À 78 ans, après plusieurs procédures judiciaires, procès, tentatives de destitution et même assassinats, Donald Trump a réussi à remporter l’élection présidentielle aux États-Unis. Jouant astucieusement sur le mécontentement face à l’inflation, alors même que le marché du travail se porte bien, que les salaires augmentent et que la croissance est revenue, il a inlassablement pointé Joe Biden et Kamala Harris comme responsables de tous les problèmes auxquels sont confrontés les ménages américains. . Mais les problèmes économiques structurels n’ont guère été abordés lors de cette campagne électorale. Trump s’est contenté de marteler sa volonté de baisser les impôts, tandis que Harris envisageait de nouvelles aides, principalement destinées aux classes moyennes. Pas un mot sur les finances publiques, pourtant dans un état lamentable ! Juste une incantation du futur vice-président, JD Vance : « Nous avons fait le plus grand retour politique de l’histoire américaine, nous allons faire le plus grand retour économique ».
Le double déficit aux États-Unis
Alors qu’on prédisait un atterrissage brutal de l’économie américaine, elle est bien sortie des turbulences liées à la pandémie. Les performances étaient même bien meilleures que prévu. L’impulsion budgétaire décidée par l’administration Biden y a fortement contribué, prolongeant en quelque sorte la politique budgétaire expansionniste menée par Trump lors de son premier mandat. En d’autres termes, l’augmentation des dépenses publiques et les réductions d’impôts ont continuellement soutenu la croissance aux États-Unis.
Inévitablement, cette baisse de croissance a continué à creuser le déficit public, dans un pays qui a longtemps dépensé plus que ses revenus. Mais, depuis plusieurs années, les décisions semblent se prendre comme s’il n’y avait plus de contraintes budgétaires, comme le démontrent les promesses de campagne des deux candidats. Le pire, c’est que les États-Unis sont également confrontés à un déficit abyssal de leur balance extérieure, ce qui a conduit Trump à déclarer une guerre commerciale à la Chine lors de son premier mandat, prolongé par Joe Biden, et dont l’UE avait fini par être la victime collatérale.
35 800 milliards de dette publique
Ces doubles déficits – balance commerciale et balance publique – sont financés essentiellement par la dette, propulsant En fait le taux d’endettement public à des niveaux stratosphériques : 124% du PIB en 2024 pour 35 800 milliards de dollars de stock de dette publique ! Pire encore, ce ratio croît rapidement depuis les années 2000, où il ne représentait plus que 60 % du PIB.
Soyons clairs : compte tenu des sommes en jeu, aucun État n’aurait pu continuer à s’endetter de cette manière pour financer ses déficits, même avec une économie très dynamique. Les taux d’intérêt très élevés exigés par les prêteurs sur les marchés financiers auraient en effet asphyxié le budget. C’est précisément ce qui s’est passé dans de nombreux États : Grèce, Argentine, Brésil… Rien de tel aux États-Unis, où les taux d’intérêt souverains ont certes augmenté, principalement en raison de l’incertitude née de la campagne électorale, mais restent à des niveaux supportables ( 4,3% le jour du scrutin). Seul le président de la Banque centrale des États-Unis (Fed), Jay Powell, semblait s’inquiéter, en début d’année, du fait que «le gouvernement fédéral américain est sur une trajectoire budgétaire insoutenable« . A l’inverse, l’ancienne présidente de l’institution, Janet Yellen, aujourd’hui secrétaire au Trésor dans l’administration Biden, estime que la dette publique est sous contrôle. En effet, outre le dynamisme de leur économie, les États-Unis disposent d’un outil social et politique omnipotent : le dollar !
Le privilège exorbitant du dollar
Ce «puissance exorbitante du dollar», pour reprendre les mots utilisés en 1964 par le ministre français de l’Économie et des Finances, Valéry Giscard d’Estaing, permet aux États-Unis de s’endetter à des niveaux disproportionnés, puisque les titres sont libellés dans leur propre monnaie, le dollar. Mieux, cela permetin fineLes ménages américains à vivre structurellement au-dessus de leurs moyens, car les investisseurs du monde entier sont prêts à acheter des titres de créance libellés en dollars, notamment les fameux bons du Trésor perçus comme sans risque.
Compte tenu de la situation budgétaire actuelle aux États-Unis, parler de valeurs mobilières »sans risques» est certes audacieux, mais que dire des autres régions du monde, la zone euro n’étant même pas capable d’émettre de manière récurrente des titres de dette communs ? Toute la question est alors de savoir dans quelle mesure les Etats-Unis peuvent user et abuser de ce privilège exorbitant du dollar avant de déclencher une crise majeure. Lors de cette campagne électorale, Kamala Harris et Donald Trump auront montré qu’ils n’avaient pas peur de danser autour d’un volcan, ignorant simplement les questions économiques fondamentales et faisant du budget une simple variable d’ajustement de leur programme…
Exaspérant!