Ce n’est pas une insulte de dire que vous marquez peu. Pourtant, après votre doublé à La Rochelle contre Lyon en octobre, vous en avez inscrit un autre avec les Bleus contre le Japon. Une nouvelle vocation ?
Je ne le prends pas mal : c’est sûr que c’était un peu inattendu (sourire). Quand on regarde les dernières saisons, je ne suis pas un grand buteur. Mais quand les opportunités se présentent, je les saisis.
Ne vous êtes-vous pas surpris en vous levant après votre deuxième essai ?
Complètement. Après, ce furent encore deux tentatives de « hoquet » : je n’ai pas fait de gros vols au-delà de 40 mètres. A chaque fois, c’est le résultat de deux petites pioches et c’est parti sans grand rythme. Mais c’est encore deux essais. Mes parents étaient là, ils étaient super contents (sourire).
Côté émotions, comment avez-vous vécu cette sélection ?
C’était particulier puisque je suis revenu prématurément grâce ou à cause de Thibaud Flament qui s’est blessé à la crête iliaque. Cela m’a presque permis d’avoir le même temps de jeu que si j’avais débuté comme titulaire. Ces deux tentatives furent la cerise sur le gâteau.
Est-ce facile de rentrer à la maison si vite ?
Oui et non. On joue en équipe de France, au Stade de France : on n’attend qu’une chose, c’est de revenir. J’étais prêt à revenir à tout moment.
Vous avez souvent eu un rôle de doublure jusqu’à présent en équipe de France. La concurrence semble plus ouverte sur cette tournée. Comment abordez-vous cela ?
Il y a beaucoup de grands joueurs sur le troisième trio. C’est compliqué de trouver sa place parmi tout ce beau monde. Ce n’est jamais évident quand on voit les gars à nos côtés, avec ce qu’ils ont fait dans le passé et ce qu’ils continuent de produire aujourd’hui. Mais les dés ont peut-être été relancés cette fois. Alex (Roumat) a débuté, on avait aussi l’habitude de voir Antho (Jelonch) et Charles (Ollivon) sur la feuille : la composition a un peu changé. Mais chacun apporte la même énergie positive pour faire avancer le groupe.
Vous avez déclaré lors du dernier Tournoi qu’une simple titularisation n’est pas un objectif à vos yeux. Qu’est-ce que c’est alors ?
Trouver sa place dans le groupe : c’est-à-dire devenir un joueur sur lequel on peut compter en permanence. Et pas seulement en un éclair, lorsque quelqu’un est blessé ou parce qu’un autre joueur ne joue pas bien. Quand on atteint ce statut, je pense que c’est très gratifiant.
« Si à la fin de ma carrière, on ne retient que le fait que j’étais bien physiquement, ça va me rendre un peu triste »
Quand on parle de profil, on parle d’un joueur impressionnant physiquement. Est-ce réducteur ?
Si à la fin de ma carrière, on ne retient que le fait que j’étais bien physiquement, ça va me rendre un peu triste (sourire). Ce serait bien si les gens disaient que je suis aussi un bon joueur de rugby. Sinon, autant participer uniquement aux compétitions de musculation (rires).
Au-delà de ce match contre le Japon, c’est votre début de saison qui est convaincant. A quoi l’attribuez-vous ?
J’ai essayé de prendre du recul par rapport au rugby. Sans m’inquiéter, j’essaie juste de m’amuser sur le terrain. Cela ressemble à une phrase large, mais ce n’est ni plus ni moins : j’essaie d’avoir autant de pensées positives que possible. C’est ce que j’essaie de mettre en place depuis le début de cette saison. Jusqu’à présent, cela fonctionne plutôt bien.
Vous avez toujours présenté une forme de fraîcheur apparente : n’était-ce qu’une façade ?
Disons qu’il y avait des choses qui pouvaient me déranger un peu. Je ne parle pas de critiques, qui peuvent être constructives, mais des petites choses du quotidien : je m’y suis trop attardé, cela m’a enlevé de l’énergie. Ma personnalité n’a pas changé, je reste le même. Mais je m’assure de me concentrer uniquement sur le positif. Quand on est bien dans sa tête, on est bien sur le terrain.
Vous affronterez samedi la Nouvelle-Zélande qui vient de s’imposer en Irlande et en Angleterre : quelles impressions vous laissent ces Noirs ?
Ils sont en forme, non (sourire) ? Les Irlandais n’avaient plus perdu à domicile depuis longtemps. Le défi est là pour nous : si nous pouvons être la seule équipe de l’hémisphère Nord à les battre, ce serait un formidable message. Nous pouvons réussir là où d’autres nations ont échoué.