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Au procès pour l’assassinat de Samuel Paty, jusqu’à 16 ans de réclusion criminelle requis contre les huit accusés

UN “une grande hétérogénéité dans les profils” de l’accusé, ce qui se traduit par une diversité de peines demandées. Alors que le procès pour l’assassinat de Samuel Paty entre dans sa septième semaine, lundi 16 décembre, le Parquet national antiterroriste (Pnat) a requis des peines allant de 18 mois de prison avec sursis à 16 ans de réclusion criminelle à l’encontre des huit accusés mis en cause, à des degrés divers, lors de la décapitation du professeur d’histoire-géographie, le 16 octobre 2020. L’auteur de l’attentat a été tué par la police le jour même. “Si Abdoullakh Anzorov était dans le box aujourd’hui, nul doute que nous aurions demandé la peine maximale”, a déclaré l’avocate générale Marine Valentin.

Dans quelle mesure les accusés étaient-ils au courant “son affaire mortelle” ? Y étaient-ils associés ? Les débats qui ont débuté le 4 novembre devraient permettre à la cour d’assises spéciale de Paris de trancher. De son côté, le parquet antiterroriste a choisi de requalifier les faits pour quatre accusés et de demander des peines bien inférieures à celles initialement encourues.

La peine la plus légère – 18 mois d’emprisonnement avec sursis probatoire de trois ans – est requise contre Priscilla Mangel, active dans la sphère jihadiste, « repliée sur ses convictions » et « retranchée derrière sa posture de victime ». Le public n’a pas permis « démontrer » qu’elle savait “l’engagement” du terroriste et « ses inclinaisons à mener des actions djihadistes ». Idem pour Yusuf Cinar, contre qui une peine d’un an de prison est requise pour « apologie publique du terrorisme au moyen de communication en ligne ».

En revanche, le Pnat a maintenu l’accusation d’« association de malfaiteurs terroriste » pour deux autres accusés issus de la sphère jihadiste. Ainsi, il a requis pour Louqmane Ingar une peine de 3 ans d’emprisonnement, dont 2 ans avec sursis probatoire, et pour Ismaïl Gamaev, seul accusé à reconnaître sa culpabilité, une peine de 5 ans d’emprisonnement, dont 18 mois avec sursis.

Il s’agit d’Azim Epsirkhanov, un Russe de 23 ans d’origine tchétchène, qui connaissait l’assassin depuis son enfance, “son meilleur ami”que la peine la plus lourde, soit 16 ans de prison pénale avec une période de sécurité des deux tiers, est requise. Contre le dernier membre du trio, Naïm Boudaoud, 22 ans, le parquet a requis une peine de 14 ans de réclusion criminelle assortie d’une période de sûreté aux deux tiers. Tous deux risquent cependant la réclusion à perpétuité, car ils ont été licenciés, à l’issue de l’enquête, pour « complicité de terrorisme ».

Toutefois, selon les avocats généraux, “Il n’est pas possible de démontrer qu’ils avaient connaissance de la nature précise de l’acte envisagé par Abdoullakh Anzorov.” Le procureur de la République a donc demandé à la cour d’assises spéciale de Paris de les condamner au chef d’« association de malfaiteurs terroriste », car« il est parfaitement établi qu’ils se sont volontairement associés à son entreprise meurtrière. » « Ils lui ont fourni les conditions matérielles pour mettre en œuvre [son projet d’attentat], tout en étant pleinement conscient de ses convictions djihadistes. Le fait qu’ils ne les partagent pas n’a aucune importance.a souligné l’avocate générale Marine Valentin.

En revanche, les magistrats antiterroristes ont souligné le rôle crucial de Brahim Chnina, le père de la collégienne à l’origine de la rumeur accusant Samuel Paty, et du prédicateur islamiste Abdelhakim Sefrioui, dans la vague de haine qui a précédé l’assassinat. . « La campagne numérique » que les deux accusés ont effectué « fait preuve d’une action concertée », a estimé le Pnat, qui a requis 10 ans de réclusion criminelle contre le premier et 12 ans contre le second, accompagnés dans les deux cas d’une période de sûreté des deux tiers.

“Personne n’a dit vouloir la mort de Samuel Paty, mais en allumant ainsi des milliers de mèches numériques, ils savaient que l’une d’elles allait conduire à des violences djihadistes contre le professeur blasphémateur”, estimé le deuxième avocat général, Nicolas Braconnay. Sollicitant leur condamnation, il a soumis deux possibilités au tribunal : « Soit vous considérez Abdoullakh Anzorov comme un patient imprévisible, enfermé dans ses délires, a-t-il déclaré. Soit vous comprenez que le geste qu’il a commis, celui de punir un blasphémateur, s’inscrit dans une logique délibérée, dans un mode opératoire identifié, un contexte défini dans lequel il y a un ciblage viral et violent d’un professeur. “

Dans les premiers mots de ce réquisitoire à deux voix, qui a duré un peu moins de six heures, le procureur général a parlé justement de la victime. “Samuel Paty n’était pas un martyr, pour quelque cause que ce soit, a-t-il déclaré. Il n’est pas mort en militant, il n’est pas mort en hussard noir de la République, mais en victime innocente d’un crime radicalement ignoble et absurde.» Nicolas Braconnay a souhaité revenir sur le point de départ de l’affaire : le contenu de l’enseignement dispensé par Samuel Paty, le 6 octobre 2020, et son attitude envers les étudiants. “C’était un parcours équilibré et pertinent, dénué de toute volonté de choquer”, il a rétabli.

Le procureur adjoint antiterroriste a également mis un point d’honneur à “tourner” vers “parents” de Samuel Paty, « écouté attentivement ». « Notre réquisitoire n’a pas vocation à plaire aux parties civiles. Mais l’exigence et l’effort d’argumentation qui sont les nôtres, font savoir aux parties civiles qu’ils s’adressent aussi à elles », a souligné le magistrat antiterroriste.

Un message qui n’est pas très bien passé : après la fin des réquisitions, les avocats des parties civiles ont exprimé leur étonnement face aux sanctions requises. “Ce sont des réquisitions scandaleuses” a réagi Virginie Le Roy, avocate des parents et Gaëlle Paty, une sœur de Samuel Paty, ajoutant : “La famille de Samuel Paty est choquée et en colère.” Francis Spziner, l’avocat du fils de Samuel Paty et de son ex-compagne, a ajouté : “Ces réquisitions ne rendent pas justice.” Le verdict est attendu en fin de semaine.

 
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