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Ludovic N., moniteur de sport, victime de harcèlement de la part d’un parent

Ludovic N. est éducateur sportif depuis quatre ans dans une équipe de football de l’Est de la qui suit des enfants de U5 à U17. Cet ancien joueur s’est tourné vers l’ASL suite à une situation conflictuelle avec un parent. Pour nous, cela revient aux faits et au soutien de l’ASL.

Depuis combien de - êtes-vous inscrit à l’ASL ? Et pourquoi avez-vous choisi de nous rejoindre ?

« Savoir que nous ne sommes pas seuls s’il y a un problème dans notre métier est quelque peu rassurant. »

Ludovic N. : Je suis arrivé il y a deux ans. Un ami professeur de natation qui vivait une situation très conflictuelle avec ses supérieurs, qui ne l’ont pas soutenu lors d’un conflit avec ses parents, était accompagné de sa délégation. Il a obtenu gain de cause devant le tribunal administratif. Il m’a conseillé de m’inscrire. Je ne le regrette pas. Savoir que nous ne sommes pas seuls s’il y a un problème dans notre métier est quelque peu rassurant.

Pouvez-vous nous parler du problème que vous avez rencontré ?

« Je l’ai rappelé pour essayer de calmer la situation, mais il ne voulait rien entendre, il est devenu violent. S’en sont suivis des appels incessants, près d’une centaine de messages et SMS de sa part tout au long du week-end. »

En début d’année scolaire, alors que j’étais responsable d’un groupe de 16 enfants U14, j’ai rencontré des difficultés avec le père de l’un d’entre eux. L’élève en question n’était plus très impliqué, déjà depuis l’année précédente, et continuait à jouer au football principalement pour faire plaisir à son père, mais visiblement il n’en voulait plus et m’avait fait part de son envie d’arrêter. Cela s’est également fortement ressenti dans ses performances. Du coup, j’ai décidé de ne pas l’affronter en match. J’avais déjà eu des problèmes avec ce parent qui n’acceptait pas la rotation qu’on peut faire d’une semaine sur l’autre, pour que tous les enfants puissent s’entraîner. Il est aussi du genre à s’énerver si son fils ne remplit pas le rôle qu’il souhaite. Il incarne parfaitement les dérives de ce qu’on appelle le projet Mbappé. Il a entièrement projeté ses frustrations personnelles et ses rêves de gloire sur son fils. Cela lui met beaucoup de pression et, personnellement, je pense qu’il a fini par exclure son fils du football.

Lorsqu’il a appris que son fils n’allait pas jouer, il m’a immédiatement appelé. Comme je ne répondais pas parce que je n’étais pas disponible, il a fini par laisser un message très menaçant sur mon répondeur. Je l’ai rappelé pour tenter de calmer la situation, mais il ne voulait rien entendre, il est devenu violent. S’en sont suivis des appels incessants, près d’une centaine de messages et SMS de sa part tout au long du week-end. J’aurais « payé », il m’aurait « trouvé » et « aurait changé d’avis très vite », « réglé mes comptes », etc. Je me sentais mal. Les parents surimpliqués sont partout. J’ai déjà eu affaire à des parents qui remettaient en question mes choix, qui étaient mécontents, mais qui restaient toujours dans les limites de l’acceptable. En général cela se résout facilement, cela se discute et le dialogue permet de résoudre les conflits. Mais là, le père « s’emporte » littéralement. Il a menacé de me tuer et, compte tenu de son profil de caractère, je le croyais capable de m’attaquer physiquement, en fait. Je n’avais qu’une crainte : qu’il retrouve mon adresse.

Comment a réagi votre hiérarchie ?

« J’ai parlé au réalisateur ce week-end en question et nous avons décidé d’agir rapidement. »

Il a bien réagi. J’ai parlé au réalisateur ce week-end en question et nous avons décidé d’agir rapidement. Il a pris la décision de suspendre l’entraînement le mercredi suivant en signe de soutien et a expliqué pourquoi dans un courriel adressé aux familles, condamnant le comportement de son père, accompagné de la carte de bonne conduite. Il m’a fortement conseillé de porter plainte.

Quand avez-vous contacté votre délégation ? Quel soutien l’ASL a-t-elle apporté ?

« J’ai immédiatement eu quelqu’un au téléphone qui a pris le - de m’écouter, de me rassurer, de me conseiller sur la marche à suivre et de me référer à un conseiller juridique. »

De mon côté, J’ai immédiatement appelé lundi ma délégation des autorités sanitaires locales pour obtenir des informations. Pour porter plainte, je ne savais pas trop comment faire. Et puis, je l’avoue, je craignais aussi des représailles, qui auraient aggravé la situation. Alors j’hésitais, j’avais besoin d’un avis. J’ai immédiatement eu quelqu’un au téléphone qui a pris le - de m’écouter, de me rassurer, de me conseiller sur la marche à suivre et de me référer à un conseiller juridique. Le lendemain, ce dernier me reçut d’urgence. Il m’a accompagné dans le dépôt de la plainte et m’a montré les démarches à entreprendre auprès de l’entreprise pour ma protection. C’était rapide. C’est vraiment agréable d’avoir quelqu’un de disponible immédiatement en cas de panique ou d’urgence.

Où est le dossier aujourd’hui ?

« Je sais que je ne suis pas le seul à vivre ce genre de chose. Depuis plusieurs années, en France, le phénomène des conflits avec les parents et des violences contre les éducateurs sportifs se multiplie partout. »

L’affaire continue. Le père a été écouté. Toutes les preuves – messages, SMS, témoignages – étaient versées au dossier.

Et, la formation se déroule à huis clos. Il est interdit aux parents d’accéder au terrain et le club a décidé d’exclure temporairement les familles. Mais je ne suis pas calme. Le père a essayé de me voir à plusieurs reprises, ce sont les autres éducateurs présents sur place qui sont intervenus et lui ont refusé l’entrée. Ils m’ont dit de faire attention car il pouvait me suivre ou m’attendre. Pour le moment, je ne quitterai pas le club seul. Je me demande aussi si je continuerai l’année prochaine. Je sais que je ne suis pas le seul à vivre ce genre de chose. Depuis plusieurs années, en France, le phénomène des conflits avec les parents et des violences contre les éducateurs sportifs se multiplie partout. C’est fou, car ces comportements vont à l’encontre des valeurs du sport que l’on s’efforce de véhiculer au quotidien. Il y a beaucoup de travail à faire dès le début de l’année dans les associations sportives pour prévenir ces attitudes : information, actions concrètes, formation. Il est important que les valeurs d’un club soient partagées par tous, que les parents soient alliés dans la victoire comme dans la défaite. Si les parents contestent la décision d’un entraîneur ou d’un arbitre, comment les enfants peuvent-ils la respecter ?
*Pour des raisons d’anonymat, le nom a été modifié

 
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