Par Lucas Burel
Publié le 3 septembre 2024 à 16h28mis à jour le 3 septembre 2024 à 17h15
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Alors que l’Elysée consulte à nouveau les partis politiques pour s’entendre sur un nom à envoyer à Matignon, le Rassemblement national a déjà promis de censurer ceux de Bernard Cazeneuve et Xavier Bertrand.
Fermez la porte à Xavier Bertrand, il revient par la fenêtre. Le nom du président des Hauts-de-France est à nouveau au cœur des interminables tractations qui secouent l’Elysée, a confirmé, ce mardi 3 septembre, l’entourage d’Emmanuel Macron. Toujours en lice, aux côtés du socialiste et ancien Premier ministre, Bernard Cazeneuve, leur cas fera l’objet de nouvelles consultations des forces politiques, dont le Rassemblement national (RN), dans la journée.
Évoquée depuis plusieurs semaines, l’hypothèse de l’arrivée en fonction de l’ancien ministre de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy avait été progressivement éclipsée, notamment ces dernières heures, au profit de l’option éphémère de Thierry Beaudet, le président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), la carte « société civile » alors privilégiée par le Palais.
Bertrand, une nouvelle impasse ? Comme le rapportait « Le Nouvel Obs » la semaine dernière, Marine Le Pen avait prévenu Emmanuel Macron, dès le 26 août, qu’elle censurerait un gouvernement dirigé par le président des Hauts-de-France. Une promesse tuant dans l’œuf tout espoir pour lui de sauver sa tête – ce que réclame déjà la gauche… Jordan Bardella l’a d’ailleurs rappelé dès que l’hypothèse d’un retour à la table des négociations s’est posée : Xavier Bertrand est « scandaleux et insultant envers le RN ». Et Eric Ciotti, l’allié, continuait : « Il est allé jusqu’à appeler à voter communiste pour bloquer l’Union de la droite, insultant au passage 11 millions d’électeurs. Il est impossible de faire confiance à ces années d’ambiguïté et de trahison. »
Relations terribles
Plusieurs raisons, plus ou moins politiques, expliquent la fermeté du RN. Qui rappelle le score modeste des Républicains, la famille politique d’origine du président des Hauts-de-France, le 7 juillet dernier : 6,57 % des voix au premier tour, pour 39 petits sièges. « Xavier Bertrand n’a aucune légitimité. Il n’a aucun poids dans son propre parti, qu’il a trahi à plusieurs reprises. Qui représente-t-il à part lui-même ? »critiquait encore Marine Le Pen auprès de quelques proches ces derniers jours. Vraiment ? Ce mardi matin, la réactivation de la piste Bertrand a fait l’objet de plus d’une heure de discussion en visioconférence entre l’Elysée et les chapeaux à plumes de la droite (Laurent Wauquiez, Bruno Retailleau et Gérard Larcher) afin de s’assurer, avec succès, qu’ils ne s’y opposeraient pas… Plus prosaïquement, d’autres paramètres plombent la facture de l’ancien assureur après les lepénistes : ses relations exécrables avec Marine Le Pen et le RN, que Xavier Bertrand a battu en 2015 et 2021.
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Pourquoi alors se lancer dans de nouvelles consultations ? Deux hypothèses sont envisageables ce mardi après-midi. La première : l’Elysée chercherait ainsi à acter formellement cette nouvelle impasse politique, comme cela avait déjà été le cas fin août avec Lucie Castets, la candidate du Nouveau Front populaire, elle aussi condamnée à la censure. Une seconde, plus politique, et que certains lieutenants de Marine Le Pen n’écartent pas totalement : le Palais proposerait finalement la candidature de Xavier Bertrand afin de contraindre Marine Le Pen à justifier politiquement son blocage auprès de ses électeurs. Et ce alors que Xavier Bertrand peut difficilement être soupçonné de vouloir mettre en œuvre une politique de gauche… Un écueil que l’extrême droite et son chef cherchent à tout prix à éviter : « Après avoir refusé à la gauche le droit de gouverner en raison d’un rejet majoritaire, Emmanuel Macron, par calcul politique, imposerait-il un Xavier Bertrand voué lui aussi à la censure immédiate ? Ce serait un véritable scandale ! »répond déjà la garde rapprochée du député d’Hénin-Beaumont.
« Non, non et non »
Bernard Cazeneuve, toujours sur la ligne de départ, n’est pas beaucoup mieux loti. Mal aimé de la gauche, l’ancien Premier ministre peut encore espérer s’en sortir s’il parvient à éviter les foudres de la droite et à emmener avec lui suffisamment de députés socialistes. Mais il devra renoncer aux voix du RN : « On ne fait pas de cas particulier entre Cazeneuve et Bertrand. Entre eux, c’est la même chose, à savoir : non, non et non. » Une intransigeance qui contraste avec la ligne de ” responsabilité “ jusqu’ici défendue par l’extrême droite et qui consistait, à l’exception du NFP, à ne pas exclure « par principe et par avance » les prétendants à Matignon.
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Et maintenant ? Ce mardi également, le RN a annoncé qu’il « accepterait un gouvernement technique, qui s’occuperait des affaires courantes » avec un mandat « mettre en œuvre la représentation proportionnelle aux élections législatives » et d’organiser un nouveau scrutin dès juin prochain. Dans ce scénario très provisoire – et très incertain –, Thierry Beaudet semble déjà hors jeu. Coupable de déclarations trop hostiles au RN, les frontistes lui ont aussi promis la censure.