Soutenu par LADAPT, l’Agefiph et la FIPHFP, le SEEPH est un rendez-vous annuel pour examiner les différentes mesures mises en place pour faciliter l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Pour le 27ème édition, le thème est « La transition numérique : un accélérateur pour l’emploi des personnes handicapées ? « . Tanguy De La Forest, outre son statut d’athlète para-sportif de haut niveau et son engagement associatif aux côtés du CPSF et du COJO Paris 2024, est un entrepreneur. En 2006, il co-crée un cabinet de recrutement spécialisé pour les personnes handicapées baptisé « Défi RH ».
CPSF : Bonjour Tanguy, vous êtes co-fondateur de « Défi RH », cabinet de recrutement spécialisé dans les travailleurs en situation de handicap. Pouvez-vous nous parler de votre projet ?
Tanguy De La Forêt : En 2006, avec ma sœur Patricia et un enfant de 3e Associé, Xavier, nous avons décidé de nous lancer dans la création d’un cabinet spécialisé dans le recrutement de personnes handicapées lors de la sortie de la loi du 11 février 2005. Cette loi impose qu’une entreprise de plus de 20 salariés compte plus de 6% de travailleurs handicapés. Si elle n’en possède pas, elle doit payer une cotisation. « Défi RH » n’est pas un grand cabinet, nous comptons 8 salariés à ce jour, et nous sommes vraiment spécialisés dans le recrutement de tous types de PSH, de tous profils mais plus particulièrement les profils de personnes avec un peu plus d’expérience ou de qualification. . « Défi RH » fonctionne comme un cabinet traditionnel, c’est-à-dire qu’une entreprise contacte le cabinet et lui demande de trouver des profils correspondant au poste et à leurs besoins. Le cabinet va alors procéder à sa recherche de candidats, c’est ce qu’on appelle le « sourcing ». Le cabinet réalise une pré-qualification téléphonique sur les profils choisis, et propose à certains de passer un entretien soit en présentiel, soit par visio selon les conditions de chacun. Suite à cela, le cabinet fait une présentation des profils retenus à l’entreprise en fonction des compétences mais aussi de l’environnement de travail. En effet, aujourd’hui lorsqu’on parle de travailleurs handicapés, il est important de pouvoir discuter des contre-indications par rapport à un poste et des aménagements nécessaires selon le type de handicap.
Pourquoi est-il intéressant de recruter une personne en situation de handicap ?
T.DLF : Evidemment, pour les entreprises il y a cette cotisation qui existe et qui sera réduite avec l’embauche d’un travailleur handicapé mais ce n’est pas le seul intérêt aujourd’hui. Lorsque nous recrutons un travailleur handicapé, nous le recrutons bien sûr avant tout pour ses compétences, mais il peut aussi apporter de la diversité au sein de l’entreprise. Il offrira peut-être un parcours de vie que d’autres profils n’ont pas forcément, une maturité développée, une productivité un peu plus élevée… En effet, certains travailleurs handicapés veulent prouver qu’ils sont capables de faire comme tout le monde malgré leur handicap, ce qui les amène parfois à pour être plus productif. Les chiffres montrent qu’il y a moins d’absentéisme parmi les personnes handicapées. En revanche, une personne handicapée a tendance à se plaindre peu des petits tracas du quotidien, et sa présence incite les salariés à moins se plaindre aussi car ils constituent un « bel exemple de vie ». C’est un véritable atout pour l’entreprise de recruter une personne en situation de handicap, pour compléter ses compétences.
La loi de 2005 a donc permis de relancer fortement le recrutement de personnes handicapées, quelle est la situation aujourd’hui ?
T.DLF : Je n’ai pas les statistiques mais ce qui est sûr c’est que depuis 2006, il y a eu une multiplication d’entreprises avec de vrais projets et projets de leur part. Des emplois spécialisés pour l’accueil et l’intégration des personnes handicapées ont été créés, qui n’existaient pas ou très peu auparavant. Cela a permis aussi d’avoir une reconnaissance au sein des entreprises, des personnes handicapées non déclarées ont commencé à se déclarer. Il y a eu une véritable dynamique pendant 5 à 10 ans. Aujourd’hui, cela fait presque 20 ans, nous sommes dans une phase un peu de stagnation. C’est dommage car il y a de plus en plus de profils de travailleurs handicapés en formation, les écoles et les formations sont de plus en plus accessibles à tous, ce qui permet vraiment d’avoir des profils plus confirmés et expérimentés. diplômés. Un des conseils à donner pour relancer cette dynamique serait de communiquer de temps en temps mais aussi de sensibiliser et former les managers en charge du recrutement. Par exemple, dans notre cabinet « Défi RH », nous menons également des activités de formation et de sensibilisation, notamment avec un dispositif appelé « Conf Challenges » où 5/6 intervenants, intervenants en situation de handicap, viennent sensibiliser les entreprises. Ce format fonctionne très bien.
Pensez-vous que les Jeux Paralympiques de Paris 2024 vont changer la politique des entreprises et permettre le recrutement de personnes handicapées ?
T.DLF : Oui, je suis assez convaincu que le sport change les mentalités. Je donne très souvent un exemple en disant qu’il y a une trentaine d’années quand les gens parlaient de moi ils disaient «Tanguy handicapé» alors qu’aujourd’hui on parle de «Tanguy, athlète de haut niveau, avec une spécificité qui est le handicap« . Le changement est radical. Dans le monde du recrutement, on commence aussi à le voir, on ne voit plus la personne en situation de handicap mais ses compétences avant son handicap. Avec les Jeux de Paris 2024, la médiatisation se développe, et on sent une réelle envie des entreprises qui souhaitent profiter de cet événement en devenant mécènes et/ou sponsors d’athlètes paralympiques. De plus en plus d’entreprises, notamment à travers le Pacte de Performance, souhaitent soutenir les sportifs. Si les Jeux sont un succès, il est certain que cela créera un terrain de recrutement derrière, même parmi les personnes handicapées qui ne sont pas des sportifs. A noter également que Paris 2024 comptera de nombreux profils de bénévoles en situation de handicap.
Cette semaine est une semaine particulière pour le monde du travail et le recrutement des personnes handicapées, comment vous impliquez-vous ?
T.DLF : Je m’implique de trois manières : à la fois auprès des entreprises qui me soutiennent, à la fois auprès de ma fédération sportive mais également auprès de mon cabinet de recrutement. Je peux difficilement répondre à toutes les demandes avec une priorité donnée à la préparation des Jeux de Paris 2024 mais c’est une semaine très importante. Soyez prudent car de nombreuses entreprises agissent cette semaine mais n’en font pas assez le reste du temps. Il faut non seulement parler de ce sujet cette semaine, même si c’est bien sur le plan médiatique, mais cela reste un travail quotidien.
Cette année le thème est « la transition numérique : un accélérateur pour l’emploi des personnes handicapées », qu’en pensez-vous ?
T.DLF : Je suis plutôt d’accord avec ça. Il y a une difficulté aujourd’hui pour certains profils, notamment en termes de mobilité et de déplacements. Avec la crise sanitaire, le cadre de travail a évolué et a accru le télétravail, c’est évidemment un avantage pour les entreprises pour trouver des profils qu’elles n’auraient pas pu approcher du fait de l’éloignement géographique mais aussi pour les personnes handicapées qui n’auraient pas pu déposer leur CV. ces sociétés. La transition numérique peut être extrêmement intéressante, il y a un intérêt pour tout le monde. D’ailleurs, du côté du Défi RH on le voit aussi dans la participation aux salons de recrutement. Avant qu’ils se déroulaient tous en présentiel, aujourd’hui ils se déroulent également en visio, nous pouvons toucher plus de personnes et donc trouver plus de profils correspondant aux offres qui nous sont proposées.