Les Londoniens le savent bien : il n’est pas nécessaire de prendre un taxi pour revenir de l’aéroport d’Heathrow. Le Heathrow Express, le train ultra-rapide qui relie le quai à la gare de Paddington en dix-sept minutes, coûte 25 livres sterling, contre environ 100 livres pour un taxi. Mais, depuis 2022, les terminaux sont également reliés au centre-ville de la capitale par la ligne Elizabeth, un métro sans conducteur qui atteint la station Bond Street en quarante-cinq minutes, au prix bien plus économique de 6,70 livres sterling.
Le 5 novembre, c’est cette file qu’ont empruntée Jean-Jacques Goldman et son épouse, Nathalie, en fin de matinée pour rejoindre leur domicile. Le couple revenait de Marseille, où ils occupent un grand appartement depuis plus de vingt ans, après une semaine de vacances en famille en Italie. Ces allers-retours entre la ville de Marseille et le Royaume-Uni sont habituels pour Jean-Jacques et Nathalie, dont les deux filles aînées, Maya et Kimi, étudient désormais en France. Seule Rose, 17 ans, vit toujours avec eux.
Le chanteur l’a annoncé lors de sa retraite de la vie musicale en 2002 : il souhaitait accompagner ses jeunes enfants jusqu’à leur majorité et ne comptait pas s’écarter de son principe. Rose n’étant pas encore adulte, Goldman, heureux du relatif anonymat dont il jouissait à Londres, resta fidèle à son règne. Même le doyen des animateurs, son ami Michel Drucker, n’a pas réussi à le convaincre de participer à l’émission spéciale qu’il lui consacrera fin décembre. «Je discute encore avec lui», confie la personnalité du service public. Mais il m’a dit qu’il préférait rester discret. Tout en encourageant mon émission. »
La dernière fois qu’il s’est produit aux Enfoirés, en 2016, il était dans un état de stress total car il devait chanter une chanson !
Car Goldman a peut-être quitté la scène, mais pas la musique. Tous ceux qui lui parlent, qui lui écrivent, savent qu’il n’a pas abandonné son art. Interrogé par Gautier Capuçon l’année dernière, il lui a écrit une chanson, “Pense à nous”, enregistrée avec les chœurs d’enfants de la Maîtrise de Radio France de Paris et de Bondy, dont il a supervisé la production en studio. Lorsque les équipes de Céline Dion l’ont contacté pour le prochain album français de la diva, attendu en septembre 2025, il a répondu présent. Et, s’il n’a pas encore envoyé les deux titres sur lesquels il travaille, il fera tout pour rester le plus proche et fidèle possible à ce que la star a vécu ces dernières années. N’est-ce pas lui qui, à la mort de René Angélil, en 2016, a su trouver les mots pour mettre en musique le deuil de Céline ?
« C’est un homme qui écoute encore beaucoup de musique », confie l’un des rares chanteurs à interagir avec lui. Mais qui ne se voit plus du tout à la lumière. Non seulement il n’a pas les codes du business d’aujourd’hui, mais il est surtout heureux de ne plus avoir à vivre avec la peur au ventre. La dernière fois qu’il s’est produit aux Enfoirés, en 2016, il était dans un état de stress total car il devait chanter une chanson ! »
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Non seulement il passe régulièrement des vacances au Club Med, mais il loue même des Airbnb sans que cela fasse la une des journaux.
Jean-Jacques n’est cependant pas un ermite intouchable : lui ou son collaborateur Alexis répondent à toutes les demandes… de manière négative 99% du temps, que ce soit pour un film, un livre, une collaboration ou une prise de parole. Mais quand Goldman est touché en plein cœur, il n’hésite pas à prendre la plume, comme en septembre dernier pour remercier Thibault Christophe, qui a écrit le roman « Journal d’un fan » dans lequel il raconte sa passion pour l’auteur de « Il était qui change la vie.
Si Goldman fait encore rêver des millions de Français – on dénombre une centaine d’interventions radio par jour ! – il n’aspire qu’à la plus simple des existences. Comme lorsqu’il dirigeait la boutique Sport 2000 à Montrouge, à la fin des années 1970. « À cet égard, il a globalement réussi son pari », poursuit ce proche. Non seulement il passe régulièrement des vacances au Club Med, mais il loue même des Airbnb sans que cela fasse la une des journaux. »
Eh oui, le couple Goldman a passé quelques jours cet été sur la véloroute qui relie Roscoff à Concarneau, trouvant un logement sur la plateforme le long du parcours. Il lui a suffi de croiser un fan propriétaire à Scaër le 24 juillet pour que les réseaux sociaux révèlent publiquement ce non-événement.
« Il est toujours touché quand les gens lui parlent de ses chansons, de ce qu’il représentait pour eux ou de ce qu’il représente encore », raconte cette connaissance. Il aime moins ceux qui font une exégèse de son œuvre dans des livres… »
Comme ce n’est pas quelqu’un qui veut brusquer les fans, il n’est pas du genre à multiplier les rééditions
Un ancien cadre de Sony
Si Jean-Jacques Goldman n’a pas apprécié l’essai que lui a consacré l’année dernière Ivan Jablonka, vendu à plus de 20 000 exemplaires, il a souri devant toute cette presse qui l’a vanté aux nues, celle-là même qui l’a ridiculisé dans les années 1980. . « Il avait une bonne formule pour résumer l’émoi, il a parlé de « téléramisme », signe qu’il n’est dupe de rien. »
Celui qui demandait aux journalistes une lettre de motivation avant d’accepter une interview se plaignait aussi pas mal de « VSD », l’hebdomadaire (devenu mensuel depuis) qui avait estimé que ses droits d’auteur rapportaient 2 millions d’euros par an. “Ces chiffres sont fantaisistes”, a déclaré un ancien cadre de Sony. Certes Jean-Jacques a toujours eu un pourcentage de royalties plus élevé que les autres. Mais son dernier album studio est sorti il y a vingt-quatre ans ! Comme ce n’est pas quelqu’un qui veut brusquer les fans, il n’est pas du genre à multiplier les rééditions. »
Il ne s’est prononcé contre aucun projet musical permettant à son œuvre de continuer à vivre.
Il a accepté de voir ses deux derniers disques live sortir en vinyle le 22 novembre – ils n’étaient alors sortis que sur CD. Mais il a insisté pour qu’il s’agisse des « dernières » sorties, précise le site non officiel de l’artiste, jjgoldman.net. Le plus présent des absents a donc réussi l’incroyable exploit de maintenir une immense popularité en ne faisant… rien. De The Goldman Legacy aux Goldmen – ces groupes hommage qui remplissent désormais le Zénith –, il ne s’est prononcé contre aucun projet musical qui permette à son œuvre de continuer à vivre et à être jouée dans des salles de plus en plus grandes, devant un public de plus en plus nombreux. public.
Même « au bout de ses rêves », il n’avait pas imaginé avoir à ce point conquis le cœur du public. On aurait pu penser que son retrait finirait par lasser les fans. Que son refus de toute attitude rock’n’roll l’enfermerait dans le rôle du triste père de la chanson française. Mais non. Moins Jean-Jacques en fait, plus Goldman est grand. Et si c’était la vraie définition du succès ?
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