L’entrepreneur milliardaire Jared Isaacman vient de devenir le premier civil à effectuer une sortie dans l’espace. Forbesil revient sur cette expérience hors du commun.
Article de Giacomo Tognini pour Forbes US – traduit par Flora Lucas
De retour sur Terre une semaine après sa sortie historique dans l’espace, Jared Isaacman est encore en train de rattraper son sommeil. « Je pense que je viens d’établir un nouveau record de manque de sommeil au cours de cette mission de cinq jours. »dit-il en riant lors d’un appel téléphonique depuis son domicile en Pennsylvanie.
La mission Polaris Dawn
Mi-septembre, le milliardaire a participé à une mission orbitale historique baptisée Polaris Dawn, atteignant une altitude de 1 400 kilomètres, soit l’orbite terrestre la plus élevée réalisée par un humain depuis la mission Apollo 17 de la NASA en 1972. Le 12 septembre, il est également devenu le premier civil à effectuer une sortie dans l’espace, aux côtés de l’ingénieure de SpaceX Sarah Gillis, qui a dirigé la mission et conçu les toutes nouvelles combinaisons spatiales portées par Isaacman et les trois autres membres de l’équipage.
« Je ne m’attendais pas à ressentir ce que j’ai ressenti. Dans ma tête, j’avais visualisé chaque étape et, dans les simulateurs, nous avions exécuté cette chorégraphie des centaines de fois. »explique Jared Isaacman à propos de son expérience lors de la sortie dans l’espace, techniquement connue sous le nom d’activité extravéhiculaire (EVA). « Je ne m’attendais pas à ce que tous les autres sens entrent en jeu. Il fait très froid, l’adrénaline commence à monter et il y a un effort physique car la combinaison spatiale, lorsqu’elle est pressurisée, est très rigide. Tout cela s’ajoute au stimulus visuel de la Terre, et c’est très impressionnant. »
La sortie dans l’espace était censée durer environ deux heures, mais l’ensemble du processus n’a duré qu’environ 90 minutes. Jared Isaacman et ses coéquipiers ont passé deux ans et demi à s’entraîner pour la mission. Seuls Jared Isaacman et Sarah Gillis sont sortis du vaisseau spatial Dragon 2 de SpaceX, mais les quatre membres de l’équipage, dont l’ingénieure de SpaceX Anna Menon et Scott « Kidd » Poteet, un pilote de l’US Air Force à la retraite et ami de longue date d’Isaacman, ont enfilé leurs combinaisons spatiales alors que le vaisseau spatial se dépressurisait.
« Lorsque j’ai détourné le regard de la Terre, j’ai ressenti une sensation différente de celle à laquelle je m’attendais. Ce n’était pas une sensation de chaleur ou de sérénité. »explique Jared Isaacman. « Nous ne sommes pas faits pour survivre dans des conditions extrêmement difficiles. Mais il y a beaucoup à découvrir et cela signifie que nous allons devoir travailler très dur et être bien préparés pour pouvoir tout explorer. »
Polaris Dawn est le deuxième voyage de Jared Isaacman dans l’espace. Le premier, en septembre 2021, faisait partie de son initiative Inspiration4, la première mission spatiale entièrement civile. Lors de ce voyage, il était accompagné de Hayley Arceneaux, assistante médicale au St. Jude Children’s Research Hospital, et de deux astronautes civils sélectionnés par le biais d’un tirage au sort organisé par St. Jude et d’un concours conçu par Shift4, la société de paiement d’Isaacman. La mission a permis de récolter plus de 250 millions de dollars pour l’hôpital, dont 125 millions provenant d’Isaacman et 55 millions d’Elon Musk.
L’un des moments les plus émouvants vécus par Jared Isaacman pendant la mission Polaris Dawn a été lorsque sa collègue Sarah Gillis, une violoniste de formation classique, a joué du violon à bord du vaisseau spatial. Le moment a été diffusé en temps réel via Starlink, et sa version du « Thème de Rey ” de La Guerre des étoiles Il était accompagné par des orchestres venus du monde entier. « C’était un moment très émouvant », dit-il.
Le plus terrifiant ? Probablement la rentrée dans l’atmosphère, selon Jared Isaacman. « C’est très différent de l’escalade. La pression artérielle est beaucoup plus élevée, car on est très vulnérable. On n’a aucun contrôle, il faut rentrer chez soi. »il explique en riant. « Vous êtes dans un environnement à haut risque de débris de météorites. Vous ne savez pas si vous avez subi un impact qui pourrait être catastrophique, donc dans une seconde, tout pourrait être terminé. Vous ressentez beaucoup plus les forces g parce que votre corps a été déconditionné, donc tout semble plus intense, comme si un éléphant était assis sur votre poitrine. »
SpaceX prévoit deux autres missions spatiales
Polaris Dawn est la première des trois missions prévues par SpaceX. Une deuxième mission à bord du vaisseau spatial Dragon 2 est attendue dans environ deux à trois ans, et une troisième un peu plus tard. Le calendrier du troisième voyage dépend également de l’avancement du nouveau vaisseau spatial et du système de fusée de SpaceX, Starship, qui devrait transporter des astronautes lors de la troisième mission Polaris. Elon Musk a félicité Jared Isaacman pour la mission Polaris Dawn sur sa plateforme de médias sociaux X, republiant une vidéo de Jared Isaacman s’exprimant lors de sa sortie dans l’espace : « De retour à la maison, nous avons beaucoup de travail à faire, mais d’ici, la Terre ressemble à un monde parfait.
La société de paiement Shift4 de Jared Isaacman est également un investisseur dans SpaceX. La société a investi 27,5 millions de dollars dans la société de fusées en décembre 2021, alors qu’elle était valorisée à environ 100 milliards de dollars. SpaceX est désormais valorisée à 208 milliards de dollars après son dernier tour de financement en juin. La valeur de la participation de moins de 1 % de Shift4 dans SpaceX a augmenté d’environ 140 % pour atteindre 66 millions de dollars à la fin du mois de juin, selon une analyse des documents déposés par la société Forbes.
Jared Isaacman et SpaceX semblent avoir partagé le coût de la mission Polaris Dawn, mais n’ont pas révélé combien ils ont dépensé. Certains rapports évaluent le coût de la mission à des centaines de millions de dollars. Dans une déclaration envoyée par courrier électronique à ForbesJared Isaacman a déclaré que ces chiffres n’étaient pas exacts, mais il n’a pas voulu donner plus de détails sur le coût total. Malgré ses dépenses dans l’espace, Jared Isaacman reste très riche, avec une valeur nette estimée à 1,5 milliard de dollars, provenant en grande partie de sa participation de 25 % dans la société cotée en bourse Shift4.
« Personnellement, je n’ai tiré aucun bénéfice économique de ces projets »explique Jared Isaacman. « J’ai eu beaucoup de chance dans la vie et j’ai accumulé des ressources qui me permettent de me concentrer sur des domaines qui me passionnent. St. Jude est évidemment l’un de ces domaines et l’ouverture de cette dernière frontière en est un autre. »
Trois objectifs scientifiques spécifiques
Contrairement au premier vol spatial de Jared Isaacman, qui visait à démontrer que les astronautes civils pouvaient voyager en orbite en toute sécurité, Polaris Dawn avait des objectifs scientifiques plus spécifiques. « Nous avions trois objectifs principaux. Nous allions très, très haut, dans un environnement très hostile, avec des radiations et des débris de micrométéorites. »explique le milliardaire. « Nous avons testé de nouvelles combinaisons spatiales, de nouvelles méthodes de communication et une quarantaine d’expériences de recherche scientifique qui contribueront au développement de futures missions de longue durée. »
Jared Isaacman et le reste de l’équipage ont passé plusieurs jours après leur retour avec des scientifiques qui ont surveillé leurs signes vitaux, notamment des échographies de tous leurs organes vitaux, ce qui aidera les astronautes à se préparer pour de futures missions. Les données fournies par les combinaisons spatiales contribueront également à la conception de la prochaine génération de combinaisons développées par SpaceX.
Maintenant qu’il est de retour sur Terre, Jared Isaacman attend avec impatience de futures missions spatiales, mais il est également préoccupé par l’environnement instable de sa planète natale, en particulier en cette année électorale américaine. « Chaque jour, il y a des débats presque violents sur toutes les questions politiques, sur la souffrance qui existe dans ce monde »il dit. « Si nous parvenons à nous éloigner de ces débats de temps à autre et à voir ce qui nous unit et ce que nous pouvons accomplir ensemble, nous pourrons construire un avenir meilleur, plus brillant et plus passionnant pour demain. Il est possible de parvenir à un équilibre. »
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