(Amsterdam) Deux jours après les violences en marge du match de football entre l’Ajax Amsterdam et le Maccabi Tel-Aviv qui ont suscité la condamnation internationale, la capitale néerlandaise et ses habitants juifs étaient toujours sous le choc.
Stéphanie HAMEL
Agence France-Presse
Dans le Jodenbuurt, le quartier juif d’Amsterdam, des policiers montent la garde près de la synagogue portugaise et du musée historique juif.
Alors que la communauté reste discrète ce samedi, un juif d’Amsterdam, tenant un stand de t-shirts au marché du quartier, a déclaré à l’AFP qu’il se sentait très mal depuis les violences de jeudi soir.
“Je ressens la honte que doivent ressentir tous les Amstellodamois, car une fois de plus, comme si l’histoire se répétait, les Juifs sont attaqués simplement parce qu’ils sont Juifs”, déplore cet homme de 58 ans qui a préféré garder l’anonymat pour sa propre sécurité.
Des supporters du Maccabi Tel-Aviv ont été violemment pris à partie par des groupes d’individus dans les rues de la ville dans la nuit de jeudi à vendredi après le match de la Ligue Europa, dans un contexte marqué par la montée des actes antisémites et anti-israéliens dans le monde depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas en octobre 2023.
La police a fait état de cinq personnes brièvement hospitalisées et de 63 arrestations, et Israël a organisé des vols d’urgence pour rappatrier ses citoyens.
« Je suis totalement opposée à ce qu’Israël fait dans la bande de Gaza et je pense que c’est horrible et que cela dépasse les limites. Mais ce qui s’est passé à Amsterdam est allé trop loin », s’indigne Edit Tuboly, une femme de 61 ans interrogée dans les allées du marché, les bras chargés de sacs.
Dès mercredi soir, la veille de ce match de la Ligue Europa, des incidents avaient eu lieu dans certains quartiers, des supporters du Maccabi ayant arraché un drapeau palestinien d’une facade du centre-ville et brûlé un autre drapeau sur la place du Dam.
Le gouvernement néerlandais ainsi que la mairie ont fermement condamné les attaques, les qualifiant d’antisémites. De nombreux dirigeants étrangers, dont l’Américain Joe Biden, les ont également dénoncées.
Amsterdam, « lieu sûr »
Originaire d’Israël et vivant à Amsterdam depuis 34 ans, le commerçant du marché a lui-même assisté, avec un ami, au match qui s’est terminé par une victoire de l’Ajax 5-0.
« Même s’il y a une place pour les critiques sur le côté d’Israël dans ce conflit [à Gaza]Ce n’est bien sûr pas une manière de l’exprimer en attaquant des innocents simplement parce qu’ils viennent de quelque part », déplore-t-il.
Selon le commerçant, l’ambiance du match était « fantastique » entre les deux groupes de supporters. Néanmoins, il a déclaré connaître un ami qui a été agressé avec son fils de 17 ans après le match.
La capitale néerlandaise, surnommée « Mokum » ou « lieu sûr » en yiddish, est historiquement considérée comme un refuge pour la communauté juive. À l’exception de la période de la Seconde Guerre mondiale, la figure d’Anne Frank reste un symbole de la déportation du peuple juif.
« Jusqu’à présent, nous pensions qu’Amsterdam et les Pays-Bas étaient épargnés par cette violence extrême contre les Juifs », explique le commerçant, visiblement ému.
Commémorations annulées
« Amsterdam devrait avoir honte du pogrom perpétré le soir de la Nuit de Cristal », a déclaré le collectif d’organisations juives néerlandaises Centraal Joods Overleg dans un communiqué publié vendredi.
Joana Cavaco, 28 ans, présidente du collectif juif antisioniste Erev Rav, créé il y a deux ans aux Pays-Bas, estime qu’il est « inquiétant de voir qu’on parle de la sécurité des Juifs sans voir cela se produire sur le terrain ».
D’après M.moi Cavaco, les supporters du Maccabi ont estimé avoir carte blanche et ont commencé les provocations dès leur arrivée.
“Nous ne nous sentons pas en sécurité parce qu’Israël dicte la façon dont le monde nous perçoit”, a-t-elle déclaré à l’AFP.
Une soirée commémorative de la Nuit de Cristal à Amsterdam, à laquelle devait participer Erev Rav, a été annulée, et la maire d’Amsterdam, Femke Halsema, a interdit vendredi toute manifestation pendant trois jours.
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