« Une heure en politique est une journée. Un jour est une semaine et une semaine est une éternité. »
C’est ainsi que la ministre fédérale Soraya Martinez Ferrada a répondu vendredi aux journalistes, qui lui posaient une question simple : serez-vous candidate à la mairie de Montréal ?
Traduction libre : oui-non-oui.
Sa réponse énigmatique correspond assez bien à la réalité. En réalité, du moins.
Il y a à peine une semaine, personne ne la considérait sérieusement comme candidate à la mairie. Certains noms circulaient, comme celui de l’ancien ministre libéral David Heurtel ou du président de Centraide Montréal, Claude Pinard. Mais pas le sien.
Depuis, tout le monde parle de Soraya Martinez Ferrada.
Ce qui s’est passé?
La députée libérale d’Hochelaga elle-même a allumé le feu des spéculations lundi dernier. Elle a prononcé un discours devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, qui avait toutes les allures d’une annonce de pré-campagne.
Dans son discours, elle a abordé les « défis » de la ville, comme le sans-abrisme. Mais aussi son caractère « innovant », « inclusif » et « résilient », et la force de ses industries comme l’intelligence artificielle.
La plateforme était idéale pour se positionner comme une éventuelle candidate « économique », en opposition à la mairesse sortante Valérie Plante, perçue comme moins favorable au milieu des affaires.
Beaucoup dans la salle ont salué ce discours comme le lancement officiel de sa campagne. Nous pouvons tout à fait les comprendre.
C’est grave alors ?
Selon plusieurs sources, Soraya Martinez Ferrada aurait un intérêt bien réel pour la mairie de Montréal. Mais aussi : une forme de conflit de loyauté.
Car en plus d’être députée fédérale, elle est coprésidente du comité de campagne nationale des libéraux de Justin Trudeau.
Comme des élections sont susceptibles d’être déclenchées dans les mois à venir à Ottawa, elle devrait « passer la rondelle » à un collègue, sans paraître abandonner le navire. Elle s’engage fermement à bloquer les troupes conservatrices de Pierre Poilievre. Dilemme.
Autre enjeu : quelle formation pourrait-elle suivre au niveau communal ?
Actuellement, le seul parti d’opposition bien en selle est Ensemble Montréal. Mais il traverse une grave crise de gouvernance, qui rebute plusieurs candidats potentiels.
Il reste que Mmoi Martinez Ferrada aurait plusieurs atouts pour se positionner comme une candidate crédible à la mairie, si elle décide de se présenter.
Il y a d’abord son histoire familiale. Née au Chili en 1972, arrivée à Hochelaga-Maisonneuve en 1980, elle incarne le visage d’une intégration réussie à la société québécoise.
Ce parcours pourrait trouver un écho auprès de la grande communauté latino de Montréal. Et sans doute parmi de nombreux autres électeurs issus de l’immigration, qui représentent une part croissante de l’électorat de l’île.
Son parcours professionnel lui permet également de cocher plusieurs cases.
Diplômée de HEC Montréal, la mère de deux enfants a travaillé dans le milieu communautaire au début des années 2000, entre autres à l’Éco-quartier Saint-Michel. Elle a occupé des postes de direction, notamment à la TOHU.
Elle possède également une expérience assez approfondie en politique municipale. Elle a été élue conseillère en 2005 dans le parti de Gérald Tremblay, avant de se joindre au parti de Louise Harel (Vision Montréal), puis de Marcel Côté (Coalition Montréal).
Sur la scène fédérale, elle a créé la surprise en remportant l’élection de 2019 dans Hochelaga, avec une courte majorité. Elle a été réélue en 2021.
Mais c’est surtout depuis un an que Soraya Martinez Ferrada a gagné en visibilité. Elle a rejoint le Conseil des ministres à l’été 2023, lors d’un remaniement opéré par Justin Trudeau. Elle est depuis ministre du Tourisme et ministre responsable de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec.
Bref, une histoire à suivre. Il serait surprenant qu’elle confirme (ou nie) quoi que ce soit avant le début de l’année prochaine.
Quoi qu’il en soit, le « buzz » qu’elle a créé au cours de la dernière semaine semble avoir ravivé l’intérêt pour la course à la mairie de Montréal.
Il faut dire que le - presse : le vote aura lieu dans moins de 11 mois, en novembre 2025.
Le parti d’opposition, Ensemble Montréal, est dans la tourmente. Il a dû reporter sa course à la direction. Elle cherche toujours à se restructurer. Quatre de ses neuf salariés ont été licenciés ou ont démissionné ces dernières semaines, dont son directeur général.
Les choses se préparent, selon mes sources, et les détails de la future campagne à la direction sont toujours attendus.
Du côté de Projet Montréal, le parti au pouvoir, la course à la succession de Valérie Plante est en bonne voie. La machine est bien huilée. Plusieurs ont déjà confirmé leur candidature, dont Luc Rabouin, maire du Plateau-Mont-Royal, et Gracia Kasoki Katahwa, mayor of Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce. Et la mairesse de Lachine, Maja Vodanovic, doit annoncer ce lundi qu’elle se lancera à son tour dans la course.
Le successeur de Valérie Plante à la tête du parti sera connu le 15 mars.
Désormais, la question qui fait de plus en plus parler en coulisses : verra-t-on naître un nouveau parti ? Une formation qui pourrait tenir tête à Projet Montréal et rassembler des candidats déçus par Ensemble Montréal ?
Probabilité : assez élevée.
Comme beaucoup de Montréalais, j’ai hâte de connaître les noms de ceux qui se lanceront dans l’aventure. Et surtout : entendre des idées et des propositions concrètes.
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