“J’étais sous le choc, je n’ai pas compris”, ces déserteurs russes en qui appellent à fuir l’armée

“J’étais sous le choc, je n’ai pas compris”, ces déserteurs russes en qui appellent à fuir l’armée
“J’étais sous le choc, je n’ai pas compris”, ces déserteurs russes en France qui appellent à fuir l’armée

« J’étais sous le choc » lorsque la guerre a éclaté, « je ne comprenais pas ce qui se passait », se souvient cet homme brun au regard déterminé originaire de Caen, en .

Parti avec son unité pour des « exercices militaires » en Crimée, territoire annexé par la Russie en 2014, il raconte avoir franchi la ligne de démarcation en convoi et se retrouver subitement « dans un autre pays », sans que rien ne lui arrive. a été expliqué précédemment. « Les patrons nous disaient que dans dix jours, ce serait fini », se souvient-il.

“Peur de ce que je faisais”

Les six mois suivants se déroulent comme un cauchemar pour cet ancien officier de communication, qui dit avoir installé des réseaux de communication et autres relais, parfois en première ligne, mais sans jamais combattre. Et de se remémorer ses « peurs ». Celle de mourir bien sûr, mais aussi « la peur de ce que (je faisais) ».

En permission à l’été 2022, Alexandre demande à quitter l’armée… et comprend que cela serait impossible lorsque, quelques jours plus tard, le 21 septembre, le président russe Vladimir Poutine décrète la mobilisation de 300 000 réservistes pour combattre en Ukraine. Une annonce qui tombe comme une lame pour tous les soldats résistants à la guerre, qui se savent alors privés de tout recours pour y échapper.

Comme Sergei (pseudonyme), 27 ans, militaire dans une unité d’infanterie où il était en charge de l’informatique et de la formation des soldats. La mobilisation signifie pour lui qu’il sera contraint de se rendre en Ukraine, « sans aucune garantie » qu’il ne combattra pas, rappelle-t-il.

« J’avais des connaissances en Ukraine et je comprenais parfaitement ce qui s’y passait », explique cet homme frêle rencontré à Paris. « Je ne voulais pas être impliqué. »

« Viré » par son patron pour rejoindre l’armée

La mobilisation partielle s’est révélée encore plus brutale pour Andreï Amonov. Cet ouvrier du bâtiment en Yakoutie, région pauvre de Sibérie, se retrouve convoqué par son patron, qui après dix ans de bons et loyaux services lui annonce qu’il est « viré » et qu’il doit s’engager dans l’armée. Une centaine de ses collègues subissent le même chantage, affirme-t-il.

Le lendemain, ils ont été mis dans un avion, sans leur indiquer la destination, raconte Andreï Amonov, 32 ans. Ils ont finalement atterri en Bouriatie, plus au sud, et ont été conduits dans un centre de formation, d’où il a réussi à s’échapper cinq jours plus tard, « par une fenêtre ».

Comme Sergueï et Alexandre, Andreï Amonov a fui vers le Kazakhstan, un voyage de plusieurs jours vers l’un des rares pays – avec l’Arménie, le Kirghizistan et la Biélorussie, ces deux derniers États étant plus proches du Kremlin – où les Russes peuvent se rendre avec simplement leur passeport intérieur. , l’équivalent d’une carte d’identité.

Car les soldats russes disposent très rarement d’un passeport leur permettant de quitter le pays : pour en obtenir un, ils doivent avoir l’accord de leurs supérieurs et des services de renseignement. Ce document est ensuite généralement confisqué, selon plusieurs ONG.

« Frappé, menotté et emmené au commissariat »

Le Kazakhstan, ancienne république soviétique voisine de la Russie, n’est cependant pas idéal pour les déserteurs, qui craignent d’y être arrêtés puis remis aux autorités russes.

Le 12 mai, jour de son anniversaire, Andreï Amonov se retrouve « frappé, menotté et emmené au commissariat » par des policiers kazakhs. Mais son avocat lui permet d’éviter le pire. Sergueï se souvient des agents venus interroger à son sujet ses voisins, alors ami.

Les trois déserteurs finissent par se rencontrer par l’intermédiaire d’une ONG locale, le Bureau international kazakh des droits de l’homme. Ils rencontrent également un quatrième compagnon d’infortune, Mikhaïl (pseudonyme), arrivé au Kazakhstan sept mois après eux.

Officier de la région de Moscou, Mikhaïl raconte comment il a « exploité les faiblesses » de la bureaucratie militaire russe, n’a pas répondu à sa convocation et a fait traîner les procédures lancées contre lui pour son refus de se rendre en Ukraine. Prendre la fuite fin mai 2023, quelques jours avant son procès.

“Suivez l’exemple français”

« Le jour de mon arrivée à Astana a été le plus beau jour de ma vie. A Moscou, le niveau de danger était devenu colossal», constate cet homme athlétique aux cheveux longs.

Puis la France a accepté de les accueillir, après des mois de plaidoyer et de vérification scrupuleuse de leurs récits par plusieurs ONG, dont Russie-Libertés. Une décision « sans précédent » en Europe, selon la présidente de cette organisation Olga Prokopieva, qui appelle Paris à « aller plus loin dans l’accueil des déserteurs russes » et les autres pays européens à « suivre l’exemple français ».

Selon l’ONG Idite Lessom (Get Away), qui leur vient en aide, quelque 500 déserteurs russes sont actuellement recensés au Kazakhstan et en Arménie et des milliers d’autres se cachent en Russie.

Originaires de Caen, Paris, Metz (nord-est)… les six hommes, enfin sauvés, rêvent désormais d’une vie apaisée et intégrée, mais restent déterminés à se faire entendre. Ensemble, ils travaillent depuis des mois sur un projet, « Proshaï oruzhie » (Adieu aux armes), dans lequel des soldats parlent anonymement de la guerre.

La Russie « ne peut pas gagner » contre l’Ukraine avec une armée « qui tente de plagier la modernité, mais dont les méthodes datent de l’URSS », ironise Mikhaïl, qui souhaite « transmettre » ses convictions à ses « anciens collègues » pour les « appeler à déserter ». . “Peut-être que, grâce à mon exemple, quelqu’un sera inspiré et voudra quitter l’armée”, estime de son côté Alexandre, pour qui “plus l’armée au front est faible, moins il y a de monde, plus la guerre se terminera”. vite et l’Ukraine gagnera.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Le PSG annonce trois absents, le PSV un autre forfait inattendu
NEXT Spirit Airlines gagne du terrain après la prolongation de la date limite de refinancement de la dette jusqu’en décembre – 21/10/2024 12h03