(Séoul) Les enquêteurs sud-coréens ont tenté en vain vendredi d’arrêter le président déchu Yoon Suk-yeol à sa résidence de Séoul pour sa tentative ratée d’imposer la loi martiale le 3 décembre, empêchée d’arriver à ses fins par les gardes du corps présidentiels.
Hailey JO
Agence -
Pendant près de six heures, procureurs et agents du Senior Corruption Investigation Office (CIO), qui centralise l’enquête pour « rébellion » ouverte contre M. Yoon, sont restés à l’intérieur de la résidence présidentielle, dans les hauteurs du quartier chic de Hannam.
Ils sont finalement ressortis vers 13h30 (23h30 heure de l’Est), les mains vides.
“En ce qui concerne l’exécution du mandat d’arrêt aujourd’hui, il a été déterminé qu’elle était matériellement impossible en raison de l’impasse persistante”, a indiqué le CIO dans un communiqué.
« Les inquiétudes concernant la sécurité du personnel sur place ont conduit à la décision d’interrompre l’exécution », a-t-il ajouté.
Bloqué par des militaires
Un officier de l’état-major interarmées à Séoul a déclaré à l’AFP que l’équipe du CIO était “entrée en confrontation” avec des militaires sous les ordres des services de sécurité présidentiels. Ce dernier a de son côté indiqué à l’AFP avoir mené des “négociations” avec le CIO.
Les services de sécurité présidentielle, qui continuent de protéger M. Yoon en tant que chef de l’Etat par intérim, avaient déjà empêché plusieurs perquisitions menées par les enquêteurs au domicile de M. Yoon ces derniers jours.
Arrivées en toute hâte à la résidence présidentielle vendredi matin, l’équipe d’avocats de M. Yoon a une nouvelle fois dénoncé un mandat d’arrêt « illégal et invalide ».
Le CIO a jusqu’au 6 janvier pour exécuter le mandat d’arrêt émis mardi par un tribunal de Séoul à sa demande.
Une arrestation de Yoon Suk-yeol, qui reste officiellement chef de l’Etat et n’est suspendu que dans l’attente de la confirmation par la Cour constitutionnelle de sa destitution d’ici la mi-juin, serait sans précédent dans l’histoire de la Corée du Sud.
Évangélistes et YouTubeurs
Des centaines de partisans inconditionnels de M. Yoon, dont des YouTubeurs d’extrême droite bien connus et des prédicateurs chrétiens évangéliques, ont campé près de la résidence présidentielle dans la nuit de jeudi à vendredi, certains organisant des séances de prière toute la nuit.
-“Yoon Suk-yeol!” Yoon Suk-yeol ! » scandaient-ils en brandissant des bâtons lumineux rouges, surveillés en nombre par les forces de l’ordre.
“Nous sommes réunis ici aujourd’hui, prêts à risquer nos vies”, a déclaré Lee Hye-sook, 57 ans, accusant l’opposition de “tenter de transformer notre pays en un Etat socialiste semblable à la Corée du Nord”.
Quelque 2.700 policiers, selon l’agence sud-coréenne Yonhap, étaient déployés dans la zone, après des affrontements entre partisans et détracteurs du président déchu jeudi soir.
Yoon Suk-yeol a stupéfié la Corée du Sud dans la nuit du 3 au 4 décembre en imposant la loi martiale et en envoyant l’armée au Parlement pour tenter de le museler, un épisode qui a rappelé au pays les heures sombres de la dictature militaire.
Il a été contraint de faire marche arrière quelques heures plus tard, lorsque des députés ont réussi à entrer au Parlement et à adopter une motion exigeant la levée de la loi martiale, tandis que leurs collaborateurs bloquaient les portes de la chambre avec des meubles et que des milliers de manifestants pro-démocratie se rassemblaient à l’extérieur.
« Épave complète »
Vendredi, les procureurs ont inculpé de « rébellion » deux hauts responsables militaires, dont l’un a été brièvement nommé commandant de la loi martiale, a rapporté Yonhap. Tous deux sont en détention.
L’ancien procureur vedette de 64 ans n’a montré aucune contrition depuis sa destitution par le Parlement le 14 décembre, promettant même dans une lettre à ses partisans de « se battre jusqu’au bout ».
“Cela fait un mois que le pays est devenu un véritable désastre à cause de la déclaration illégale de la loi martiale le 3 décembre, mais le message de M. Yoon à ses partisans montre qu’il n’a pas le moindre sentiment de remords ou de responsabilité”, a déclaré vendredi dans un communiqué. éditorial du grand quotidien de droite Dong-A Ilbo.
« Le comportement du président Yoon, qui s’appuie sur ses partisans les plus extrémistes, est plus qu’embarrassant. Cela atteint des niveaux déplorables», ajoute le journal. La Corée du Nord, jusqu’ici avare de commentaires sur la crise politique chez son ennemi du Sud, a décrit vendredi une situation de “chaos” à Séoul.
“Un mandat d’arrêt a été émis contre le président, paralysant les affaires de l’Etat et aggravant le chaos social et politique”, écrit l’agence officielle KCNA.
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