JJusqu’en octobre 2021, son parcours sportif compilait “neuf ans de handball à Mérignac et d’athlétisme collégial en section sportive”. Puis, en entrant au lycée sportif, à Staps, le Bordelais Hugo Cerra est entré dans une autre dimension lorsqu’il “a choisi l’athlétisme comme matière, pensant que j’aurais de meilleures notes là-bas qu’en main, raconte l’athlète, tout juste âgé de 20 ans. Parallèlement, j’ai demandé à une amie, Marie Bazin, de pouvoir s’entraîner avec elle à l’US Talence ».
En octobre 2021 donc, l’entraîneur Franck Copy recevait son cadeau de Noël avec Hugo Cerra, un joli visage blond, posé sur un corps grand et très fin. « Je voulais l’observer avant d’accepter, je ne veux pas avoir trop de monde dans le groupe, se souvient le coach. J’ai vu des défauts de débutant, un manque de coordination, de travail des pieds, il courait assis, pas de bras… Mais il y avait quelque chose, et tout le monde l’a vu. »
“Il est doué, il a un pied”
« Il est doué, il a du pied, repère d’emblée le coach. C’est-à-dire que le pied ne frappe pas, il se déroule, rebondit, transmet de la puissance. Au bout de quelques mois, en construisant les séances, j’ai vu qu’il allait très vite et je me suis dit : on va faire quelque chose. « Il n’a pas l’air d’un sprinteur, il est atypique : très grand, maigre, blond, mais quand il court, il vole. Ça ne touche pas le sol », s’émerveille le directeur sportif du club, Jean-Michel Serres.
Il est atypique, grand, maigre, blond, mais quand il court, il vole. Il ne touche pas le sol
Hugo signe un 10”77 pour son premier 100m, “ce qui est rarement vu chez un junior signant sa première licence”. Sur 200m, sa progression supersonique l’a porté à 20”64 aux Interclubs, en mai, meilleure performance européenne U23 de l’année, 3e meilleure performance française toutes catégories d’âge. « On ne s’attendait pas à ce temps si vite, si tôt, on pensait que c’était plutôt 20”80. Et en plus, il vient de le confirmer à Niort, 20”77 avec du vent négatif, et tout seul devant », souligne le coach. Et ce n’est pas tout. « C’est un petit bijou. Il progresse aussi dans la longueur (7.15) et sur 100 m (10.50) », ajoute M. Serres. Un 400m, “pour le plaisir” sourit M. Copy, tombe à 48”57, ce qui attire l’attention du staff fédéral pour le relais des Jeux de 2024.
Calmez-vous, exigea le duo, s’adaptant à la nécessité d’un travail patient dans ce tourbillon de perfs. Hugo confirme « être du genre calme, oui. Ce n’est pas dans mon caractère d’avoir des objectifs trop élevés, ni de me vanter.
Une foulée à peaufiner
Bien sûr, il a vu “des gens impressionnés et surpris par mes chronos, surtout surpris je pense que j’allais si vite avec mon physique”. Bien sûr, cette progression l’a surpris lui-même : « C’est allé très vite. J’ai toujours bien fait en EPS mais je ne pensais pas que ça marcherait à ce point ».
« Nous nous sommes immédiatement mis d’accord sur ce qu’il fallait construire. Sur 100 m d’abord, pour l’explosivité, la vitesse, les départs. Comme il est grand et pas très musclé, on peut quand même gagner sur ce plan », explique M. Copy. En parallèle, le duo a peaufiné la foulée du phénomène. « Le paradoxe, c’est qu’il a fallu allonger la foulée. Il a de grandes jambes mais ne les a pas utilisées au maximum, il s’est appuyé sur sa grosse fréquence. « Le travail des pieds aussi, la coordination.
Se muscler? Hugo a pris « trois, quatre kilos depuis mes débuts, mais on ne s’embête pas avec ça », raconte le jeune homme. « Le plus important, c’est le travail de placement technique. Le musclé vient avec le travail dynamique, dans la course, là où il faut, insiste M. Copy. Surtout, pas de musculation ni de poids spécifiques : trop de risques de blocage de l’harmonie de la foulée, de blessures aussi, pour un athlète débutant. Hugo est d’accord. “Je pense que j’ai commencé au bon moment aussi. Plus tôt, je m’ennuyais peut-être et nous avons plus de temps libre pendant les études supérieures. »
« Il n’y a pas de limite, ça va si vite. Nous espérons descendre en dessous de 20″ en une année sur 200″
Jusqu’où peut-il aller ? L’Américain Erriyon Knighton a établi le record du monde junior du 200 m en 19,49 il y a un an, mais la comparaison ne vaut pas la peine, Cerra ne fait que commencer. « Il n’y a pas de limite », dit M. Copy. Ça va si vite qu’on ne sait pas où ça va mener. Sur 100 m on passera sous les 10”50, mais après le physique va le ralentir. Sur la longueur on peut aller loin, il a la capacité, mais il ne peut pas tout faire, on y travaille l’hiver. On verra où le 200m le mènera. Il est passé sous les 21” en Espoir la première année, on a décidé ensemble de viser un temps sous les 20” en Espoir 3. Après, si ça bloquait, on passerait à 400, ce qui sera peut-être sa meilleure distance. »
Potentiel 2028
La fédération le suit de près. « J’étais remplaçant du relais 4×100 lors d’une rencontre en marge de la Ligue de diamant à Paris, début juin. Je pense qu’ils voulaient me voir dans une compétition. L’hiver dernier, j’ai participé à un parcours espoir sprint et relais 4×100 dans un groupe Potentiel 2028.
Les JO, il n’y pense pas. Pas encore. « Je m’adapte au jour le jour. Je visais le podium du championnat de France Espoirs (1euh-2 juillet, ndlr), j’espère désormais celle des Espoirs européens (13-16 juillet en Finlande). Et pourquoi pas celui des Elites (seniors), à Albi, fin juillet. »
Déceptions à Nancy
Pas de minima pour les mondiaux de Budapest en août hier à Nancy pour Jimmy Vicaut (100m) ou Pascal Martinot-Lagarde (110m). Vicaut, après son 10”06 de Charléty le 9 juin, n’a pris que la 5ème place du meeting en 10”35 avec un vent défavorable de 1,2 m/s, alors que le minimum est à 10”. Pascal Martinot-Lagarde a également terminé 5e sur les haies, en seulement 13”61 (minimum à 13”28). A noter les 3’31”60 sur 1500 m du Kenyan Reynold Kipkorir Cheruiyot,
Tom Campagne (Stade Bordelais) a remporté le long avec 7,80 m. Belle performance de Laëticia Bapté en 12”93 (-1,2 m/s) sur le 100 m haies. A Athènes, Thibaut Collet a remporté le concours de saut à la perche en égalant son récent record personnel (5,81 m), le minimum pour le championnat du monde d’août à Budapest.