Araignées, chauves-souris, insectes aquatiques, grands arbres… Ils inventorient les espèces qui habitent leur commune à Trigance

Ils ne verront plus jamais Trigance comme avant ! Depuis plusieurs jours, les habitants traversent le village en faisant plus attention à leurs étranges voisins : les petits animaux. Araignées, chauves-souris, insectes aquatiques, abeilles et autres pollinisateurs sauvages ont été soumis à la loupe de dizaines d’experts, bénévoles et curieux pendant près d’un an, afin de dresser un portrait de la commune.

La commune avait demandé au Parc Naturel Régional du Verdon (PNRV) de réaliser un Atlas de la biodiversité communale. Les résultats tant attendus ont été dévoilés à la population à la mi-décembre. Voici ce qu’il faut retenir en particulier.

Le Riu, source de vie abondante

Dominique Chavy est responsable du pôle patrimoine naturel du PNRV. Il coordonne les travaux menés dans le village depuis mars. Les observations ont permis d’identifier des zones riches en biodiversité : les cours d’eau. « Jusqu’à présent, nous ne disposions d’aucune donnée sur les insectes aquatiques. Nous avons pu réaliser des enquêtes. L’espèce est plutôt alpine dans les ruisseaux se jetant dans le Jabron. Le problème est que la plupart des cours d’eau sont à sec en été. De ce fait, certains insectes ont du mal à survivre. Heureusement, nous avons le Riu qui coule toute l’année. Si nous ne l’avions pas, la ville perdrait beaucoup de son caractère unique !

Plusieurs animaux protégés ont été aperçus aux alentours, dont le campagnol amphibie et la musaraigne aquatique. Une larve peu connue dans le Var (oxycère terminé) a également été découverte dans son lit. La mouche a la particularité de n’avoir été mentionnée qu’à trois endroits en depuis deux cents ans, avant sa découverte à Trigance !

Jabron, épicentre d’un climat exacerbé

La quasi-totalité des communes adhérentes au PNRV bénéficient d’un climat méditerranéen et alpin. « Néanmoins, ce trait est exacerbé à Trigance, au point que les plantes méditerranéennes se retrouvent à quelques centaines de mètres des espèces montagnardes. »

L’épicentre du phénomène se situe au niveau du Jabron. “Sa rive droite est plus froide que sa rive gauche.” Des chercheurs en herbe ont mis la main sur le lys martagon (alpin)… et le lys pomponne (sud). Le contraste s’étend à la nature des sols (acides, sableux, siliceux) et à la diversité des paysages, entre forêts et landes.

Belle densité de grands arbres

Parlons des forêts. Ils ont étonné Dominique Chavy. « Il y a une belle densité de grands arbres à différents endroits. Ils ont peut-être été épargnés par l’exploitation forestière. Sinon, seules les branches inférieures étaient supprimées dans le passé ? Cela vaut la peine d’être creusé ! »

A l’inverse, le pin sylvestre (dominant dans la zone) souffre davantage dans les massifs du Siounet, du Chastillon et du Breis. “Il meurt dans les environnements de basse altitude en raison de sécheresses et de chaleurs répétées.” Le chêne vert pourrait à l’avenir gagner en superficie à sa place. « Pourtant, le pin sylvestre est également en train de coloniser à nouveau certaines zones. Nous avons vu beaucoup de terrasses dans les jeunes forêts !

Observations nocturnes dans le village

Impossible de faire l’impasse sur le cœur du village ! Situé entre prairies et forêts, il est donc perméable à la faune et à la flore. « Un serpent inoffensif, le gérondif coronella, a été aperçu à plusieurs reprises près des maisons. Le gecko est également présent. Soit à cause du réchauffement climatique, soit parce qu’il a pu être importé lors de la construction. Il peut pondre dans des blocs de béton.

D’autres voisins sont invisibles le jour, mais visibles la nuit : les chauves-souris. L’espèce emblématique du Verdon, le Petit rhinolophe, niche parfois dans les maisons. Problème : elle fuit la lumière. « La municipalité éteint ses lampadaires à 23 heures. L’idéal serait de le faire plus tôt. Le pic d’activité de ces animaux se situe entre 21h30 et minuit.

Le fera-t-il pour protéger davantage son patrimoine naturel exceptionnel ?

Savoir+

Un cahier sur la biodiversité de Trigance a été édité par le Parc Naturel Régional du Verdon. Il est disponible en mairie.

Sur onze sorties prévues depuis mars, neuf seulement ont pu avoir lieu à Trigance.

Près de 1 900 plantes, animaux et insectes inventoriés

Depuis mars, neuf sorties dédiées au public ont été organisées dans la commune (salades sauvages, araignées, orchidées, insectes nocturnes, abeilles et syrphes, insectes aquatiques, chauves-souris, champignons…). Une vingtaine de personnes ont participé en moyenne à chaque atelier, également animé par Nicolas Martinez, ornithologue au PNRV. Au total, 11 049 observations ont été réalisées (dont une grande partie a été réalisée par un réseau de bénévoles expérimentés). Et pas moins de 1 877 espèces recensées (1) (faune et flore confondues).

« Parmi eux, 1 141 sont nouveaux »se réjouit Dominique Chavy, responsable du centre du patrimoine naturel du PNRV et présidente du conseil scientifique du parc. Il est impossible de retranscrire ici l’intégralité de la liste. On le retrouve néanmoins dans le carnet de biodiversité, disponible à la mairie. L’Atlas de la Biodiversité existe depuis 2012. Trigance est la neuvième commune à en bénéficier au sein du Parc Naturel Régional du Verdon (2). En 2025, ce sera le tour de Castellane.

« À l’époque, on parlait d’un inventaire citoyen de la biodiversité »explique Dominique Chavy. La démarche est soutenue par l’Office français de la biodiversité. L’objectif est notamment d’améliorer les connaissances auprès des habitants.

« On a souvent l’impression de connaître une commune. Mais on en découvre toujours de nouveaux ! L’idée est aussi de faire connaître les espèces communes. Ils ont des choses à dire sur l’environnement. Les données collectées sont transmises au Système d’information sur l’inventaire du patrimoine naturel (SINP). Celui-ci est également consulté par les services de l’Etat. « Les porteurs de projets doivent également en tenir compte lors de leur demande de permis de construire. »

1. Dont 180 espèces d’abeilles sauvages, 167 diptères, 53 syrphes, 134 araignées et 102 invertébrés aquatiques.
2. L’Atlas communal de la biodiversité (ABC) concerne l’ensemble des communes et intercommunalités de France. Il est soutenu par l’Office français de la biodiversité (OFB). À ce jour, plus de 3 500 villes ont créé un ABC.

 
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