News Day FR

Timide, grand hypocondriaque, caustique… Portrait du clown triste du cinéma français

Acteur français populaire depuis la comédie à succès « Bronzés », Michel Blanc, décédé à 72 ans dans la nuit de jeudi à vendredi, a alterné entre rire et émotion, explorant avec finesse l’âme humaine, devant et derrière la caméra.

“On ne sait jamais, sur un malentendu, ça pourrait marcher…” Pour beaucoup, il restera à jamais Jean-Claude Dusse, le maigre chauve et moustachu des “Bronzés”, film sorti en 1978 dans lequel il incarne un flirt toujours raté. convaincu qu’il peut « conclure » et dont les réponses sont passées à la postérité. Gros succès puis plus gros succès encore, un an plus tard, avec « Les Bronzés sont du ski », les deux films deviennent cultes.

Des générations ont ri en entendant « Oubliez que vous n’avez aucune chance, allez-y, foncez ! On ne sait jamais, un malentendu pourrait fonctionner » ou encore « Finalement, si vous étiez à bout de souffle, on pourrait envisager de conclure ? Ce personnage, aussi exaspérant que touchant, enferma un temps Michel Blanc dans des rôles d’hypocondriaque ou de maladroit.

Pourtant, l’acteur avait déjà fait ses preuves au milieu des années 1970 en tournant pour Bertrand Tavernier (« Que la fête commence »), Claude Miller (« La meilleure façon de marcher ») et Roman Polanski (« Le Locataire »).

« Tenues de soirée », le tournant

Après l’énorme succès public de « Marche à l’ombre » (1984), son premier film en tant que réalisateur, l’acteur sait enfin rebondir et élargir son spectre. Il est le premier à échapper à la bande du « Splendid », du nom de ce café-théâtre parisien fondé avec des copains de lycée et vivier d’acteurs devenus célèbres.

Et fait exploser le « plafond de verre » grâce au transgressif « Evening Wear » (1986) du réalisateur Bertrand Blier. Il incarne l’émouvant Antoine, qui s’éprend de Gérard Depardieu et du travestissement. Le rôle, couronné du Prix du meilleur acteur à Cannes, marque un tournant dans sa carrière.

Né le 16 avril 1952 à Courbevoie (Hauts-de-Seine), Michel Blanc est issu d’un milieu plutôt modeste, avec un père émouvant devenu cadre intermédiaire et une mère dactylo devenue comptable. Des parents très aimants qui surprotègent ce fils unique, né avec un souffle au cœur.

Timide, chétif, grand hypocondriaque – « Je suis le pionnier du gel hydroalcoolique ! » –, le jeune Michel perd vite ses cheveux et va plus miser sur l’autodérision et l’humour, parfois caustique, que sur son physique.

“Je ne m’aimais pas”

“J’ai un avantage sur les chauves tardives, je n’ai jamais associé la calvitie à l’âge”, a plaisanté celui qui s’est longtemps senti mal dans sa peau. Depuis l’enfance, il est passionné de musique classique.

A 20 ans, il tente même de faire carrière comme pianiste. Il y consacre six à sept heures par jour mais abandonne assez vite, comprenant qu’il ne sera jamais « le nouvel Arthur Rubinstein ».

Changement de direction avec l’aventure du Splendid, où il rejoint son groupe d’amis du lycée de Neuilly, Gérard Jugnot, Thierry Lhermitte et Christian Clavier. “Comme je ne m’aimais pas, j’avais envie de jouer des personnages qui n’étaient pas moi.” “C’est un homme solitaire, blessé, déconcerté”, a déclaré son amie l’écrivaine Françoise Sagan.

«Je suis une personne anxieuse qui préfère l’action à la dépression», explique l’intéressé. Tout au long de sa carrière, également passée au théâtre, ce travailleur acharné et perfectionniste sait utiliser ses complexes et son talent d’écrivain pour explorer le désenchantement et façonner les personnages de ses films, notamment ceux qu’il met en scène comme « Grosse Fatigue » (1994) et « Embrasse qui tu veux »(2002).

Il est convaincant dans le registre dramatique, incarnant l’inquiétant « Monsieur Hire » (1989), selon Simenon, ou un médecin homosexuel aux débuts du sida dans « Les Témoins » (2007) d’André Téchiné. Ou encore à la télévision dans « L’Affaire Dominici » (2003).

Après le rendez-vous manqué du troisième opus des « Bronzés » en 2006, Michel Blanc, nominé quatre fois au César du meilleur acteur, a décroché la précieuse statuette en 2012 pour son inattendu second rôle de chef de cabinet dans le thriller politique « L’ Exercice de l’État ».

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :