L’abbé Pierre, décédé en 2007, est accusé par une vingtaine de femmes de violences sexuelles. Son neveu s’exprime pour la première fois sur les faits reprochés à son oncle.
Des accusations qui choquent aussi sa famille. Guy Tuscher, neveu du père Pierre, a avoué ce lundi 7 octobre sur France Bleu avoir conscience que son oncle ne respectait pas son vœu de chasteté. Il affirme toutefois n’avoir jamais soupçonné qu’il était l’auteur d’agressions sexuelles ou de viols.
« Dans la famille, nous savions tous que la sexualité de notre oncle était problématique », raconte Guy Tuscher, 71 ans, fils de la petite sœur de l’abbé Pierre, sans préciser ce qu’il entend par là exactement.
« Ma mère Anne-Marie, sa sœur, avait beaucoup discuté avec lui sur le sujet. Elle savait très bien que le célibat, pour lui, était quelque chose d’insupportable », poursuit-il.
« En revanche, les agressions sexuelles telles qu’elles ont été décrites, non, nous n’en avions pas connaissance », assure le neveu du fondateur d’Emmaüs.
« Une déception »
Pour Guy Tuscher, les accusations d’agression sexuelle, révélées au grand public d’abord en juillet puis en septembre dernier, ont fait l’effet d’un électrochoc.
“C’était violent”, dit-il, dénonçant des faits “inacceptables”.
Evoquant une « déception envers l’homme », Guy Tuscher refuse néanmoins de le « renier ». “Il reste mon oncle”, a-t-il déclaré.
Guy Tuscher affirme écouter les femmes qui accusent son oncle. « Je soutiens ces femmes qui ont raconté ce qu’elles ont subi. Ils doivent parler pour qu’un processus de guérison puisse s’opérer et mettre loin d’eux ce qu’ils ont vécu avec lui », assure le septuagénaire.
« On ne peut pas dire que tout ce qu’il a fait doit être jeté. Ce n’est pas possible», défend en même temps Guy Tuscher, en faisant référence à l’action caritative de son oncle qu’il décrit. comme « un homme avec ses forces et ses faiblesses ».
“Tout le monde savait”
Guy Tuscher se souvient de l’image idéalisée qu’avait son oncle, vu comme un bienfaiteur, notamment avec la création de l’association Emmaüs qui venait en aide aux plus démunis.
« Tout le monde était captivé par le mythe de l’abbé Pierre. Et qui était l’homme derrière tout ça ? Eh bien, nous découvrons maintenant l’homme », note-t-il.
Pour le septuagénaire, l’impression que l’abbé était quasiment intouchable donnait sans doute à son oncle un sentiment de toute-puissance. Il pourrait “toujours (avoir) le prétexte pour se dire : ‘en tout cas, ma célébrité m’aide pour mon action humanitaire et politique'”, estime Guy Tuscher.
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Le neveu de l’abbé Pierre dénonce également le rôle de l’Église dans cette affaire. « Tout le monde savait qu’il y avait un problème, l’Église, l’État, qui ne voulait pas lui donner la Légion d’honneur, et même Emmaüs, qui n’avait pas intérêt à l’époque à le faire savoir », accuse le septuagénaire.
Le président de la Conférence des évêques de France (CEF) Éric de Moulins-Beaufort reconnaissait à la mi-septembre qu’« il est désormais établi que, de 1955 à 1957, au moins certains évêques savaient que l’abbé Pierre avait un comportement grave à l’égard des femmes.