Monsieur Brexit fait gagner du temps à Macron, mais l'impasse française demeure

Monsieur Brexit fait gagner du temps à Macron, mais l'impasse française demeure
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LUDOVIC MARIN/POOL/AFP
Michel Barnier (R) aura besoin de toutes ses capacités de négociation pour que son gouvernement dure

Michel Barnier n’est pas la solution aux difficultés auto-infligées par Emmanuel Macron, car il n’existe pas de solution au piège présidentiel.

Les chiffres sont des chiffres, et dans l’état actuel du Parlement, il n’existe pas d’homme politique capable de réunir une majorité garantie.

Ce que l’ancien M. Brexit pourrait faire, c’est gagner un peu de temps pour le président.

Si d’ici Noël, M. Barnier est toujours en poste, cela sera considéré comme un travail plutôt bien fait.

Les dernières semaines de tergiversations de Macron ont été pénibles à suivre. Ses conseillers ont lancé à maintes reprises des ballons d’essai à une presse avide de savoir-faire, pour finalement voir chaque Premier ministre potentiel désavoué le lendemain.

On nous a répété à maintes reprises qu’une nomination était imminente, mais le candidat a soudainement développé des handicaps qui le rendaient inapte à occuper ce poste.

Dans chaque cas, le président Macron devait s’assurer que le candidat potentiel répondrait à deux critères.

Premièrement, il ou elle ne détruirait pas l’héritage du président – ​​notamment les réformes des retraites introduites si douloureusement il y a deux ans.

Deuxièmement, la personne devait être – selon le jargon – « non censurée ». En d’autres termes, elle devait pouvoir éviter le rejet automatique – et l’expulsion – par l’opposition à l’Assemblée.

Michel Barnier, 73 ans, ancien ministre calme et imperturbable, doté de solides compétences de négociation, pourrait enfin correspondre au profil recherché.

De centre droit, il approuve la réforme des retraites. En 2021, lorsqu'il s'est présenté à l'investiture conservatrice pour l'élection présidentielle (il a perdu face à Valérie Pécresse), il a proposé de repousser encore plus loin l'âge de la retraite, à 65 ans.

Et sur la question du vote de confiance… eh bien, c’est là que le bât blesse.

Il se trouve que Marine Le Pen – dont le Rassemblement national (RN) populiste est l’un des trois blocs à peu près équivalents à l’Assemblée – a déclaré qu’elle ne voterait pas automatiquement contre un gouvernement Barnier.

Si elle le faisait, Barnier tomberait automatiquement car la gauche voterait toujours contre lui.

Marine Le Pen ne déteste pas inconditionnellement Michael Barnier comme elle détestait un autre Premier ministre potentiel de centre-droit, Xavier Bertrand.

Lors des primaires de 2021, Barnier a tenu des propos assez durs sur l’immigration, suggérant même que la France pourrait tenter de contourner les cours européennes de justice et les droits de l’homme. Cela lui est également très utile.

Bertrand GUAY/AFP
Le Rassemblement national de Marine Le Pen attendra de voir quels sont les projets de Barnier

Le Rassemblement national laisse donc entendre qu'il attendra avant de renverser Barnier. Si son programme comprend des mesures positives sur l'immigration, le coût de la vie et – ce qui est crucial pour elle – la représentation proportionnelle, alors les dirigeants du parti affirment qu'ils pourraient lui accorder un sursis.

Un peu de consolation.

Car il n’en demeure pas moins que, malgré toute sa courtoisie, sa patience et son expérience, M. Barnier gouvernera dès le premier jour en sursis.

L'alliance de gauche du Nouveau Front populaire, arrivée en tête des élections de juillet, est furieuse du choix du Premier ministre.

Pour eux, la gauche a remporté le scrutin, et il était donc du devoir constitutionnel du président Macron de nommer un Premier ministre issu du camp de gauche. Le fait qu'il ait contrecarré leurs plans constituera pour beaucoup un motif légitime de protestation dans la rue.

Tout dépend désormais du choix des ministres par M. Barnier et de la mesure dans laquelle il choisira d'exercer son autonomie vis-à-vis du président.

En théorie, il est libre de mener sa propre vie. Emmanuel Macron a admis avoir perdu les élections et, selon la Constitution française, c'est le gouvernement, sous la direction du Premier ministre, qui définit et met en œuvre la politique.

Mais de par son tempérament et ses inclinations politiques, Michel Barnier ne devrait pas s'éloigner beaucoup du programme de Macron. Tous deux sont des hommes du centre, avec des penchants à droite sur le front économique.

Ils sont tous deux de grands Européens, qui voient dans l’UE le débouché nécessaire à la grandeur française. Et ils croient, du moins en théorie, que les déficits doivent être réduits, notamment parce que c’est ce que l’UE exige.

Il s’agit, en d’autres termes, d’une figure très établie, du type de celle dont la gauche comme la droite populiste estiment que la France a voté en juillet pour se débarrasser.

Si donc il s’avère que le barnierisme n’est qu’un macronisme par d’autres moyens – et le débat budgétaire du mois prochain sera le premier test crucial – alors toutes les aptitudes de négociation vantées du nouveau Premier ministre ne serviront à rien face à la réaction négative d’une nouvelle Assemblée hostile.

 
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