Les députés sud-coréens ont commencé samedi à voter pour ou contre la destitution du président Yoon Suk Yeol, dans une ambiance surchauffée et sous la pression d’une foule immense rassemblée autour du Parlement, le boycott du vote par les élus du parti au pouvoir semblant garantir l’impopularité du vote. chef de l’Etat à conserver son poste.
Près de 150 000 manifestants anti-Yoon, selon la police citée par l’agence de presse Yonhap, ont encerclé samedi soir le bâtiment de l’Assemblée nationale, bravant le froid glacial. Les organisateurs revendiquent de leur côté un million de participants.
Des milliers de partisans de Yoon ont manifesté dans le centre de la capitale.
Il faut au moins 200 voix sur 300 à l’Assemblée nationale pour destituer le président. Le Parti du pouvoir populaire (PPP) de Yoon dispose de 108 sièges et les partis d’opposition de 192.
Les images de la séance retransmises en direct montraient les députés du PPP quitter l’hémicycle avant le vote, au milieu des huées et des hurlements, dans le but de contrecarrer la destitution.
– « Protéger la démocratie » –
Pour gagner, l’opposition doit rallier à sa cause au moins huit députés du parti présidentiel. Mais peu après 10h00 GMT, seuls trois députés du PPP ont voté, malgré l’insistance du président de la Chambre, Woo Won-shik, qui a laissé le scrutin ouvert dans l’espoir que d’autres se présenteraient d’ici la fin de la soirée.
«J’en appelle sincèrement et de toutes mes forces aux membres du Parti du pouvoir populaire. Merci de participer au vote. C’est le moyen de protéger la République de Corée et sa démocratie », a-t-il déclaré. il a lancé.
Yoon Suk Yeol a stupéfié mardi soir la Corée du Sud en annonçant l’imposition de la loi martiale — une mesure sans précédent depuis 1980, après le coup d’État du dictateur Chun Doo-hwan — et en envoyant l’armée au Parlement afin de le museler.
Dans des conditions incroyables, 190 députés ont quand même réussi à tenir une séance d’urgence dans la nuit, tandis que leurs assistants bloquaient les portes de l’hémicycle avec des meubles pour empêcher les soldats armés d’entrer.
A l’unanimité, ces députés ont voté contre la loi martiale, obligeant l’impopulaire président conservateur à l’abroger au bout de six heures à peine.
Dans un discours télévisé à la nation d’à peine deux minutes samedi matin, M. Yoon, 63 ans, a annoncé qu’il confierait à son parti le soin de prendre « des mesures visant à stabiliser la situation politique, y compris concernant mon mandat ».
“Je ne reculerai pas devant mes responsabilités juridiques et politiques concernant la déclaration de la loi martiale”, a-t-il ajouté.
Il a expliqué son coup d’État par son « désespoir de président », alors que le Parlement largement dominé par l’opposition a torpillé pratiquement toutes ses initiatives.
« J’ai causé de l’anxiété et des désagréments au public. Je m’excuse sincèrement”, a-t-il conclu avant de s’incliner profondément devant les téléspectateurs.
– Animosité générale –
Son discours très bref n’a en rien calmé l’animosité générale.
Le chef du PPP, Han Dong-hoon, a affirmé qu’« une démission précoce du président est inévitable », l’exercice normal de ses fonctions étant selon lui « impossible dans ces circonstances ».
Mais à l’issue d’une réunion dans la nuit de vendredi à samedi, une majorité de députés du parti ont réaffirmé la ligne officielle selon laquelle ils feraient échec à la destitution, alors que M. Han avait réclamé la « suspension rapide » de M. Yoon.
“Il semble que le parti au pouvoir ait décidé de s’opposer à la destitution lors du vote à condition que le président lui cède le contrôle”, a déclaré à l’AFP Chae Jin-won, chercheur au Humanitas College de l’université.
“Le principal problème est que, tout en reconnaissant que le président a commis des actes répréhensibles et qu’il est un criminel, ils ne veulent tout simplement pas donner le pouvoir à Lee Jae-myung”, a ajouté M. Chaé.
– « Démission immédiate » –
Devant l’Assemblée, des dizaines de milliers de manifestants anti-Yoon ont suivi le vote avec anxiété sur des écrans géants, brandissant des pancartes exigeant la destitution du président et entonnant des chants pro-démocratie.
« C’est terrible d’en arriver là aujourd’hui », s’exclame An Jun-cheol, 24 ans. « Ce qu’ont fait aujourd’hui les députés du parti au pouvoir, en se retirant du vote, n’est rien d’autre qu’une tentative d’asseoir leur pouvoir et leurs privilèges, sans se soucier des les gens », a-t-il déclaré. .
Un rassemblement pro-Yoon aura également lieu samedi soir sur la place centrale de Gwanghwamun. Les manifestants brandissaient des pancartes indiquant « Arrêtez Lee Jae-myung », d’autres brandissaient des drapeaux américains.
Outre la procédure de mise en accusation, Yoon Suk Yeol fait l’objet d’une enquête policière pour « rébellion », un crime théoriquement passible de la peine de mort, qui n’est plus appliquée dans le pays depuis 1997.