Le Canadien vient de passer le quart de sa saison. Même dans leurs prédictions les plus pessimistes, Kent Hughes, Jeff Gorton et Martin St-Louis n’auraient jamais osé imaginer la réalité qui les a frappés dimanche matin en consultant le classement de la LNH.
Bon dernier dans l’Association de l’Est. Avant-dernier au classement général.
Pour une équipe en reconstruction qui souhaitait poursuivre sa progression, c’est tout un atterrissage. À pareille date l’an dernier, le Tricolore était à 12e rang de son association et 20e niveau du circuit.
D’ailleurs, c’est la première fois depuis l’arrivée de la nouvelle administration, lors de la saison 2021-2022, que l’équipe connaît un revers.
À de nombreuses reprises déjà, depuis le début de la campagne, nous avons évoqué le système défensif difficile à assimiler pour expliquer les déboires de l’équipe. Inutile d’y revenir. Quoi qu’il en soit, cela n’explique pas tout.
Cela peut expliquer pourquoi l’adversaire se promène avec la rondelle sur le territoire canadien pendant plus de sept minutes et demie par match. Cela peut également aider à comprendre l’origine de la moyenne élevée de tirs autorisés depuis l’enclave (15,6), des occasions de but à haut risque autorisées (17) et de celles provenant d’un cycle continu (12).
Mais cela n’explique pas le nombre moyen de prolongations autorisées par match (5,3) ni le fait que l’équipe ait marqué 35 buts dans les 10 secondes suivant un turnover. À cet égard, seuls les Penguins ont fait pire (36).
Accablé par les événements
Cela n’explique pas pourquoi Juraj Slafkovsky a réalisé plus de revirements lors des derniers matchs ni pourquoi Kirby Dach semble toujours dépassé par les événements lorsqu’il saute sur la glace.
D’ailleurs, comment avait-on pu, dans le camp français, placer autant d’espoir sur Dach, un joueur contraint à l’inactivité pendant un an ? Comment baser notre évaluation sur sa performance lors du camp d’entraînement 2023 et sur les deux points qu’il a récoltés en un match et demi en octobre suivant ?
Comme Michel Therrien le disait déjà à son collègue Bruce Garrioch, chargé de couvrir les Sénateurs d’Ottawa, lors des séries éliminatoires de 2013 : « Allez! Je pensais que tu connaissais le jeu mieux que ça, hein ! »
Cela n’explique pas non plus pourquoi Alex Newhook, que l’on pensait voir s’épanouir offensivement un jour à Montréal, n’a que quatre points au compteur. Quatre buts, dont deux dans le même match. Cela signifie donc qu’il n’a inscrit son nom sur la feuille de match qu’à trois reprises.
Quoi qu’il en soit, il peut y avoir des raisons pour lesquelles les Blackhawks et l’Avalanche ont accepté de les quitter à seulement 21 et 22 ans.
Parlant d’espoirs fondés sur l’hypothétique réussite d’un retour au jeu, on se demande si l’arrivée de Patrik Laine aurait vraiment fait une si grande différence. C’est un autre qui n’a pas vu d’action depuis un moment et dont le corps commence peut-être à être hypothéqué.
Des difficultés croissantes
Le Finlandais aurait été à peu près le seul nouvel ajout à l’équipe avec Lane Hutson. Était-ce utopique de croire qu’une formation similaire à l’année dernière était mûre pour passer à l’étape suivante ?
Probablement. Et c’est là que tout le monde s’est mis le doigt dans l’œil.
Sept mois de croissance organique ne suffiront peut-être pas pour une équipe qui est encore la deuxième plus jeune de la ligue.
Des rencontres comme celle de samedi rappelleront un peu trop occasionnellement que l’équipe est encore tiraillée entre apprendre à jouer et apprendre à gagner.
N’en déplaise aux vétérans de l’équipe, comme l’a laissé entendre David Savard samedi soir.
«C’est décevant. Nous pouvons attribuer [la difficile soirée] à notre jeunesse, mais nous devrions être à un autre stade de notre progrès.
Il y aura des passages moins pires, comme la séquence incluant les affrontements contre le Wild, les Blue Jackets et les Oilers.
A ce moment-là, il sera convenu de se réjouir. Mais il faut éviter de partir dans la peur comme ce fut le cas la semaine dernière.
Pour reprendre une des analogies de Saint-Louis : le bébé a commencé à marcher.
Mais après deux ou trois pas, il retombe sur les fesses.
Statistique de classement moyen dans la LNH
Buts accordés 3,80 31e
Buts attendus contre 3,53 28e
Tirs autorisés depuis l’enclave 15,6 28e
Shots attribués
du fond de l’enclave 7,4 25e
Temps de possession
de l’adversaire 7:35 29e
Opportunités accordées
en cycle continu 12 30e
Opportunités à haut risque 17 29e
Source : Sportlogiq
Il n’y a pas que du négatif dans ce premier quart-temps difficile. Certains joueurs peuvent se regarder dans le miroir sans être gênés par leur reflet.
Ce premier quart de saison nous a offert la résurrection du petit guerrier. On n’a jamais douté de son travail acharné, mais le rythme semblait devenir difficile à tenir. Est-il en meilleure forme ? Dépense-t-il son énergie plus efficacement ? Bonne question. Mais tout ce qu’il touche part dans le filet adverse. Il n’est pas à l’abri d’un passage à vide, mais en maintenant ce rythme, il se rapprocherait des 30 buts.
Jusqu’à présent, il est la principale attraction du Canadien. Son jeu de jambes, ses feintes et sa vision du jeu tiennent les supporters en haleine. Il est toujours à la recherche de son premier but, mais il compte déjà 11 passes décisives à son palmarès. 11 points qui le placent au troisième rang parmi les recrues de la LNH. De plus, il est le joueur de première année le plus utilisé (22 minutes 56 secondes). Il obtiendra certainement des votes pour le Trophée Calder.
Il ne sera jamais un joueur défensif as, mais tant qu’il ne cause pas de problèmes à l’équipe, on s’en fiche. Ce que nous voulons, c’est qu’il marque des buts et rende l’attaque massive menaçante. Ce qu’il a réussi à faire jusqu’à présent. Il fait partie d’un quintette de leaders avec six buts marqués en avantage numérique.
Le capitaine est exigeant envers lui-même. Récemment, il a remis en question sa performance. C’est vrai qu’il a eu un petit passage à vide, mais il maintient pour ainsi dire un rythme d’un point par match (19 points en 20 matchs). 14 de ces points ont été acquis à force égale. Ce qui montre que quelque chose se passe offensivement lorsqu’il marche sur la glace.
Il profite des déboires de Kirby Dach pour obtenir une promotion dans un trio offensif. Cela ne pouvait pas mieux tomber pour un joueur arrivant en fin de contrat. Malgré ce rôle bonifié, il demeure l’homme de confiance de Martin St-Louis lors de missions défensives et numériquement inférieures. Il n’est pas étranger au fait que le Canadien occupe la huitième place en infériorité numérique (82,4%).