“Axel me réconcilie avec le football d’aujourd’hui, plein d’argent et d’ambition, c’est sympa d’avoir des gars comme ça”prévient Thibault, le partisan omniprésent des Sangliers. Devenu porte-parole du CSSA il y a deux ans via sa page Facebook, l’apprenti commentateur sportif ajoute : « Avant la relégation, il était capitaine de réserve, personne ne le connaissait. Quand tous les joueurs ont quitté le navire, je l’ai appelé. S’il restait, étant capitaine, il pourrait motiver les autres. » À l’autre bout du fil, Thibault découvre un jeune adulte étonnamment calme et franc, « tout sauf stupide et dégage une aura naturelle »et surtout un amoureux sincère de CSSA : « Il m’a rappelé quelques jours plus tard pour me dire qu’il restait. Je me sens proche de lui pour cela, pour son choix de rester aux côtés du CSSA dans les moments les plus difficiles. »
La Varane des Ardennes
Un an et demi plus tard, tout le monde connaît le nom d’Axel Villière dans les Ardennes, même si ce blond élancé n’a pas vraiment l’air d’une star, avec sa bouille de bébé et sa coupe ras du cou. Cette nouvelle renommée ne l’empêche toujours pas d’aller se promener au pied du plus grand château fort d’Europe, même s’il a «Ça a changé sa vie» : « On me reconnaît dans la rue, je reçois de nombreux messages en ligne. C’est très enrichissant, c’est génial de vivre ces choses dans R2 (CSSA a été promu à la fin de la saison dernière, ndlr.)comme jouer dans un stade de 25 000 places avec un kop à chaque match, et voir nos matchs retransmis…”
Dans ce drame ardennais, Axel Villière est devenu, malgré lui, un symbole de la résilience sedannaise à l’été 2023 : « La berline a été une déception. Quand on voit le sort de Sochaux, de Nancy, on se dit qu’à Sedan nous n’avons pas été aidés de la même manière. » D’autant plus que le Sanglier local a immédiatement enfilé le brassard de capitaine pour conduire ses troupes sur le pré de Louis-Dugauguez, dont il connaît par cœur les positions. “J’ai vu beaucoup de matches en Kop, c’est fou d’être sur ce terrain”apprécie quelqu’un qui n’avait jamais joué ni bancé en équipe première, avant la relégation de N1 en R3 à l’été 2023, et qui a rejeté les offres des équipes locales par fidélité au CSSA : « J’ai fait quelques entraînements avec la N1, sans plus. C’est spécial, parce que je réalise mon rêve à cause des cauchemars du club…”
Car avant d’être le capitaine de la nouvelle histoire de Sedan, Axel Villière est avant tout un bon joueur de ballon. « Sur le terrain, je suis calme, j’aime soigner mes relances. Lancer de longs ballons devant, ce n’est pas mon truc.”explique qui ne dit jamais non à un bon tampon. « Le type de joueur que j’aime : humain, qui fait parfois des erreurs, mais qui travaille durdés Thibault. Il n’a pas l’air très musclé sous la chemise, mais quand il entre en contact, ça fait très, très mal. C’est un défenseur très autoritaire, un éternel insatisfait. » Parfois déplacé sur le couloir gauche pour donner un coup de main, Axel Villière a toujours été défenseur, depuis ses débuts au CS Sedan Ardennes à l’âge de six ans, sous les yeux de Jean-Pierre Vautier, directeur historique de l’école de football de Sedan depuis 1972. . « Axel est un excellent joueur, avec une tête bien formée et une belle récupération. C’est un grand capitaine qui remonte le moral de tout le monde à la mi--. En dehors du terrain, il est plus discret, mais sur le terrain, il se fait sentir.”il met en scène l’éducateur qui a tout vécu avec Sedan, du football ouvrier à la Coupe des Champions, en passant par les années de Ligue 1. Et il ajoute : « C’est un pur Ardennien qui a Sedan dans le sang et qui est toujours resté fidèle au club, même lorsqu’il habitait loin. Il a toujours tout fait pour jouer pour CSSA. » Lorsque ses études l’ont amené à s’installer dans la ville rivale de Reims, à 98 kilomètres au sud, l’étudiant en STAPS se déplaçait trois fois par semaine pour se former. Même chose lors de sa première affectation dans un internat de Seine-et-Marne.
Bussaglia, Fourniret et fête des voisins
Depuis, l’Éducation nationale l’a rapatrié à Charleville-Mézières, épargnant sa voiture, mais pas son ego. « Certains étudiants suivent les matchs sur les réseaux. Ils viendront me parler lundi, surtout si je me trompe. J’ai aussi plusieurs collègues qui ont suivi Sedan dans les bonnes années et qui sont revenus après mon arrivée. On parle de CSSA dans la salle des professeurs”sourit le capitaine, mais il ne voit pas de maillot à son nom dans le gymnase : « En classe je vois plus de maillots du PSG, de l’OM ou de clubs étrangers comme le Real Madrid. Il n’y a pas de Rémois, c’est bien. En aucun cas, je n’accepterai en classe un élève portant une chemise rémoise. »
-En véritable Sedanais, Villière méprise la Cité des Sacres, même s’il y a étudié : « Personne là-bas ne savait que je jouais pour Sedan, donc je n’ai eu aucun problème. De toute façon, je n’aurais certainement pas vu un match à Delaune ! » Plutôt du genre à se promener dans la campagne autour de son domicile d’Issancourt-et-Rumel (commune de 391 habitants rendue célèbre par les Fournirets) ou à aller au cinéma, Axel Villière apprécie aussi la vie de professeur d’éducation physique. « varier les plaisirs » et préfère “faire découvrir d’autres sports que le football” à ses élèves. Il assure également que son parcours l’aide à mieux connaître son corps et à mieux l’aborder. « La dimension psychologique d’un match, surtout quand il faut parler dans le vestiaire ou avec l’arbitre. »
De la tranquillité, le capitaine de Sedan et ses troupes en ont quand même besoin, eux qui jouent à domicile devant 1 000 personnes en moyenne, et qui attirent toutes les attentions avec leur coach, Elise Bussaglia (192 apparitions avec les Bleus), et leur nouveau propriétaire, Kalidou Koulibaly. “Je ne l’ai pas encore vu, mais depuis son arrivée le club a beaucoup travaillé pour se restructurerapprécie Axel Villière. C’est un travail invisible, nous n’avons pas de baignoire hydromassante dans le vestiaire par exemple ! » Mais comme si ce contexte ne suffisait pas, les Sedanai passent leur - à jouer en périphérie de Reims. « Pour chaque match nous avons un arrêté préfectoral qui interdit à nos supporters de venir à la R2 ! »regrette ceux qui fredonnent parfois les chants des supporters pendant les - morts sur le terrain. Une hostilité permanente qui contraste avec la saison dernière, en R3, passée face aux villes voisines face à des équipes toutes supporters du CSSA. « En R3, nous avons joué contre des gars venus nous encourager la semaine précédente, avec qui nous avions joué jeunes à Sedan. C’était amusant. Mais il n’y a pas eu de cadeaux.résume le chef de la meute des Sangliers. Ce contexte n’empêche pas CSSA de prendre la tête de son groupe, pour obtenir une deuxième progression au classement. Objectif d’Axel Villière, même si ce dernier sait qu’une fois passé un certain niveau, il devra renoncer au brassard. “Je veux rester au club le plus longtemps possible, mais c’est dommage que si le club monte très vite et que je perds mon emploi, j’aurai fait mon travail et je retournerai dans la réserve”promet le défenseur. Mais selon Jean-Pierre Vautier, le capitaine a encore le - de le prédire, puisqu’il le reconnaît en lui. “le potentiel d’un joueur de N3, voire N2”. Ce qui laisse, au minimum, trois saisons supplémentaires à Axel Villière avant de renoncer au tablier.
Malgré une panne de courant, Sedan continue sa folle séquence à Dugauguez
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