Patients éligibles, efficacité, prix… Que sait-on de ce traitement contre l’obésité ?

Patients éligibles, efficacité, prix… Que sait-on de ce traitement contre l’obésité ?
Patients éligibles, efficacité, prix… Que sait-on de ce traitement contre l’obésité ?

On l’attendait depuis longtemps, et il est enfin arrivé. Ce mardi, le laboratoire danois Novo Nordisk a annoncé le lancement commercial en de son médicament phare contre l’obésité, baptisé Wegovy.

Disponible sur ordonnance, Wegovy ne sera cependant pas remboursé et sa délivrance sera accordée au cas par cas, dans un cadre restreint par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Par quel mécanisme permet-il aux patients de perdre du poids ? Qui pourra en bénéficier ? Qui peut le prescrire et est-il efficace ?

Un nouveau traitement attendu

Le lancement de ce nouveau traitement intervient dans un contexte d’explosion de la demande pour une nouvelle génération de traitements efficaces pour perdre du poids : les analogues du GLP-1 (aGLP-1), dont fait partie Wegovy. Mais aussi son cousin, le célèbre Ozempic, un antidiabétique apprécié de nombreuses stars outre-Atlantique pour ses propriétés amaigrissantes, dont les sœurs Kardashian et Oprah Winfrey. Au point de créer des pénuries et de priver les patients diabétiques d’accès à leur traitement.

Le principe actif de Wegovy, le sémaglutide, est le même que celui d’Ozempic, également fabriqué par Novo Nordisk, mais en cas d’obésité, il est utilisé à des doses plus élevées. Cette classe de médicaments imite une hormone intestinale, appelée glucagon-like peptide-1 (GLP-1), qui stimule la sécrétion d’insuline et procure une sensation de satiété, notamment en ralentissant la vidange de l’estomac. En pratique, les patients qui prennent Wegovy se sentent rassasiés plus rapidement et plus longtemps, tout en mangeant moins, ce qui leur permet de perdre du poids plus facilement.

« Dans le domaine de la prise en charge de l’obésité, ce traitement est très intéressant car il offre une alternative à la chirurgie », se réjouit Catherine Grangard, psychologue et psychanalyste spécialisée dans l’obésité et auteure de Comprendre l’obésité (éd. Albin Michel). La chirurgie de l’obésité change positivement la vie de nombreux patients, mais elle entraîne un taux d’échec d’environ 40 % en termes de perte de poids et est associée à un ensemble d’effets secondaires très compliqués pour les patients. Ce médicament offrira une alternative à ceux qui ne peuvent pas accéder à la chirurgie de l’obésité ou pour qui il n’a pas fonctionné. C’est le cas d’un de mes patients obèses morbides qui a été amputé d’une jambe suite à une infection nosocomiale. Il craint de subir une nouvelle intervention chirurgicale mais ne parvient pas à perdre du poids, il est généralement le patient indiqué pour ce traitement.

Un médicament à accès restreint

Mais celui qui le voudra n’aura pas accès à ce médicament. Après l’exemple américain d’Ozempic ou le scandale du Mediator en France notamment, l’histoire récente regorge d’exemples d’antidiabétiques détournés de leur usage à des fins minceur, et non sans effets délétères sur la santé des patients. D’où l’extrême vigilance des autorités sanitaires françaises.

Ainsi, « pour encadrer l’usage de ces médicaments, […] la prescription initiale de l’aGLP-1 indiqué dans le traitement de l’obésité doit être réalisée par un médecin spécialisé en endocrinologie-diabétologie-nutrition ou titulaire d’une formation transversale spécialisée en « nutrition appliquée » », poursuit l’ANSM. Les renouvellements d’ordonnances, en revanche, « peuvent être effectués par les médecins généralistes ».

Une liste restreinte de médecins prescripteurs, tout comme la liste des patients éligibles aux soins. “Des cas de mésusage de l’aGLP-1 sont avérés, notamment un détournement à des fins esthétiques par des personnes pour lesquelles ce traitement n’est pas indiqué (c’est à dire des personnes non en situation d’obésité ou de surpoids et qui n’ont pas de problème de santé lié au poids), insiste-t-il. l’ANSM. Ces abus peuvent entraîner des effets secondaires parfois graves. » C’est pourquoi l’agence du médicament « demande aux médecins de respecter le parcours de soins de la HAS (Haute Autorité de Santé) et de prescrire l’aGLP-1 indiqué dans le traitement de l’obésité aux patients présentant un indice de masse corporelle initiale (IMC) supérieur à ou égal à 35 kg/m2, âgé de moins de 65 ans. Et pour ces patients, Wegovy peut être prescrit « uniquement en deuxième intention, en cas d’échec du soutien nutritionnel et en association avec un régime hypocalorique et une activité physique ».

Pour Catherine Grangarde, « il est fondamental que sa prescription soit strictement encadrée pour éviter les abus, et que sa délivrance pour perdre du poids à des fins cosmétiques soit interdite. Mais il est également essentiel que pour les patients éligibles, ce traitement s’inscrive dans une prise en charge multidisciplinaire de l’obésité, avec un accompagnement psychologique, pour identifier les facteurs individuels ayant conduit à une prise de poids.

Un médicament non remboursé

Filtre supplémentaire dans l’accès à Wegovy : son prix. Le médicament, qui n’est, à ce jour, pas enregistré au remboursement, voit donc son prix fixé librement par le laboratoire danois. A partir de son autre médicament anti-obésité commercialisé en France, la filiale française de Novo Nordisk a estimé le prix du traitement Wegovy « entre 9 et 12 euros par jour ». Un prix qui pourrait évoluer à la suite de négociations avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) « d’ici la fin de l’année » par la HAS.

Ce médicament, qui consiste en une injection hebdomadaire à posologie progressive, ne sera donc pas à la portée de toutes les bourses, avec un traitement dont le coût mensuel moyen se situe entre 270 et 360 euros. “C’est un coût assez important, c’est dommage et dommageable pour les patients éligibles, car la carte de l’obésité se superpose à la carte de la précarité et de la pauvreté”, déplore Catherine Grangardard. Avec l’arbitrage, certains pourront « se permettre » ce traitement, par exemple en renonçant à d’autres produits coûteux et nocifs comme le tabac. Mais c’est un coût que les plus précaires ne pourront pas supporter.»

Quelle efficacité et quels risques ?

Mais au final, ce traitement fonctionne-t-il et est-il sécuritaire ? Autorisé par l’Agence européenne du médicament début 2022 pour la prise en charge de l’obésité chez l’adulte et depuis 2023 pour les adolescents de plus de 12 ans, Wegovy affiche des résultats plutôt enthousiasmants, avec une perte de poids de 12,44 %. après 68 semaines de traitement, rapporte l’ANSM dans son étude de suivi de Wegovy, réalisée sur des patients français ayant eu un accès précoce. Une perte de poids qui peut même atteindre 17 % du poids des patients, selon d’autres chiffres de la HAS. De bons résultats, mais « on dit vigilance, pas miracle », insiste Catherine Grangarde. Si l’on pense à un produit miracle pour avoir un corps de rêve sans effort, on se dirige vers une catastrophe planifiée. En revanche, avec un accompagnement adapté, c’est une opportunité supplémentaire offerte aux patients.

Et côté risque ? Les résultats de l’étude SELECT, menée par le laboratoire Novo Nordisk et publiés en août 2023, ont montré une réduction de 20 % du risque d’événements cardiovasculaires indésirables majeurs avec ce traitement. “Les implications sont profondes”, a déclaré à CNN le Dr Harlan Krumholz, cardiologue et scientifique à l’Université de Yale et à l’hôpital Yale New Haven, qui n’a pas participé à l’étude. « Nous n’avons jamais rencontré de médicament offrant des bienfaits aussi étendus pour le cœur. » Mais son utilisation s’accompagne d’effets indésirables comme des nausées, des diarrhées ou encore des vomissements, prévient la HAS.

L’obésité touche désormais plus d’un milliard de personnes dans le monde, selon une étude publiée en mars dans la revue médicale britannique. La Lancette.

 
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