Ils seront les « yeux et les oreilles » de Donald Trump. Trois acteurs ont été désignés jeudi 16 janvier « ambassadeurs à Hollywood » par l’homme politique américain qui reviendra à la présidence des Etats-Unis à partir de lundi. “J’ai l’honneur d’annoncer que Jon Voight, Mel Gibson et Sylvester Stallone seront des ambassadeurs spéciaux dans cet endroit majeur mais très turbulent qu’est Hollywood, en Californie”, a écrit le milliardaire sur son réseau Truth Social. républicain.
Selon lui, les trois acteurs, âgés respectivement de 69, 78 et 86 ans, serviront d'”émissaires spéciaux avec pour objectif de refaire d’Hollywood, qui a beaucoup perdu en quatre ans au profit des pays étrangers, un lieu plus grand, meilleur et plus fort qu’il ne l’a jamais été ! » tonne le futur locataire de la Maison Blanche, qui n’avait apparemment pas pris la peine de consulter les intéressés auparavant, Gibson ayant déclaré qu’il n’était pas au courant, mais qu’il répondrait à l’appel.
« Établissez votre position idéologique »
Le projet laisse dubitatifs de nombreux spécialistes du cinéma américain, parmi lesquels Matthieu Rostac, biographe de Mel Gibson (« Mel Gibson dans la brèche », éd. Caprici)qui souligne d’emblée que « Trump ne précise pas grand-chose dans son annonce. Ils seront mes yeux et mes oreillesmais qu’est-ce que ça veut dire ? Et à trois, il ne va pas parcourir grand chose… »
D’autant qu’il faut aussi relativiser le poids et la renommée des trois « ambassadeurs ». «Jon Voight (le père d’Angelina Jolie)on peut complètement y mettre un terme, il a 86 ans et surtout, n’a plus de carrière. Stallone est un peu plus consensuel, mais son dernier rôle notable qui lui vient à l’esprit est une apparition dans Gardiens de la Galaxie 3. Ou dans Roi de Tulsamais c’est une série. »
« C’est un républicain, un conservateur, mais il fait attention à ce qu’il dit. Ce que ne fait pas Mel Gibson, qui dit ce qu’il pense, dans une industrie où un seul mot peut faire couler un projet et coûter des millions. Gibson dispose certes d’un réseau à Hollywood, mais petit, loin d’être tentaculaire, qui fonctionne de manière isolée. Il s’est isolé au fil des années à cause de ses frasques (il a été reconnu coupable de violence domestique et a tenu des propos antisémites, pour lesquels il s’est excusé). En revanche, il a une aura, c’est sûr, même si ce n’est pas celle de Stallone. »
-Suffisant pour encore influencer les électeurs cinéphiles ? « Les Etats-Unis ont beaucoup changé ces dernières années », constate Matthieu Rostac. Nous avons vécu deux élections Trump, qui ont également radicalisé l’espace médiatique, et je pense qu’il y a maintenant une attirance pour des gens comme Mel Gibson, plus qu’avant, et que beaucoup commenceront à prendre ce qu’il dit comme un évangile. (l’acteur vient de tenir des propos complotistes à propos des incendies de Los Angeles, dans lesquels il a perdu sa maison). Je pense que c’est l’idée de Trump, d’établir sa position idéologique avec des gens qui ont une alchimie avec lui. »
« Trump se rêve peut-être en Reagan dans les années 1980 »
Mais la tâche sera difficile, Hollywood restant majoritairement démocrate. « Il existe un écosystème républicain à Hollywood, mais il est minuscule et affamé. Les gens qui tirent les ficelles à Hollywood sont démocrates, ou proches d’eux, ou apolitiques. Le seul auquel je pense qui est républicain et important en ce moment est Zack Snyder. (auteur de « 300 » ou « Watchmen »). Mais il est avant tout réalisateur, il ne produit que ses propres projets, il n’a pas de réelle influence. »
« L’industrie hollywoodienne est en pleine refonte, elle ne va pas très bien. Et je ne vois pas les trois acteurs intervenir là-dessus, souligne Matthieu Rostac. Trump veut avoir un grand impact, il sort quelques momies du placard, il annonce quelque chose et ensuite il voit si ça mord. »
Il ajoute : « Je spécule un peu, mais Trump se rêve peut-être en Ronald Reagan des années 80. Il veut, comme lui, utiliser le cinéma comme puissance douce américain et le faire rayonner à travers le monde. Mais Reagan était un ancien acteur, il avait entretenu des contacts à Hollywood, ce qui était bien différent à l’époque. C’est aussi ainsi que Stallone a pu émerger, et une franchise comme Rambototalement républicain, alors qu’au départ, le premier film ne cédait pas du tout à cela. »