Ah, Toulon-Bayonne. Une rencontre forcément particulière pour Anthony Étrillard. Né et formé sur les bords de la Nive, l’international (3 sélections) n’a connu que deux clubs professionnels dans sa carrière. Débarqué sur le port en 2015, le Basque a pris sa retraite sportive en juin dernier. Gêné par une vilaine blessure au tendon d’Achille depuis février 2023, il n’a jamais réussi à vraiment revenir. Contraint de dire « stop », il découvre, depuis cinq mois, la vie de retraité.
Fraîchement marié, Anthony Étrillard bénéficie désormais, à 31 ans, de sa petite famille. S’il compte ramener l’un de ces quatre au cœur du Pays basque, le talonneur est toujours du côté de Carqueiranne. On ne quitte pas la région comme ça. Rencontre avec l’un des mulets les plus connus du Top 14.
Début juillet, vous avez annoncé votre retraite sportive. Cinq mois plus tard, qu’est-ce qui a changé dans votre vie ?
Le principal changement, c’est que je n’ai pas recommencé la saison (rires). J’avoue qu’au début, ça fait quand même un peu bizarre. Après, j’ai eu un été très chargé. Je me suis mariée en juillet au Pays Basque, j’avais beaucoup de choses à gérer et les enfants ont vite commencé l’école.
Comment gérez-vous cette transition alors que vous avez consacré toute votre vie au rugby ?
Bien sûr, la vie quotidienne change. J’ai toujours été habituée aux mois de juillet et août qui sont un peu… délicats. C’est l’intersaison, c’est dur, c’est intense. Là, j’ai beaucoup plus de temps (rires). J’aime les bonnes choses, la plage, la famille, les amis… c’est différent. Mais c’est comme toutes les bonnes choses : on s’y habitue vite (sourire).
Et en même temps, c’est aussi le premier été où il ne fallait pas faire attention au poids, faire un travail de préparation… C’est aussi une façon de décompresser, non ?
Ah, clairement. Même si lors de l’intersaison précédente, j’étais déjà blessé, j’étais toujours là. Vous ne pouvez pas vous laisser aller à ce point. Mais je fais quand même un peu attention, hein ! Je ne suis pas totalement en roue libre (rires). Je me mets simplement un peu moins de contraintes.
Gardez-vous la motivation pour vous entraîner et vous entretenir ?
Oui. Le sport reste un tiers de ma vie. Donc s’arrêter du jour au lendemain n’est pas ma philosophie. Et en plus, je ne veux pas devenir un plat de nouilles (rires). L’avantage c’est que maintenant je ne peux faire que ce qui me plaît (sourire). Je cours un peu et surtout, je continue la kiné pour essayer de soigner mon talon. Quoi qu’il en soit, à cause de ma blessure, je dois faire de l’exercice. Sans trop lui mettre de pression ni trop le laisser reposer pour que ça ne se complique pas dès que je fais un effort. C’est un équilibre à trouver.
Avez-vous passé des examens depuis votre interruption de carrière ? Êtes-vous toujours suivi ?
Bien sûr. Malheureusement, ce n’est pas parce que j’ai arrêté le rugby que ma blessure a disparu. Je suis toujours soigné. J’ai fait un test récemment, donc oui c’est mieux, mais il y a toujours un petit truc. Cela fera partie du reste de ma vie, c’est comme ça.
La douleur a-t-elle diminué ?
Ça va encore mieux. Evidemment, en arrêtant l’intensité de l’entraînement et du rugby, les douleurs diminuent. Après, honnêtement, je sens que je ne peux pas enchaîner deux grosses séances. Quand je pars courir pour me remettre à l’athlétisme, je vois que le lendemain c’est plus compliqué. Que je manque de force. Pour la vie de tous les jours, ça fera l’affaire. Pour mon futur travail, je pense que ça va quand même me gêner un peu.
Justement, vous abordez votre futur travail. Avez-vous déjà pensé à votre changement de carrière ?
Oui, ça s’accélère ! Tout n’est pas encore défini à 100% mais j’ai un projet en tête. J’espère que ça ira jusqu’au bout mais je préfère ne pas trop commenter pour le moment. Ce sera une entreprise dans la région. Du suspense (rires).
Depuis la fin de votre carrière, qu’est-ce qui vous manque le plus ?
L’adrénaline des matchs. Tout ce qui concerne l’entraînement, je vous rassure, ça va, on s’habitue vite à ne pas y aller (rires). Mais d’un autre côté, le jour du match, la pression, le résultat, le combat me manquent. Et puis, quand je regarde la télé, je me dis que je suis toujours aussi heureux devant ma télé (sourire).
Aujourd’hui à la retraite, comment Anthony Étrillard s’occupe-t-il ?
J’ai une maison, donc j’ai toujours des choses à faire (rires). je bricole ! Sinon, j’emmène mes enfants à l’école, je vais les chercher, je profite. Quand on est sportif, c’est moins le cas. Même si j’ai été blessé pendant un moment, mes week-ends sont différents. Lorsque vous êtes dans une carrière, vous êtes toujours dans le courant. Mais quand tu fais ce métier, tu sais, ça fait partie du jeu. Une fois arrêté, la vie de famille est très agréable à découvrir ou redécouvrir. En tout cas, en ce qui me concerne, je suis très content.
Vous confiiez dans nos chroniques du mois de juillet que vous aviez longuement réfléchi à votre retraite sportive. Cinq mois plus tard, aucun regret ?
Honnêtement, aucun. Le plus difficile a été de prendre la décision. Il me restait encore deux ans de contrat au RCT. Après, j’ai su que j’étais plus à la fin qu’au début de ma carrière. Ma blessure a un peu accéléré les choses, mais une fois que j’ai pris ma décision, cela a été assez facile. J’avais ma famille, mes enfants, je savais ce qui m’attendait et j’étais aussi heureux de faire le changement.
Êtes-vous revenu à Mayol depuis le début de la saison ? Si oui, est-ce bizarre ?
Oui, je suis allé les voir contre Castres. Après, pour être honnête, cela faisait un an et demi que malheureusement, je regardais les matchs en tribunes… donc ça ne change pas fondamentalement. Mais mes enfants aiment aller à Mayol et pour moi, c’est avec grand plaisir. Donc non, ce n’est pas bizarre. D’ailleurs je serai là face à Bayonne (sourire).
Et puis, serez-vous pour Toulon ou Bayonne ?
Ah, ça ! Nous verrons. Pour le mieux (rires).
Ces deux clubs représentent une grande partie de votre vie…
Clairement. Toulon, pour moi c’est… Toulon, c’est ça. C’est la plus grande partie de ma carrière professionnelle. Un club légendaire. Et Bayonne, c’est le club de mon enfance. Depuis que je suis petit, je vais les voir jouer et ce sont eux qui m’ont emmené au plus haut niveau. C’est toujours un peu nostalgique de les revoir. Cela me rappelle de bons souvenirs mais cela reste forcément une rencontre particulière.
Vous auriez aimé boucler la boucle à Bayonne ?
Cela aurait été agréable mais il me restait deux ans de contrat à Toulon. Alors pourquoi pas, mais si c’était boucle pour boucle, pas forcément en bon état, non. Bien sûr, pour l’histoire, ça aurait été cool de finir à Bayonne mais au rugby, on ne contrôle pas tout. Maintenant, je suis passé à autre chose !