Les autorités sanitaires françaises ont rendu obligatoire, à partir du mercredi 10 décembre, la présentation d’une ordonnance en pharmacie pour recevoir huit fameux traitements anti-rhume largement considérés comme dangereux.
“Compte tenu des nombreuses contre-indications, des précautions d’emploi et des effets indésirables connus de la pseudoéphédrine et, d’autre part, du caractère bénin du rhume”, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) estime que “la possibilité d’obtenir ces médicaments sans avis médical, cela fait courir un trop grand risque aux patients», selon une décision révélée lundi 10 décembre.
“Nous demandons aux médecins prescripteurs d’évaluer soigneusement la balance bénéfice/risque pour chaque patient avant de prescrire un de ces médicaments”, a ajouté l’ANSM, dont la décision d’interdiction était attendue.
Sont concernés : Actifed Rhume, Actifed Rhume jour et nuit, Dolirhume Paracétamol et Pseudoéphédrine, Dolirhumepro Paracétamol Pseudoéphédrine et Doxylamine, Humex Rhume, Nurofen Rhume, Rhinadvil Rhume, Ibuprofène/Pseudoéphédrine, Rhinadvilcaps Rhume Ibuprofène/Pseudoéphédrine.
Ce que ces médicaments ont en commun, c’est qu’ils contiennent la molécule pseudoéphédrine.
Largement considérés comme dangereux pendant des années, les principaux traitements contre le rhume étaient encore en vente libre. A l’approche de l’hiver, les autorités sanitaires françaises envisagent de mettre enfin un terme à ce paradoxe.
Anciens avis
Disponibles sans ordonnance sous forme de comprimés, ces soins – également vendus en spray nasal sur ordonnance – visent à décongestionner et déboucher le nez. Ce sont donc les principaux médicaments utilisés contre le rhume.
Mais ils font l’objet de nombreuses critiques depuis plusieurs années, à commencer par celles de l’ANSM elle-même, car ils peuvent provoquer des effets secondaires graves comme des accidents vasculaires cérébraux et des crises cardiaques.
En 2023, l’agence a pour la première fois explicitement déconseillé leur utilisation. Cette décision avait un - fait baisser les ventes de traitements anti-rhume. Mais ceux-ci ont rebondi depuis septembre.
Des effets rares mais graves
« Les mesures de réduction des risques que nous avons mises en place, comme l’interdiction de la publicité auprès du grand public, l’information régulière sur les dangers liés aux vasoconstricteurs oraux, ainsi que la mise à disposition de documents pratiques à destination des patients et des pharmaciens, n’ont pas suffisamment réduit les risques. la population exposée au risque de survenue d’effets indésirables rares mais graves », écrit l’ANSM.
Pourquoi ces médicaments n’ont-ils pas été totalement interdits plus tôt ? Les autorités sanitaires françaises ont régulièrement expliqué avoir les mains liées par la réglementation européenne qui subordonne le retrait d’une autorisation à l’avis de l’Agence européenne du médicament (EMA). Elle a toutefois estimé l’année dernière que les traitements anti-rhume concernés ne présentaient pas suffisamment de risques pour les interdire, même si elle imposait de nouvelles contre-indications.
Cet avis s’explique par le fait que les effets secondaires graves restent très rares. Quelques-uns sont signalés chaque année et, en France, aucun décès n’a été signalé.
Mais les autorités françaises ont finalement tranché, estimant que le risque, même faible, était inacceptable compte tenu du caractère bénin de la maladie traitée : un simple rhume.
Cette position rejoint celle des principales sociétés savantes françaises (ORL, médecins généralistes, pharmaciens) qui toutes s’opposent à l’usage de ces médicaments.
Peur des pharmaciens
Cette décision risque cependant de froisser les pharmaciens, dont beaucoup de représentants estiment qu’une telle restriction réduit injustement la gamme de médicaments à proposer à leurs clients enrhumés, dans un contexte marqué par des difficultés récurrentes pour obtenir des rendez-vous médicaux.
« Cela va devenir compliqué pour nous de répondre aux problèmes des patients. Les gens n’auront plus de médecin et nous ne pourrons plus rien conseiller”, a déclaré le Quotidien du Pharmacien Béatrice Clairaz-Mahiou, co-présidente de la Société francophone des sciences pharmaceutiques (SFSPO).
Mais, pour d’autres observateurs, les autorités sanitaires ont au contraire déjà été trop lentes à réagir.
“Les soignants ont mieux à faire que de passer du - à déconseiller aux patients un médicament qui devrait être retiré du marché”, estimait la revue indépendante en début d’année. Prescrire.
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