En Allemagne, on peut presque marcher sur la lune

En Allemagne, on peut presque marcher sur la lune
En Allemagne, on peut presque marcher sur la lune

(Cologne) On peut presque marcher sur la Lune près de Cologne dans LUNA, l’installation « unique au monde » qui permettra l’entraînement des astronautes européens et le test des équipements qui partiront un jour sur le satellite de la Terre.

Pierre CELERIER

Agence -Presse

De l’extérieur, on dirait un hangar blanc et aveugle, échoué dans un coin du Centre aérospatial allemand (DLR). Mais à l’intérieur de cette structure de neuf mètres de haut, aux murs et au plafond aussi noirs que l’espace, se trouve une réplique de la surface lunaire.

Sous la seule lumière d’un projecteur placé très bas à l’une des extrémités des 700 mètres carrés – l’équivalent de plus de trois courts de tennis – le relief des bosses et des cratères alterne des zones de noir profond avec celles de lumière crue. Sur un terrain recouvert d’une étrange poussière gris pâle, parsemé de rochers.

« J’y suis allé hier avec notre nouvelle combinaison spatiale, et quand on entre dans l’ombre, on ne voit plus où l’on est. Est-ce juste un creux ou un abîme ? » remarque Matthias Maurer, astronaute de l’Agence spatiale européenne (ESA), dont le centre d’entraînement (EAC) est situé en face de LUNA.

Ingénieur en science des matériaux, il est l’initiateur du projet commun DLR-ESA, lancé il y a plus de dix ans. Et il sera le premier acteur mercredi prochain lors de l’inauguration de « cette installation unique, qui intègre tant d’éléments différents, sans équivalent dans le monde, même à la NASA ».

Pour éviter d’avoir à en acheter 900 tonnes aux États-Unis, l’ESA a développé EAC-1A, un équivalent du régolithe lunaire, l’épaisse couche de poussière qui recouvre l’étoile sur plusieurs mètres.

Au toucher, il est aussi rugueux qu’une pierre ponce. La finesse de ses grains, alliée à son caractère très abrasif, le rend dangereux pour les voies respiratoires ainsi que pour le matériel.

Vivre et travailler sur la Lune

Lorsqu’on marche dessus, « il s’élève et flotte » dans l’air, explique Matthias Maurer. Sur la Lune, le régolithe est encore plus problématique, car il est chargé d’électricité statique, ce qui le fait adhérer à n’importe quelle surface. A tel point que les astronautes d’Apollo s’inquiétaient de l’étanchéité de leurs combinaisons spatiales après seulement trois sorties.

Sur la Lune, il est le résultat d’innombrables impacts d’astéroïdes sur la croûte lunaire. LUNA est un « matériau basaltique volcanique broyé, tamisé et mélangé », explique Jürgen Schlutz, chef de projet à l’ESA. Un savant mélange issu d’un ancien site volcanique allemand.

Les ingénieurs attendent toujours une livraison spéciale de 20 tonnes de régolithe groenlandais, qui sera utilisée dans le « laboratoire de poussière » (laboratoire de poussière), un espace hermétiquement fermé à l’intérieur de LUNA, pour tester les équipements.

Le lieu abritera bientôt un soleil artificiel mobile, permettant un effet de lumière rasante qui modifie l’aspect du terrain d’heure en heure.

Un système de harnais innovant, actionné depuis le sommet de la structure, imitera la très faible gravité lunaire, de sorte qu’un astronaute pesant 60 kilos n’aurait pas à fournir plus d’efforts que s’il en pesait 10.

Une autre innovation est la possibilité de geler le sol de LUNA jusqu’à une profondeur de trois mètres. « Car sur la Lune, nous voudrons forer les endroits où nous trouverons de la glace d’eau », explique Matthias Maurer.

Et un espace souterrain pour tester des techniques d’utilisation du régolithe comme élément de construction ou pour en extraire de l’oxygène.

Dans un coin, une section inclinable doit tester la capacité des astronautes et de leur équipement à gravir des pentes allant jusqu’à 50 degrés. Un exercice compliqué sur ce matériel où l’on s’enfonce d’abord jusqu’à la cheville, comme lorsqu’on escalade une dune.

« Après une dure journée de huit heures passée à marcher sur la lune, on se rend à FLEXHab », poursuit Matthias Maurer.

Ce module d’habitation, conçu pour quatre astronautes, sera directement relié à LUNA d’ici une semaine. Ils utiliseront un sas étanche pour sortir leurs combinaisons et empêcher toute intrusion de régolithe dans leur habitat.

Viendra ensuite un module de production d’usine en circuit fermé, Eden, testé pendant cinq ans dans une station antarctique du DLR.

Au final, c’est tout un écosystème qui doit permettre de « comprendre comment vivre et travailler sur la Lune », selon Jürgen Schlutz. Et accessoirement, de contribuer à garantir des places aux astronautes européens du programme américain Artemis pour retourner sur la Lune.

Pour Matthias Maurer, candidat naturel à cette aventure, entrer dans LUNA « c’est un peu comme avoir un pied sur la Lune ».

 
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