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Qui est Emma Chamberlain, l’Américaine Léna Mahfouf ?

PORTRAIT – En sept ans, Emma Chamberlain est passée de jeune YouTubeuse à célébrité ultra convoitée. De quoi bâtir un empire, et faire tomber toute l’industrie de la mode.

Elle s’appelle Emma Chamberlain et elle ressemble un peu à l’Américaine Léna Mahfouf. Comme l’entrepreneur et vidéaste français, elle est devenue une puissante influenceuse mode qui compte 15 millions d’abonnés sur Instagram et 12 millions sur YouTube. Très populaire aux Etats-Unis, elle fut invitée par Vogue poser des questions à des célébrités pour la première fois lors du Met Gala en 2022, et réitérer l’expérience en 2024, signe de son statut.

Elle a également utilisé ce pouvoir pour booster la carrière de son ex-petit-ami, le chanteur Tucker Harrington Pillsbury, simplement en apparaissant de dos dans l’un de ses clips. La vidéo permet ainsi au rappeur de passer d’« artiste émergent » à « ami d’Emma Chamberlain ». Un titre on ne peut plus cool, qui lui offrira une scène à lui seul lors du célèbre Festival de Coachella le 22 avril 2022, soit un mois plus tard.

Depuis maintenant sept ans, l’influence d’Emma Chamberlain ne cesse de croître. À 23 ans, elle est capable de défier l’algorithme de Youtube – qui oblige à publier régulièrement – ​​en n’ayant posté que neuf vidéos en un an. Elle peut aussi être responsable du succès commercial d’une collection de mode, inciter des millions de jeunes filles sur TikTok à consommer les mêmes boissons qu’elle, ou encore faire crier des centaines de fans lorsqu’elle arrive à l’entrée d’un défilé de la fashion week. Et comme beaucoup de filles de sa génération, tout a commencé pour elle derrière un appareil photo dans la chambre de sa petite fille.

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Fille californienne

Elle est née le 22 mai 2001 à San Bruno, en Californie, d’un père, Michael Chamberlain, artiste spécialisé dans la peinture à l’huile et la photographie, et d’une mère, Sophia Chamberlain, coordinatrice de vol qui travaillait auparavant chez Microsoft. Le couple a divorcé alors qu’Emma, ​​leur unique enfant, avait 5 ans. « Ils sont toujours amis, ils parlent tout le temps. J’ai vraiment de la chance de ce côté-là, ils s’entendent très bien. Et ils se soutiennent beaucoup», confiait-elle au magazine fin 2023. Personnes . Mais cette séparation aura tout de même des répercussions sur la jeune fille, notamment sur le plan amoureux. “Cela devient un peu choquant quand on est plus âgé et qu’on se dit : ‘Je suis dans ma première relation, qu’est-ce que c’est censé être ?’ Je ne sais pas, je n’ai jamais vécu ça.

Emma Chamberlain au défilé Louis Vuitton automne-hiver 2019-2020. (Paris, 5 mars 2019.)
Jacopo Raule / Getty Images

Emma a fréquenté le Central College de San Carlos, puis a commencé ses années de lycée à Notre-Dame de Belmont. C’est également durant cette période qu’elle découvre le cheerleading, et le pratique en compétition pendant cinq ans. Mais Emma Chamberlain n’était pas destinée à rester à l’école. Trop sensible, touche-à-tout ou tout simplement trop différent ? Elle quitte l’école durant le premier semestre de CP, se réfugie sur YouTube, plateforme qu’elle découvre à l’âge de 6 ans, et publie une première vidéo sur sa chaîne en juin 2017. Vêtue d’un simple t-shirt blanc, les cheveux en chignon. queue de cheval, la jeune fille présente ses derniers achats. Mais c’est en juillet 2017, lorsqu’elle a publié une vidéo intitulée « Nous devons des excuses au Dollar Store », qu’elle a connu pour la première fois le succès. En un mois, sa chaîne est passée de 40 000 à 150 000 abonnés.

Le premier influenceur « non retouché »

Son style de vidéo cartonne car différent : elle est la première à opter pour un montage chaotique quand d’autres YouTubeurs soignent leur contenu. Elle s’amuse à déformer son corps avec des filtres et à faire des gros plans sur les taches d’acné. Très souvent, elle bâille, rote, se filme sans maquillage ou en plein sanglot. Pas d’introduction, pas de conclusion. Souvent, les vidéos se terminent soudainement et laissent le spectateur en redemander. Elle est également capable de rester plusieurs secondes à chercher ses mots, le regard dans le vide, plutôt que de couper cette séquence comme le ferait une influenceuse chevronnée. Donnant implicitement l’impression d’être comme n’importe quelle adolescente de son âge, c’est-à-dire plus ou moins vulnérable. Bref, sans vraiment le savoir, sa personnalité fait d’elle la première influenceuse « non retouchée », celle qui parle à tout le monde.

Physiquement aussi, Emma Chamberlain a une caractéristique qui fait la différence : de grands yeux cerclés et des cils bas qui, comme Billie Eilish, lui donnent constamment un air fatigué. «J’ai appris à aimer mes cernes cette année. Je pense que mon style devient un peu plus grunge, un peu plus naturel. J’ai l’impression que mes cernes me font ressembler à un personnage de Tim Burton et je ne suis pas en colère contre ça”, a-t-elle révélé à ce sujet dans les colonnes du magazine. Elle en 2021.

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Surfant sur le succès de YouTube, elle s’installe à Los Angeles en 2018 avec des YouTubers tout aussi célèbres aux Etats-Unis à cette époque : James Charles, Grayson Dolan et Ethan Dolan. À Noël 2018, sa chaîne comptait 6 millions d’abonnés. De quoi être nominé la même année dans quatre catégories aux Streamy Awards, les Oscars de la production web. Elle a remporté le Breakout Creator Award. Consécration ultime : le 13 novembre 2019, le magazine Temps décide de l’inclure dans ses listes Time 100 Next et celle des 25 personnes les plus influentes d’Internet.

Emma Chamberlain à la cérémonie Time 100 Next. (New York, 14 novembre 2019.)
Taylor Hill / FilmMagic

Reine d’un empire

Influenceur… ou devrions-nous plutôt dire entrepreneur. En 2019, Emma Chamberlain fonde Chamberlain Coffee, sa propre entreprise qui commercialise du café et des produits associés. Un clin d’œil à sa passion pour cette boisson qu’elle préfère froide, au lait et remplie de glaçons. D’ailleurs, le phénomène Ice Latte Coffee (café froid au lait, en français) qui a bouleversé TikTok il y a quelques années doit une partie de son succès à Emma Chamberlain. Les résultats de son entreprise sont là : elle lève 7 millions de dollars auprès d’investisseurs lors d’une levée de fonds en 2023, et aurait généré selon Forbes pas moins de 20 millions de dollars de revenus durant cette même période. En novembre 2024, elle signe une première collaboration avec la marque de lunettes Warby Parker, proposant plusieurs modèles vendus 95$ pièce. Sans surprise, le label déclare que ce partenariat devient le plus lucratif depuis quatorze ans. Encore un exemple de l’influence de cette jeune femme, capable de lancer des tendances avec une seule photo postée sur Instagram.

Naturellement, l’industrie de la mode est rapidement venue frapper à sa porte. En 2021, elle est nommée ambassadrice de la marque Louis Vuitton et se rend régulièrement à Paris pour assister aux défilés orchestrés par le directeur artistique Nicolas Ghesquière. Deux ans plus tard, Lancôme en fait sa nouvelle égérie, tandis que Vogue lui donne son micro lors du Met Gala.

Emma Chamberlain au Met Gala 2022. (New York, 2 mai 2022.)
Gilbert Carrasquillo / Gilbert Carrasquillo

Priorité à la santé mentale

Mais le succès s’accompagne aussi de pression. Tout ce qu’Emma Chamberlain touche se transforme en or, mais parfois c’est au détriment de sa santé mentale. «Je me sentais coupable parce que j’avais ce dont les autres rêvaient, et j’étais tellement effrayée, déprimée et brisée. Mais en même temps, j’ai l’impression d’être faite pour faire ça”, a-t-elle confié à New York Times en 2023. Car avant de devenir célèbre, Emma Chamberlain a toujours été cette fille « comme les autres », du moins en apparence. Celle qui se donne le droit d’être troublée, romantique, triste ou carrément déprimée. Et c’est pour mettre des mots sur ses émotions qu’elle signe en 2020 un contrat avec Spotify, avec qui elle produit son podcast. Tout est permis . Une bulle dans laquelle elle s’exprime sur mille et un sujets : de la notion de vengeance au retour de la mode des années 2010, en passant par des questions existentielles comme : « Est-ce que j’ai envie d’être belle ou intéressante ? ».

Une manière à elle de prouver qu’au-delà du conte de fées, il y a toujours une part d’ombre. Comme elle l’a raconté New York Times : « C’est une industrie qui fait beaucoup de fausses promesses. J’ai l’impression que c’est mon devoir de dire : « OK, quelqu’un doit te dire que tu n’atteindras pas le nirvana. » Un point de vue qui semble réconforter sa communauté, toujours plus nombreuse à suivre ses aventures. Sa dernière vidéo Youtube, postée il y a deux mois, traite de la « théorie des cheveux ». Un sujet très « niche » (selon lequel la façon de se coiffer est le miroir de l’âme) qui a pourtant été vu plus de 1,2 million de fois.

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