l’essentiel
Avant sa présentation officielle, mardi 10 décembre, au conseil régional d’Occitanie devant 200 personnes – inspecteurs, chefs d’établissement, chefs d’entreprise – le recteur de l’académie de Toulouse Mostafa Fourar donne, en avant-première, les grandes lignes de son plan stratégique académique. pour l’intégration de l’Intelligence Artificielle qui doit être effective à la rentrée 2025. Entretien.
Quel est ce plan stratégique académique pour l’intégration de l’Intelligence Artificielle que vous défendrez mardi 10 décembre ?
Il comprend trois parties : d’abord, l’inventaire de tout ce qui se fait, à l’initiative de nos professeurs, de nos inspecteurs sur le terrain. Individuellement ou collectivement mais pas nécessairement structuré. Nous avons déjà des enseignants qui utilisent l’intelligence artificielle, que ce soit pour élaborer une matière d’examen, illustrer des cours, interagir avec l’IA, aussi bien dans l’enseignement primaire que secondaire. Toutes les disciplines sont concernées, non seulement scientifiques mais aussi littéraires. Une enquête a été lancée la semaine dernière dans l’ensemble de l’académie, avec 200 signalements concernant l’usage de l’Intelligence Artificielle. L’idée est de partager des ressources avec d’autres enseignants.
La deuxième partie ?
C’est l’utilisation de l’IA dans la formation professionnelle. Il ne s’agit pas d’utiliser ChatGPT ou des intelligences génératives, mais plutôt d’enseigner aux étudiants les processus industriels du secteur tertiaire qui utilisent l’IA. J’ai également visité l’entreprise Bosch à Rodez à ce sujet. Nous avons identifié un certain nombre d’entreprises qui sont prêtes à mettre en place des cours, dès la rentrée 2025, dans des lycées professionnels volontaires dotés de campus de métiers et de qualifications. Le lycée Joseph Gallieni de Toulouse, sur le thème de la mobilité, fait partie des quatre établissements sélectionnés.
Envisagez-vous également un troisième axe à votre plan stratégique ?
C’est la modernisation de l’administration. J’aimerais que le rectorat intègre l’intelligence artificielle dans les processus administratifs. Par exemple, le remplacement des enseignants est un sujet brûlant. Entre le processus où l’on commence à recruter, à collecter les CV et l’affectation d’un contractuel, sans compter les demandes venant des chefs d’établissement, des inspecteurs et des candidats, c’est compliqué. Nous avons besoin d’une application unique capable de regrouper toutes ces données, de les traiter et d’apporter des réponses en - réel. Le rectorat est très sollicité à travers sa messagerie, par les usagers, les enseignants, le personnel, les parents d’élèves, je souhaiterais mettre en place une IA qui pourra lire, écouter un message audio, qui apporterait une réponse ou donnerait une orientation . Sans que l’utilisateur ait la sensation de parler à une IA. Il ne s’agit pas de déshumaniser nos services.
En déléguant des tâches, qu’elles soient éducatives ou administratives, l’IA n’entraînera-t-elle pas de nouvelles suppressions d’emplois ?
Nous effectuons des tâches répétitives et fastidieuses, mais en aucun cas l’IA ne peut remplacer l’humain. Avec la réalité augmentée, nous aurons la possibilité d’une qualité de service et de sa rapidité. Mais il n’est pas question de réduire le nombre d’agents administratifs ou d’enseignants. En revanche, cela transforme complètement la relation avec les utilisateurs. Avec la pédagogie aussi. L’IA reste un outil.
Avec une IA dont les capacités sont exponentielles, faut-il craindre de construire un enseignement totalement dématérialisé ?
J’ai une approche pragmatique de l’utilisation de l’IA. Je n’ai pas une approche philosophique mais éthique. D’abord parce que nous sommes à la veille d’une nouvelle civilisation et que l’IA sera la ligne de démarcation entre ceux qui maîtriseront l’outil et les autres, à l’échelle de chaque pays. Notre devoir est de préparer nos étudiants et nos professeurs à être en phase avec la technologie. L’IA peut, par exemple, contribuer à résoudre le problème de l’homogénéité en classe. Deux applications existent dans 300 classes primaires de l’académie de Toulouse : l’une s’appelle Mathia, l’autre Lalilo. Il s’agit d’un enseignement adaptatif : l’élève est devant sa tablette et répond à une question, l’IA peut alors identifier son niveau, les difficultés rencontrées et proposer des exercices adaptés en fonction de sa progression. Cela permet aux enseignants de faire face à l’hétérogénéité de leur classe pour libérer plus de - pour les élèves qui rencontrent plus de difficultés.