton » fait ses débuts, encouragé par Pierre Poujade : à 28 ans, il est élu député en 1956. Soldat d’Indochine, il part combattre en Algérie : période pendant des soupçons de torture, avoués tardivement, pesaient sur lui. Dans les années 1960, Jean-Marie Le Pen dirigeait SERP, une petite société spécialisée dans la réédition de chansons « traditionnelles » qui éditait un recueil du répertoire du Troisième Reich.

En 1972, Le Pen, qui mène la campagne de Jean-Louis Tixier-Vignancour (candidat d’extrême droite à la présidentielle de 1965), prend la tête du Front national pour l’unité française. Le parti de la Flamme – issu du mouvement nationaliste et néofasciste Ordre Nouvel – a été cofondé par Pierre Bousquet et Léon Gaultier, deux anciens membres des Waffen-SS dans l’Allemagne nazie. Score confidentiel (0,74%) à l’élection présidentielle de 1974 et un long voyage à travers le désert avant la percée sous le premier septennat de François Mitterrand.

Jean-Marie Le Pen lors de la campagne présidentielle de 1974. Photo d’archives Sipa

“Détail de l’histoire”

Le FN a envoyé 10 élus, dont Jean-Marie Le Pen, au Parlement européen en 1984. Et 35 à l’Assemblée nationale en 1986, année de la première cohabitation. L’extrême droite s’ancre dans la vie politique française et Jean-Marie Le Pen – voix de stentor et verbe outrancier – dans son rôle de tribun, de plus en plus inaccessible. Son « détail d’histoire » sur les chambres à gaz pendant la Seconde Guerre mondiale et son jeu de mots macabre « crématoire Durafour » sur le ministre Michel Durafour sont gravés dans l’inconscient collectif.


Jean-Marie Le Pen à l’Assemblée nationale en 1986. Photo d’archive Sipa

2018, « l’année terrible »

En 2011, le président du FN passe le flambeau à sa fille, Marine Le Pen, qui s’en prend à la normalisation du parti et œuvre à « tuer le père ». En 2015, après de nouveaux propos polémiques sur la Shoah, Jean-Marie Le Pen est exclu de « son » parti ! Rejeté par la justice qui a confirmé l’exclusion un an plus tard, le « patriarche » a sauvé la face en restant président d’honneur. Pas pour très longtemps. 2018 sera « l’annus horribilis » de Jean-Marie Le Pen. Son poste de président d’honneur est supprimé et le FN est rebaptisé Rassemblement national à la quasi-unanimité des militants. L’humiliation ultime pour le chef de clan qui a mis sa famille à l’honneur et au service de ses ambitions politiques : Marion Maréchal-Le Pen, sa petite-fille et nièce de Marine, se débarrasse à son tour du patronyme visiblement trop lourd à porter .

Jean-Marie Le Pen et sa fille Marine au meeting du Front National du 1er mai 2015. Photo d'archive Sipa

Jean-Marie Le Pen et sa fille Marine au meeting du Front National du 1er mai 2015. Photo d’archive Sipa

Au terme de son périple crépusculaire, le vieux leader frontiste a reçu un dernier rayon de soleil avec le succès de ses mémoires chez les libraires. Une façon d’oublier la rupture politique avec certains membres de sa famille et les conflits familiaux. Un baroud d’honneur avant de disparaître de la scène médiatique, contraint par une santé déclinante.

Au printemps 2024, âgé de 95 ans, le tribun est placé sous la tutelle de ses trois filles, Marie-Caroline, Yann et Marine Le Pen, avec qui les relations s’apaisent enfin. En septembre, un nouveau procès l’attendait, visant cette fois un système de détournement de fonds européens alloués aux assistants parlementaires au profit du FN.

Le mystère qui entoure son trésor de guerre

Les questions d’argent ont également occupé une place importante tout au long de la vie de Jean-Marie Le Pen. Fils de pêcheur de La Trinité-sur-Mer, il aimait rappeler ses origines modestes. Deux mariages – le premier avec Pierrette, le second avec Jany – et le mystérieux héritage d’Hubert Lambert, au milieu des années 1970, ont fait de Jean-Marie Le Pen un homme riche. Signe extérieur de ce trésor de guerre, le domaine de Montretout, près de Paris. Dans cette forteresse impénétrable, le président du FN menait la vie d’un château entouré d’objets d’art et il écrivit l’histoire du FN. Ce sera l’autre héritage à gérer.

Jean-Marie Le Pen condamné à plusieurs reprises pour ses excès

Jean-Marie Le Pen a construit une grande partie de sa carrière politique à travers des propos parfois révisionnistes, racistes ou homophobes. Une « bonne volonté » toujours assumée.

  • “Sidaïque”: En 1987, il déclarait à propos des malades du Sida : « Les malades du Sida sont contagieux par leur sueur, leurs larmes, leur salive, leur contact. C’est une sorte de lépreux. »
  • « L’occupation n’est pas inhumaine » : « En , l’Occupation n’a pas été particulièrement inhumaine, même s’il y a eu des bévues, inévitables dans un pays de 550 000 kilomètres carrés. » Pour cette déclaration de 2005, Jean-Marie Le Pen a été condamné à trois mois de prison et 10 000 euros d’amende pour contestation de crime contre l’humanité.
  • Le « détail de l’histoire » : en septembre 1987, il prononce l’une de ses phrases les plus controversées : « Je ne dis pas que les chambres à gaz n’existaient pas. Je n’ai pas étudié spécifiquement la question. Mais je crois qu’il s’agit d’un point de détail dans l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. » En 1991, la cour d’appel de Versailles le condamne à verser 1,2 million de francs (183 000 euros) à 11 associations pour cette déclaration sur RTL.
  • « Crématorium Durafour » : En 1988, lors de l’université d’été du FN, Jean-Marie Le Pen fait un jeu de mots sur Michel Durafour, alors ministre de la Fonction publique. Il le surnomme « Monsieur Durafour-crématoire ». La cour d’appel de Paris le condamnera à 10 000 francs (1 524 euros) d’amende pour ce jeu de mots offensant.
  • « Pétain » : À Rivarol, en avril 2015, Le Pen réhabilité Pétain : « Je n’ai jamais considéré le maréchal Pétain comme un traître. »

Vous pouvez rendre hommage aux défunts sur leur page commémorative du site Libra Memoria et présenter vos condoléances à leurs proches en témoignant votre sympathie.

 
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