De nombreux enfants des bidonvilles ont trouvé refuge dans les écoles de l’archipel. Une semaine plus tard, ces établissements ont remplacé certaines de leurs maisons détruites.
“C’était horrible, j’étais terrifié.” Lorsqu’on parle du cyclone Chido, la voix de Moulaida, 14 ans, se brise légèrement. La jeune fille semble très marquée par le cataclysme qui a balayé Mayotte samedi 14 décembre. Avec sa famille, Moulaida s’était rendue à l’école primaire de Koungou dès le déclenchement de l’alerte. Mais “Même dans les écoles, ça cassait les vitres et l’eau rentrait”se souvient l’écolière.
À Mayotte, de nombreux enfants ont été durement touchés par la catastrophe et une semaine plus tard, leur traumatisme est aigu. La population du 101e département est beaucoup plus jeune qu’ailleurs en France. Ici, l’âge moyen est de 23 ans, selon l’Insee, contre 41 ans en France. Une situation qui préoccupe l’Unicef. « Alors que près d’un habitant sur deux est un enfant, nous rappelons l’importance de placer les besoins des enfants au cœur des réponses d’urgence »prévient l’agence onusienne.
Dans ce quartier de Koungou, seules les écoles maternelles et élémentaires semblent avoir été épargnées. Il faut dire que l’imposant établissement blanc et jaune fait partie des rares bâtiments permanents. Ses grands bâtiments accueillent habituellement près de 900 étudiants. Mais depuis le cyclone, comme dans de nombreux autres groupes scolaires mahorais, des dizaines de familles y séjournent, en attendant de trouver un logement stable.
“C’est ici que nous dormons avec mes frères et ma mère”dit Moulaida en désignant les lits de camp qui ont remplacé les pupitres dans les salles de classe. Au mur, le tableau blanc, les tables de multiplication et les règles de conjugaison restaient accrochés. Les petits mots des élèves – « Je t’aime », « Mes amours » – sont toujours écrits au feutre. « Je vis dans les bidonvilles là-haut »explique l’écolière. Ses parents reconstruisent leur « banga », une de ces cabanes en tôle qui couvraient les collines environnantes et que Chido a fait sauter.
« Si j’avais des pouvoirs, j’aimerais que toutes les maisons s’élèvent et qu’il n’y ait plus de cyclones. »
Moulaida, 14 anssur franceinfo
Comme elle, de nombreux enfants rencontrés dans le quartier ont du mal à trouver les mots pour décrire le désastre qui s’est abattu sur leurs jeunes têtes.. «J’étais chez ma mère. Nous avons entendu un vent. Puis je suis allé dans ma chambre et j’ai entendu la porte claquer bruyamment. »dit Yanas, 12 ans. Le jeune garçon accompagne désormais sa mère pour aller chercher de l’eau potable aux éviers de l’école.
«J’ai été très choqué. De ma vie, je n’avais jamais vu ça. Le bidonville était entièrement à terre. Je pense beaucoup au cyclone. J’en parlerai à mes enfants.
Yanas, 12 anssur franceinfo
Avec l’arrivée des rafales de vent de l’océan, “on avait l’impression que les vagues montaient”dit Jasmine, 11 ans. «J’étais très stressé. J’ai pleuré”lâche la jeune fille, toujours émue. A ses côtés, Moulaida tente de la réconforter : “Nous sommes heureux parce que nous sommes vivants.” Pour faire face au traumatisme, une cellule d’urgence médico-psychologique a été mise en place par la préfecture de Mayotte.
Dans la cour de l’école, un Mahorais de 16 ans remplit des seaux d’eau et les place soigneusement dans sa brouette. Il vit aussi dans les hauteurs. Après quelques minutes de marche dans les allées boueuses et défoncées du bidonville, il désigne sa maison. Un gigantesque conteneur bleu atterrit dans sa chambre. « Si j’étais resté, je serais mort. Personne ne peut survivre à ça. »murmure l’adolescent. “C’est gravé et ça le restera toujours”commente sobrement le jeune garçon.
A quelques mètres de là, plusieurs enfants d’une dizaine d’années jouent dans les ruelles. Le cyclone a mis fin précipitamment aux cours. Mais la nouvelle est loin de les réjouir. « J’aimerais que l’école soit refaite et que les enfants puissent revenir étudier »réclame Younoussa, 10 ans. Tous les établissements ne pourront pas rouvrir comme prévu le 13 janvier, après les vacances de Noël, a reconnu Emmanuel Macron après une visite de deux jours. En attendant, le grand frère de Younoussa garde un oeil sur ses cahiers de mathématiques. “Comme tout est cassé, je l’aide, c’est mon petit frère”explique Wallas. Ils partagent tous la même peur, résumée par Moulaida : « Si le cyclone revient, il détruira à nouveau tout et nous repartirons de zéro. »
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