Les deux spécialistes de la vente de produits low-cost made in China, Temu et Shein, sont en pleine forme. Dans un contexte post-inflationniste où les consommateurs recommencent timidement à faire chauffer leurs cartes bancaires, les deux sites sont respectivement 1er et 2ème du classement des marques où les Français ont le plus augmenté leurs dépenses au premier semestre 2024 par rapport au même période en 2023 (hors grande distribution), selon Circana.
Ils devancent le spécialiste de la seconde main Vinted, qui a vu les sommes dépensées sur son site baisser au premier semestre selon Kantar. « Cette brocante est concurrencée par de nombreux acteurs de la mode qui se sont lancés sur ce créneau, non pas parce que le modèle économique est rentable – il ne peut l’être que si le nombre de biens vendus est très important, comme sur Vinted – mais pour des raisons d’image. »analyser Marc Lolivier, délégué général de la Fédération du commerce électronique et de la vente à distance.
Temu et Shein se développent sur le marché français, car « le sentiment de perte de pouvoir d’achat est partagé par une écrasante majorité de Français »pose Emily Mayer, directrice business insight chez Circana dans un article Linkedin. Pourtant, les consommateurs, qui se sont serrés la ceinture tout au long de la période inflationniste, veulent se faire plaisir. Ils achètent donc des produits bon marché sur ces deux sites.
Temu n’a ouvert ses portes en France qu’en avril 2023. Pourtant, la marketplace compte déjà 3,7 millions d’acheteurs au premier semestre 2024, selon Kantar. Le nombre de clients Shein reste stable à 1,8 million. Si la fréquence d’achat du site de mode baisse un peu (elle passe de 2 à 1,9 achats sur la période), le panier moyen augmente, passant de 29,7 à 35 euros. Chez Temu, c’est déjà plus de 30 euros, selon Kantar.
« Subventions postales »
Les consommateurs dépensent donc davantage auprès de ces deux acteurs, qui siphonnent les parts de marché des sites français. Outre ce contexte économique favorable à leur développement, « Les places de marché qui proposent des produits de fabricants chinois bénéficient d’un avantage significatif par rapport aux autres acteurs du marché : des tarifs postaux préférentiels, auxquels ont droit les commerçants basés en Chine en vertu de la Convention de l’Union postale universelle. Un texte signé au profit des pays en développement, dont la Chine.»souligne Marc Lolivier. La France est membre de cette organisation depuis… 1875. Le montant de ces subventions est actuellement en cours de révision suite au coup porté sur la table par l’administration Trump en 2019. Selon le média financier suisse Toutes les actualitéscette rémunération devrait atteindre d’ici 2025 au maximum 70 % de tous les coûts d’une lettre ou d’un colis de même poids ou de même taille distribué entre deux villes des pays signataires. Avant, c’était encore moins.
Autre avantage : « Exonération des droits de douane pour les produits expédiés de Chine, d’un montant inférieur à 150 €, comme le prévoit la réglementation européenne. Sachant que le panier moyen sur ces plateformes s’élève à 30 €, cette exonération leur permet donc d’éviter majoritairement les droits de douane à l’importation de produits. La Commission européenne a récemment publié une estimation selon laquelle 4 milliards de colis de moins de 150 euros, donc sans droits de douane, parviendront en Europe en 2024. En 2023, ils étaient 2,3 milliards. 80% de ces colis proviennent de Chine »explique le leader de la Fevad. Ces « subventions » logistiques font obstacle aux sites qui commercialisent des produits fabriqués dans des pays considérés comme développés, alors que la concurrence est déjà féroce sur le marché du commerce électronique.
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