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Devalliet Mugello 375F : le conte de fée de l’Isère

Où et quand ?

On parvient enfin à croiser nos calendriers en octobre, avant que le froid ne s’abatte sur la région. Mais nous n’avons pas échappé à la pluie, avant de profiter des cols du Vercors sur le sec, chaussées de Michelin XWX au design rappelant les TRX mais avec une gomme moderne. La tenue motard n’est pas obligatoire comme à bord d’une Caterham sans pare-brise, mais le port de lunettes est indispensable et le port d’un casque est recommandé. Quant aux chaussures, il vaut mieux qu’elles soient fines.

Le terrain

Il était une fois un passionné d’automobile qui excellait dans les championnats internationaux de radiocommande pendant 20 ans et qui aimait toujours conduire différemment. Cela l’a poussé à importer des Caterham, Wiesmann ou Westfield de manière isolée… L’administration française ne lui fait donc pas peur ! Hervé Valliet n’en a cependant pas fait son métier puisqu’il dirige depuis 40 ans l’entreprise familiale de tôlerie fine SORI basée à Tullins (38) et spécialisée dans le stockage d’outils (2 500 points de vente en ). Elle travaille l’acier, l’aluminium et l’inox, et s’adresse en priorité aux professionnels. Pourtant, les particuliers dépensent leur porte-monnaie pour équiper leur garage… Comme on les comprend ! Entre l’expérience acquise en important des voitures de sport et les ressources offertes par SORI, le chef d’entreprise est passé à l’action en 2016, dans un premier temps avec une lourde voiture de sport propulsée par un gros moteur. Mais face aux contraintes d’homologation et de pollution, il décide de se positionner sur le marché de niche des roadsters légers. Il a créé la marque en 2019 en « ennoblissant » son nom et a souhaité offrir un maximum de sensations sans devenir un délinquant, tout en gardant une réelle facilité de conduite. Le nom rend hommage au circuit du Mugello et le numéro attaché indique la puissance par tonne, comme les Caterham.

Premier respect

La 375F Mugello joue à fond la carte du rétro en s’inspirant de la concurrence des années 50/60 : nez de requin Ferrari, passages de roues évidés de la Maserati 250F, ouïes inversées de la 250 GTO, jantes à rayons. Le double bossage rend hommage aux grands carrossiers italiens et cache un véritable coffre verrouillable de 300 litres ! Les phares batraciens évoquent évidemment l’inspiration anglaise Seven. La carrosserie composite est fabriquée non loin de l’usine d’assemblage, chez MG Composites dans le Vercors. Si la hauteur est équivalente à celle anglaise, la longueur explose avec + 70 cm, tout comme la largeur avec + 25 cm. Le résultat ne manquera pas de faire tourner les têtes, de dessiner des pouces et des téléphones, toujours avec le sourire.

L’augmentation de la taille profite logiquement à l’habitabilité et l’installation ne nécessite pas la flexibilité d’un gymnaste. Le superbe revêtement privilégie la douceur au maintien latéral. Il participe à l’ambiance délicieusement vintage, au même titre que le volant en bois, les commandes à bascule (dont les clignotants) ou les cadrans (propres à la marque). La petite touche technicophile – invisible – vient de l’installation audio optionnelle utilisant le smartphone via Bluetooth. Aucun écran en vue. Point d’assistance à la conduite : freinage, direction, correction de trajectoire. Une fois installé et harnaché (simple ceinture, ouf !), le conducteur profite d’une vue imprenable sur le long capot encadré par les phares ronds. Le mini pare-brise ou, si vous préférez, le grand pare-brise protège les occupants jusqu’à 100 km/h. En cas d’intempéries ou de coup de froid, on retrouve des portes, une hotte et même un chauffage (en option). Mais nous n’en aurons même pas l’utilité, malgré une averse au début de l’essai.

Chiffres (et quelques lettres)

Avant de détailler tous les secrets de ce miracle français, il est utile de préciser que tout a été imaginé en interne. Commençons le tour d’horizon par le châssis qui pourrait accueillir jusqu’à 400 ch selon son concepteur. Il s’agit d’une baignoire en aluminium réalisée à partir de tôles d’aluminium découpées au laser, pliées, assemblées par emboîtement de type tenon-mortaise (technique issue du bois) puis soudées (TIG). Les berceaux avant/arrière en aluminium sont boulonnés à la cellule centrale pour une réparation facile. L’alignement entre ces trois éléments est vérifié par laser. La suspension se compose d’un double triangulation (en acier) et de réglages combinés (au choix). Grâce à l’ingéniosité d’Hervé Valliet et à l’héritage du modélisme, la triangulation est facilement réglable via des anneaux en polyuréthane remplaçant les traditionnels Silent Blocs.

Autre élément crucial, le choix du moteur a nécessité de la patience et de belles rencontres. Si le prototype réalisé en 9 mois abritait une Fiat 1 litre turbo (120 ch) grâce à un partenariat avec Milano Racing, le modèle de série est basé sur un bloc Peugeot suite à une rencontre fondamentale sur le stand du salon Epoqu’Auto à la fin 2019. Séduite par le projet, une équipe de Michelin va bousculer l’histoire de la marque, en mettant à disposition des pneumatiques et de précieux contacts chez son allié Peugeot, prête à fournir le dossier complet nécessaire à l’homologation… Ce qui représente un budget de 1 000 000 €. L’Isérois a ainsi accès à deux motorisations : trois cylindres turbo 1,2 litre ou quatre cylindres turbo 1,6 litre. Le prix étant similaire et les premiers intéressés exigeant de la puissance, il opte pour le quatre pattes de 225 ch équipant la 508 ou la DS7. Du fait de la dépollution, le positionnement est valorisé, d’où la présence d’une large écope sur le capot. L’échappement en inox (Club en option) intègre un catalyseur, un filtre à particules et est divisé en trois (choix purement esthétique) avant de revenir sur le silencieux oblong. Rassurez-vous, ce bloc chatouille les tympans… Monté longitudinalement, le 1,6 litre turbo est couplé à une boîte de vitesses à 6 rapports en option et à un système d’autoblocage, tous deux d’origine Mazda (réseau de distribution solide). Avec seulement 680 kg annoncés à sec, la plume se contenterait de 4”6 pour passer de 0 à 100 km/h et parviendrait à atteindre 230 km/h.

Le truc en plus

Fabriqué en France, sans hésitation ! Hervé Valliet a réussi à réaliser son rêve en s’appuyant sur des sous-traitants locaux et un motoriste français. Si le Mugello ne révolutionne pas le concept du roadster léger, il offre une vision unique et délicieusement rétro.

Le plaignant, que dit-il ?

Il râle car l’investissement d’environ 100 000 € reste lourd et il faut attendre un an en moyenne pour récupérer son jouet ultra-exclusif.

Sur la route

D’emblée, le Mugello se distingue d’une Caterham par sa douceur de fonctionnement. La mécanique s’avère d’une grande douceur et les 300 Nm arrivent très tôt, ce qui nécessite de doser l’accélérateur dès les premiers rapports. C’est sûr, les semi-slicks changeraient la donne mais il faudrait renoncer à cette emprise progressiste et démodée. Le 1,6 litre à injection directe claque généreusement au ralenti puis les tympans se laissent flatter par les grognements à l’admission avant de se délecter du timbre métallique de l’échappement en inox à mi-régime. Même si les vols s’arrêtent tôt (6500 tr/min), le terrain de jeu est largement suffisant pour s’amuser avant de toucher le petit levier. Un régal ! Manipuler cette boîte de vitesses 6 en option nécessite simplement de s’habituer à l’embrayage brutal. Au fil des kilomètres, la 375F surprend par son filtrage de suspension conciliant. En revanche, les mouvements de carrosserie sont moins canalisés qu’à bord d’une Caterham. Attention, il faut relativiser, on parle d’une plume à la réactivité et à l’équilibre étonnants. Cette progressivité se combine parfaitement avec l’adhérence des Michelin et se matérialise aux limites d’adhérence par un peu de sous-virage (souhaité sur ce modèle dédié aux tests clients) puis un survirage facile à maîtriser, étant épaulé par le système d’autoblocage (en option) . Pas de panique face au manque d’aide ! Les freins demandent juste de l’anticipation sous la pluie et de l’adhérence mais moins qu’à bord d’une Caterham. La direction n’est lourde qu’à basse vitesse. Quoi qu’il en soit, cette Française devient vite une drogue, jamais dure, taillée pour les grands voyages musclés.

Sur la piste

Nous n’avons pas eu l’occasion de faire venir le Mugello à Magny-Cours. Même si ce n’est pas sa vocation première, il pourrait y briller avec un aménagement pneumatique et des réglages plus radicaux. Hervé Valliet a la solution et elle s’appelle Grand Prix, célébrant le 5ème anniversaire du premier modèle Devalliet. Il en résulte un look monoplace (biplace possible sur demande) avec un nez, des grilles d’aération spécifiques et des jantes en acier de 17 pouces recouvertes de Michelin Pilot Sport 5. A bord, le volant en bois disparaît au profit d’une jante plus épaisse recouverte de Michelin Pilot Sport 5. en cuir. L’ensemble moteur/boîte/différentiel reste inchangé et le travail s’est concentré sur les trains roulants, plus typés : triangles de suspension plus longs, axes de pivotement repositionnés, garniture abaissée, amortisseurs/ressorts spécifiques, barres antiroulis plus grandes, disques de frein augmentés. La masse chute ainsi de 50 kg (630 kg à sec) et l’accélération gagnerait un dixième de 0 à 100 km/h (4 »5). Les livraisons des 5 exemplaires prévus débuteront en 2026 et le prix débute à 118 940 €. Le sport automobile ne manquera pas de chronométrer cette version plus dédiée au tracé de Magny-Cours.

Tarifs

Le Devalliet Mugello 375F débute à 88 400 €, ce qui peut paraître déraisonnable compte tenu de l’usage restreint d’une telle plume. Mais l’investissement en vaut la peine compte tenu des sensations fortes et de l’exclusivité. Seul un deux-roues musclé peut vous offrir plus. De plus, le malus français pour 2025 s’élève à 360 € ! Hervé Valliet s’est appuyé sur le succès de sa société SORI pour réaliser son rêve et ne court pas après le profit pour ce projet qu’il vendrait à prix coûtant. Actuellement, quinze exemplaires ont déjà pris la route et quinze autres sont en préparation. Une perle française rare mais agréable aussi à moins de 100 000 €, il faut avouer que ça fait réfléchir…

 
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