Déjà importante, la coopération militaire entre la Biélorussie et la Russie s’est considérablement renforcée en 2022, la première ayant autorisé la seconde à utiliser son territoire pour attaquer l’Ukraine. De plus, Minsk a amendé sa Constitution pour autoriser à nouveau le déploiement d’armes nucléaires. [russes] sur son sol, revenant ainsi sur ses engagements pris en décembre 1994, lors de la signature des mémorandums de Budapest.
En juin de cette année, le président russe Vladimir Poutine a annoncé que les missiles balistiques tactiques Iskander-M à capacité nucléaire seraient remis à la Biélorussie et que l’avion d’attaque biélorusse Su-25 « Frogfoot » serait « modernisé » pour leur permettre de transporter « des munitions avec ogives spéciales ».
Ce transfert d’armes nucléaires russes s’est achevé en décembre 2023. Toutefois, ni Moscou ni Minsk n’ont précisé les modalités de leur éventuelle mise en œuvre, même si, en théorie, leur contrôle opérationnel devrait relever du Kremlin, comme c’est le cas des bombes B-61. déployé dans cinq pays membres de l’OTAN par les États-Unis.
Mais la Russie et la Biélorussie entendent aller encore plus loin. Ainsi, le 6 décembre, le président biélorusse Alexandre Loukachenko et son homologue russe ont signé un nouvel accord sur des « garanties mutuelles de sécurité », en plus de dix autres documents, dont un prévoyant la mise en place d’un marché de sécurité unifié. l’électricité dans le cadre de l’état de l’Union [créé via un traité signé en 1999, ndlr].
Ces « garanties de sécurité » tiennent probablement compte du fait que Moscou est désormais susceptible de recourir à ses forces stratégiques en cas d’agression contre « la Fédération de Russie et/ou la République de Biélorussie ».
Pour rappel, la nouvelle doctrine nucléaire russe considère l’agression contre la Russie par un pays non nucléaire mais avec la participation ou le soutien d’un pays nucléaire comme une attaque conjointe. Et une « menace critique » contre la « souveraineté russe », fondée sur l’usage d’armes conventionnelles, pourrait également donner lieu à une « réponse nucléaire ».
L’évolution de cette doctrine a été présentée par le Kremlin comme un « signal spécifique » adressé aux pays partenaires de l’Ukraine. Ce message a été en quelque sorte réaffirmé avec le tir du missile à portée intermédiaire « Orechnik » contre la ville ukrainienne de Dnipro, le 21 novembre. Missile qualifié d’« expérimental » par M. Poutine.
A priori, l’Orechnik aurait été conçu à partir du missile RS-26 « Rubej », qualifié d’intercontinental par les autorités russes alors qu’il s’agissait apparemment d’un missile à portée intermédiaire, alors interdit par le traité sur les forces nucléaires intermédiaires. [FNI].
Quoi qu’il en soit, après avoir signé l’accord sur les « garanties mutuelles de sécurité », le président Loukachenko a demandé au chef du Kremlin s’il était possible de déployer des missiles « Orechnik » en Biélorussie.
«La Russie a récemment lancé avec succès l’Orechnik. Cela a eu un certain impact sur nos anciens partenaires, désormais rivaux. Ne considérez pas cela comme une sorte d’impudence, mais je voudrais vous demander publiquement de déployer de nouveaux systèmes d’armes, en premier lieu l’Oreshnik, sur le territoire de la Biélorussie », a déclaré M. Loukachenko en s’adressant à son homologue russe.
La réponse a-t-elle été acceptée ? M. Poutine a néanmoins répondu qu’il considérait le « déploiement d’armes » comme « possible ». [russes] comme l’Orechnik sur le territoire biélorusse.
“Je pense que cela deviendra possible au cours du second semestre de l’année prochaine, lorsque la production de ces armes augmentera en Russie et que ces missiles entreront en service dans les forces stratégiques russes”, a déclaré le dirigeant du Kremlin. “Nous aurons établi une production en série” et “en même -, nous commencerons à les déployer sur le territoire de la Biélorussie”, a-t-il ajouté.
Cependant, a poursuivi M. Poutine, “il y a ici un certain nombre de problèmes techniques qui doivent être résolus par des spécialistes, à savoir la détermination de la portée minimale en tenant compte des priorités visant à assurer la sécurité de la Biélorussie”. En outre, cela nécessitera « un investissement minimal pour préparer les infrastructures nécessaires », a-t-il déclaré.
Quant au contrôle de ces missiles, il sera assuré par les forces russes… mais le gouvernement biélorusse « aura son mot à dire sur les cibles contre lesquelles ils pourraient être utilisés », a conclu M. Poutine.
Reste à savoir si le déploiement annoncé de quelques Orechnik en Biélorussie est susceptible d’augmenter le niveau de menace contre les membres de l’OTAN. Cela dépendra en partie des capacités exactes de ces missiles. Mais, a priori, cela ne devrait pas être le cas, étant donné que les forces russes ont déjà la capacité de frapper les pays de l’Alliance, avec le système Iskander. [dont les force biélorusses sont aussi dotées]leurs armes hypersoniques [Kinjal, Avanguard et Zircon]leurs missiles de croisière Kh-101 [à capacité nucléaire] et, bien sûr, leurs missiles intercontinentaux.
L’annonce de Poutine est probablement une réponse aux projets américains de déployer des missiles à portée intermédiaire [et à charge conventionnelle] en Allemagne, comme le système Typhon ou Mid-Range Capability – MRC, conçu pour lancer des missiles SM-6 [RIM-174 Standard ERAM]les Tomahawk [avec 2770 km de portée] et le missile hypersonique « Dark Eagle » [ou LRHW – Long-Range Hypersonic Weapon].