MONTRÉAL — L’augmentation du coût de nombreux biens de consommation a alimenté l’intérêt des Québécois pour l’économie circulaire, et particulièrement pour l’achat d’articles d’occasion. Cependant, les entreprises spécialisées dans la vente d’objets d’occasion sont également touchées par l’inflation, mais leur marge de manœuvre pour en contrer les effets est limitée.
Chez Orapé, organisme de Plessisville qui exploite une friperie qui sert, entre autres, à financer un service d’aide alimentaire, les prix ont été augmentés en moyenne de 10 à 15 %.
« C’est la marge maximale que nous nous sommes donnée, explique la directrice Valérie Bédard. Nous avons eu des réflexions très stratégiques pour maintenir une marge bénéficiaire suffisante tout en restant abordable pour nos clients et en respectant notre mission de base qui est d’offrir des articles aux personnes à faible revenu.
Si l’organisme est propriétaire de son immeuble, il doit tout de même faire face à une augmentation des coûts d’électricité ou pour des petits travaux d’entretien, des augmentations salariales à accorder au personnel, mais surtout à l’augmentation du coût de l’essence. , un poste budgétaire 30 à 50% plus gourmand qu’avant.
“On va chercher les objets chez les gens, et notre camion ne tourne pas à l’antenne”, se souvient avec humour le réalisateur.
Le prix des produits d’occasion vendus chez Orapé allant de quelques centimes pour les bibelots à environ 150 dollars pour l’électroménager, la marge de manœuvre de l’organisation reste mince.
« Il faut garder à l’esprit que les gens viennent acheter de l’occasion dans le but de trouver du beau, du bon, pas cher et qu’ils ne s’attendent pas à payer mer et merveilles, ajoute Mme Bédard. Il y a des gens qui comprennent que nous n’avons pas d’autre choix que d’augmenter nos prix, mais d’autres qui considèrent que nous devrions pratiquement donner nos articles parce qu’ils nous sont donnés.
Quant à Renaissance, qui compte 34 adresses au Québec, c’est surtout l’augmentation rapide et soutenue des salaires qui a érodé la marge budgétaire de l’organisme.
« Bien sûr, nous avons dû augmenter nos prix, mais nous ne pouvions pas nous contenter du pourcentage d’inflation, explique le directeur général Éric St-Arnaud. Nous avons fait une étude de marché au préalable pour nous assurer que nous étions dans la moyenne.
“Nous ne voulons pas répercuter toutes les augmentations que nous avons connues, mais lorsque les loyers, les taxes, les salaires et l’essence augmentent et que nous offrons des salaires supérieurs au minimum, nous devons nous adapter pour maintenir nos employés au-dessus du seuil de pauvreté”, poursuit le gérant.
En plus de revoir l’ensemble du système de transport, ce qui a permis de réduire de 10 % le kilométrage parcouru et, accessoirement, le nombre de litres d’essence consommés, Renaissance prévoit automatiser certaines de ses opérations afin de réduire ses coûts d’exploitation. opération.
« On a commencé à parler d’informatisation, de robotisation dans certains secteurs, comme les caisses rapides, énumère M. St-Arnaud. Nous regardons dans cette direction parce que le coût de la main-d’œuvre augmente et nous voulons être plus efficaces, mais nous allons toujours mettre les gens au travail, car nous sommes toujours une organisation à but non lucratif qui a pour mission d’aider les gens à entrer dans le marché du travail.”
Cibler les biens non essentiels
L’organisme Gens au travail, qui gère les commerces Meubletout et Boutique aux fringues de McMasterville, en Montérégie, a adopté une stratégie différente pour ne pas pénaliser les plus démunis, bien que la clientèle soit très hétérogène.
---Ce faisant, l’essentiel de la seconde main ne coûtera pas plus cher aux clients, mais s’ils veulent acheter des biens de seconde main plus beaux ou plus luxueux, ils devront payer plus cher, explique la directrice Marie Motte.
« Quelqu’un qui a besoin d’une commode ou d’une vaisselle basique pourra s’en procurer pour pas cher, mais pour des objets d’exception, comme un meuble vintage ou un bel ensemble de vaisselle avec de la dorure, on augmentera le prix », ajoute-t-elle. .
Les frais de livraison ont également été augmentés depuis 2022 pour compenser la hausse du prix de l’essence. « C’était trop pour nous à assumer, souligne le réalisateur. Mais heureusement, cela n’impacte pas les clients qui viennent chercher les articles directement en magasin.
Pour réussir, cependant, l’organisation a besoin d’un inventaire plus important. « Nous avons encore beaucoup de sensibilisation à faire pour que les gens pensent à nous plutôt que de mettre leurs meubles sur la route ou de les apporter à l’écocentre », note Mme Motte.
Clientèle en hausse, prix stables
D’autres organisations ont plutôt choisi d’augmenter peu ou pas du tout le prix de leurs articles.
« Nous sommes chanceux, car nous ne sommes pas très touchés, souligne Danielle Pettigrew, présidente du Centre des générations, qui gère le Grenier des générations à Boucherville. Ce n’est pas l’inflation qui a fait augmenter le prix de nos articles.
Pour compenser la flambée du prix de l’essence, l’organisme a toutefois commencé à imposer des frais de livraison il y a deux ans.
L’augmentation de l’achalandage, et accessoirement des ventes, a empêché SOS Dépannage, à Granby, d’augmenter trop ses prix. « À part 50 cents ici et là, rien de majeur », a déclaré le réalisateur Patrick St-Denis. Les ventes se portent bien, nous avons vu une augmentation d’environ 20% au cours des derniers mois, donc cela ne justifie pas d’augmenter considérablement nos prix.
Le même scénario s’est dessiné à la Ressourcerie du Granit, à Lac-Mégantic, où la diversification et l’augmentation de la clientèle ont permis de ne pas affecter les prix. « Depuis 2004, nous avons dû augmenter nos prix d’environ 16 à 18 %, soit moins de 1 % par an, résume le directeur Robert Bureau. On garde en tête que les gens qui viennent, qu’ils vivent dans la pauvreté ou non, viennent ici pour acheter des choses à ce prix et que ça doit rester accessible.
Grâce à son achalandage, la Ressourcerie du Granit parvient tout de même à générer des profits dont une partie est redistribuée dans la communauté, malgré une augmentation des coûts d’enfouissement, d’essence et des salaires.
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Cette dépêche a été produite avec l’aide financière de Meta Exchange et de La Presse canadienne pour l’information.