ETespérant une qualification assurée pour les huitièmes de finale des Championnats d’Europe avant même de disputer le dernier match de poule le 24 juin, Didier Deschamps avait cette phrase : « Si les gens n’aiment pas ce qu’ils voient, changez de chaîne. » L’entraîneur a répondu à une question sur le jeu prétendument trop défensif des Bleus. Il ne pensait pas avoir bien dit. D’abord parce que le match qui a suivi, contre la Pologne (1-1), s’est révélé parmi les plus somnolents de toute la compétition. Ensuite parce que depuis cet été l’audience télévisée de l’équipe de France est en forte baisse.
Par rapport aux précédentes manifestations de septembre, octobre et novembre, le déclin est évident, même si les affiches sont tout aussi attractives sur papier. Aujourd’hui Français Israël jeudi en Ligue des Nations (4.9). Impensable il y a encore quelques années. Il y a eu la génération Dupont, le Grand Chelem 2022 et la Coupe du Monde en France.
Où sont les stars charismatiques ?
La sélection n’est pas la seule concernée par ce phénomène. Le nombre très faible d’abonnés (500 000) à DAZN pour la Ligue 1 est un signal fort. Presque personne ne sait que les nouveaux Mag Ligue 1 de France 3, Téléfoot et Canal Football Club ont depuis longtemps perdu de leur superbe. Même la Ligue des champions attire moins que la saison dernière sur la chaîne cryptée. A force de multiplier les compétitions, les diffuseurs et les abonnements, le spectateur est – par choix – perdu, sélectif dans son budget, overdosé par cette profusion de football ou tout simplement réfractaire à l’idée d’être considéré comme une vache laitière.
Si les stades de Ligue 1 n’ont jamais été aussi remplis, ceux des Bleus le sont moins qu’avant, malgré de bons taux d’occupation. En juin dernier, plusieurs centaines de places n’ont pas trouvé preneur pour France-Canada au Matmut Atlantique. Pourtant, l’équipe de France n’était pas venue à Bordeaux depuis près de dix ans et se préparait à disputer les Championnats d’Europe. Jeudi, le Stade de France a enregistré le pire nombre de spectateurs de son histoire avec les Bleus (16 611 spectateurs). Si le contexte sécuritaire a évidemment joué un rôle dans ce triste constat, il existe des causes plus profondes.
Les départs à la retraite en équipe nationale d’Hugo Lloris, Raphaël Varane, Antoine Griezmann et Olivier Giroud, leaders russes de la saison 2018, n’ont pas été compensés par l’émergence de joueurs charismatiques et talentueux. Il ne reste plus de véritables stars dans cette sélection, hormis Kylian Mbappé, dont la popularité s’érode en raison de performances douteuses et d’une communication confuse. Le capitaine a manqué la réunion d’octobre et a été libéré de celle de novembre. Nous avions une tête d’affiche plus vivante.
Douze ans de Deschamps
Sur le banc, c’est simple, étant donné que le changement est inexistant. L’équipe de France est dirigée par le même homme, Didier Deschamps, depuis plus de douze ans. Malgré d’excellents résultats quand ça compte (finaliste au Mondial 2022, demi-finaliste à l’Euro 2024), il faut considérer à la fois l’usure et le sentiment de confiscation lié à ce contrat de quatre ans signé tranquillement. Pendant ce temps, l’ombre de Zinédine Zidane, l’un des plus grands joueurs de l’histoire et entraîneur triomphal du Real Madrid, plane toujours, comme l’espoir d’une renaissance.
Deschamps est le meilleur entraîneur de l’histoire des Bleus, mais même si son équipe attirera toujours un large public les étés des années paires, le jeu lamentable qu’il produit répugne aux vrais fans de football. Le Basque a toujours élevé le résultat au-dessus des autres. Le problème, c’est qu’il n’a plus rien gagné depuis la Coupe du Monde 2018 (qui se souvient de la Ligue des Nations 2021 ?) et qu’il ne reste plus grand chose des cinq autres grandes compétitions auxquelles il a participé, à part une superbe demi-finale contre l’Allemagne en 2018. 2016 et une finale rendue mythique par Mbappé six ans plus tard.
Comme cette Coupe du monde 2026 en Amérique du Nord semble lointaine. Mais le football n’est pas seulement une question à long terme. Sans aucun doute, une victoire éclatante contre l’Italie ce dimanche soir au mythique San Siro suffirait à balayer la fatigue et à raviver la flamme. Puce?