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Teresa Ribera, une femme puissante à Bruxelles, au cœur d’intérêts conflictuels

La socialiste espagnole Teresa Ribera, en charge de la transition écologique et de la concurrence dans la nouvelle Commission européenne, à Bruxelles le 18 septembre 2024. (JOHN THYS / POOL/AFP)

Chargée de la transition écologique et de la compétitivité, la socialiste espagnole Teresa Ribera a hérité d’un portefeuille tentaculaire au sein de la nouvelle Commission européenne. Mais elle devra composer avec ses collègues et la poussée conservatrice de l’Europe.

A 55 ans, cette proche de Pedro Sanchez est la tête d’affiche de la nouvelle équipe dévoilée mardi, même si elle doit – comme les autres commissaires – être approuvée par les députés pour être officiellement nommée.

Vice-présidente exécutive de la Commission, son portefeuille promet une transition écologique « propre, équitable et compétitive », avec sous ses ordres la puissante Direction générale de la concurrence, l’une des administrations les plus influentes de Bruxelles.

Dans ce dernier volet, elle reprend les fonctions occupées par la Danoise sortante Margrethe Vestager, l’un des visages les plus connus du mandat précédent.

Jusqu’ici ministre de l’Écologie en Espagne, Teresa Ribera veut « lier le Green Deal européen et la compétitivité ». Et plusieurs commissaires pourraient lui rendre des comptes, comme le Néerlandais Wopke Hoekstra (climat), la Suédoise Jessika Roswall (environnement) ou le Danois Dan Jorgensen (énergie).

« C’est une personnalité extrêmement forte, Ribera sera quelqu’un de très puissant », assure l’eurodéputé Jean-Marc Germain, socialiste comme elle.

Ribera a le « portefeuille le plus influent », estime également Simone Tagliapietra, spécialiste des politiques européennes pour le think tank Bruegel.

« La concurrence est l’une des compétences exclusives » de l’Union européenne, souligne-t-il. « Elle est en charge du défi politique le plus important des cinq prochaines années : articuler la décarbonation avec la compétitivité de l’industrie. »

Mais l’Espagnole n’aura pas les mains libres au milieu d’une commission dominée par la droite et face à un Parlement transformé par la montée de l’extrême droite aux élections de juin.

« Pas de têtes brûlées »

La ministre espagnole de l’Énergie, Teresa Ribera Rodríguez, lors d’une interview à Madrid le 19 octobre 2022 (OSCAR DEL POZO / AFP/Archives)

Dans l’architecture complexe de l’exécutif européen, elle partage plusieurs dossiers avec deux autres vice-présidents : le centriste français Stéphane Séjourné à la stratégie industrielle et l’Italien Raffaele Fitto, ministre sortant du gouvernement d’extrême droite de Giorgia Meloni.

Ce dernier, chargé de la cohésion territoriale, devrait par exemple superviser les transports.

“Je ne le connais pas”, a déclaré mardi Teresa Ribera à propos de Raffaele Fitto, membre du parti néofasciste Fratelli d’Italia. Mais il “appartient à un gouvernement pro-européen”, a-t-elle déclaré avec bravade.

« La question est de savoir comment les commissaires vont travailler ensemble », prévient Michael Sicaud-Clyet, en charge des questions climatiques pour l’ONG WWF. « Ribera devra se coordonner avec Fitto et Séjourné, je ne sais pas si elle est en position de force. »

Et après avoir écarté le Français Thierry Breton, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen « essaie de ne pas avoir d’esprits forts » dans la nouvelle équipe « avec beaucoup de domaines partagés entre les commissaires », estime-t-elle.

La gauche et les ONG craignent plus largement que les grandes ambitions climatiques du mandat précédent soient mises en veilleuse, sous la pression des plus conservateurs.

Les écologistes s’inquiètent également du fait que le terme « vert » n’apparaît plus dans les intitulés des portefeuilles de la Commission, alors qu’il était présent auparavant.

Le profil de Ribera les rassurera-t-il ?

Ces dernières années en Espagne, la ministre n’a pas hésité à croiser le fer avec les grands patrons du secteur énergétique, comme Ignacio Sánchez Galán (Iberdrola) et Josu Jon Imaz (Repsol). Et elle a aussi pris le taureau par les cornes… contre Ursula Von der Leyen, qu’elle jugeait trop timide sur les questions environnementales.

Elle a cette « rare capacité à négocier des accords difficiles : sur une transition juste avec les travailleurs du charbon en Espagne et sur l’élimination progressive des énergies fossiles avec les grandes compagnies pétrolières », explique l’experte Linda Kalcher du groupe de réflexion Strategic Perspectives. « Elle sera scrutée de tous côtés. »

De nombreuses négociations similaires l’attendent si elle est confirmée à son poste par le Parlement européen.

Teresa Ribera devra participer au « Pacte pour une industrie propre », promis par Ursula von der Leyen dans les cent premiers jours de son mandat.

Avec son collègue Wopke Hoekstra, elle devra également négocier « l’objectif 2040 », pour lequel la Commission préconise une réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990.

Les députés européens de droite ont déjà prévenu qu’ils souhaitaient « discuter avec les parties prenantes pour voir si c’est faisable ».

 
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