CC’est l’heure du divorce. La fin de l’histoire entre le Stade Bordeaux Atlantique (SBA), l’exploitant du stade, et Bordeaux Métropole se rapproche. Il n’y a plus aucun contact entre les deux entités. La filiale Vinci-Fayat va déposer le bilan dans les prochains jours. Et les prochains échanges devraient se faire via des avocats. Les conséquences sont graves, notamment pour Bordeaux Métropole, qui a repris les contrats signés en 2011 par la mairie de Bordeaux pendant la période Juppé, puis transférés à l’intercommunalité. Au terme d’une procédure qui s’annonce longue, elle se retrouvera à gérer directement le stade. Quel sera le coût ? Quel avenir pour ce stade ? Quel est le bilan de ce contrat PPP (partenariat public-privé) dans une impasse ? Christine Bost, présidente socialiste de Bordeaux Métropole, s’exprime pour la première fois sur ce dossier jusqu’ici traité dans la plus grande discrétion.
Reste-t-il une marge de manœuvre à la Métropole pour éviter le dépôt de bilan de l’exploitant du stade ?
C’est le tribunal de Nanterre qui jugera. Mais la Métropole n’entend pas compenser durablement un contrat qui a très probablement été mal évalué par l’opérateur lui-même. Ce contrat n’a pas été proposé par la Métropole – la Ville de Bordeaux à l’époque – mais par SBA. Dès le départ, les termes de ce contrat ont été mal évalués. Nous héritons de la situation. La Métropole ne peut pas combler seule le déficit de fonctionnement de SBA pour les années à venir : nous avions fait des propositions très concrètes fin 2023 avec Alain Anziani, puis lorsque je lui ai succédé, dans une démarche de conciliation collective pour trouver une issue et plus encore. sérénité dans cette relation contractuelle. SBA en a demandé davantage, il est clair que nous n’avons pas trouvé de terrain d’entente.
Aujourd’hui, Bordeaux Métropole est-elle prête à assumer l’intégralité du coût de ce qui reste à payer ?
Nous nous préparons à toutes les hypothèses et le dépôt de bilan était l’un des scénarios possibles. Oui, nous sommes prêts. Tous les éléments de la fin du partenariat public-privé devront être évalués, les meilleurs juristes devront se pencher sur le sujet, il y aura toute une artillerie juridique à sortir… Quant à la dette, le montant restant à régler payé est de 85 millions d’euros. Mais cette dette est déjà dans les comptes de la Métropole : c’est déjà la Métropole qui finance la rente. Chaque année, nous versons 5 millions directement aux banques, ce n’est pas SBA qui supporte cette charge. Rien ne change pour la Métropole.
Sauf que les banques peuvent vous demander de payer la totalité en une seule fois…
Je ne comprends pas vraiment cet argument, comme s’il s’agissait d’effrayer encore davantage les métropolitains. Si les banques demandent à payer tout de suite, nous paierons tout de suite. Mais pourquoi les banques demanderaient-elles un remboursement alors que nous n’avons jamais fait défaut ?
Vos électeurs ont-ils des raisons d’être rassurés ?
Ce n’est pas le sujet du stade qui empêchera la Métropole d’investir, et de rembourser cette dette d’un coup ou jusqu’en 2045. Les économies qui nous seront demandées par l’Etat dans le cadre du projet de loi de Finances sont plus préoccupantes que le stade. Le contribuable ne doit pas penser que ce sera une dette supplémentaire.
La Métropole a-t-elle vocation à gérer un tel stade à terme ?
Nous savons gérer et entretenir les bâtiments publics. Et cela ne coûtera pas forcément plus cher que ce qu’il nous a coûté jusqu’à présent. Le stade représente aujourd’hui un coût net pour la Métropole de 7 millions d’euros par an [remboursement de la dette, charges d’exploitation, etc.] ; si nous avions accédé aux demandes du SBA, nous serions autour de 11 millions. L’objectif est de maintenir ce coût en dessous. On aurait aimé que SBA cherche des recettes ailleurs : on voit dans la programmation que rien n’est prévu en termes de concerts ou d’animations en dehors des quelques matchs des Girondins ou de l’UBB. Par ailleurs, ce qui a permis à SBA d’avoir des comptes équilibrés en 2023 et probablement en 2024, ce sont les événements d’envergure nationale et internationale, soutenus par les pouvoirs publics. L’idéal, demain : qu’un éventuel repreneur du club puisse aussi être propriétaire ou exploitant du stade qu’il occupe. Ce serait la solution idéale. Mais pas à n’importe quel prix. Ma responsabilité est de préserver les intérêts de la Métropole.
Comment fixer le prix d’un tel stade ?
Il y aura plusieurs éléments qui composeront le prix. Il y aura une estimation des Successions, vendre un stade serait tout à fait inédit, il n’y a pas de référence, et bien d’autres paramètres : le montant de la dette, les conditions de rupture du contrat, etc. Tout cela sera à regarder de très près.
On parle de l’ex-footballeur Oliver Kahn pour le rachat du club, ou encore d’acheteurs locaux et d’un fonds d’investissement pour racheter le stade : confirmez-vous que des discussions sont en cours ?
Des noms circulent (sourire). C’est plutôt bon signe. Pour le club et aussi pour le stade. On a un club qui essaie de se remettre sur pied et un très beau stade, de qualité, des équipements emblématiques. C’est un bon héritage. Il existe encore de belles perspectives pour les investisseurs.
« Nous savons gérer et entretenir les bâtiments publics. Et cela ne coûtera pas forcément plus cher que ce que cela nous a coûté jusqu’à présent. »
Quinze ans après avoir voté la création de ce stade et son plan de financement, SBA est au bord du dépôt de bilan, la Métropole au pied du mur et les Girondins en Nationale 2 : quelle leçon tirer de cette situation ?
Les conditions de passation des PPP auraient mérité une plus grande vigilance, et peut-être, de la part des signataires du contrat, d’écouter un peu plus certains opposants qui ont tenu des propos qui s’avèrent bien vrais. Je pense que nous avons manqué de prudence. Je ne sous-estime pas l’intérêt et la qualité architecturale d’équipements de cette nature, il était important de doter le territoire d’un stade de cette ampleur, mais nous avons sans doute été un peu trop aveuglés par cette envie.
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