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Place aux lecteurs | Que mange-t-on avant de se coucher ?

Deux fois par mois, notre journaliste répond aux questions des lecteurs sur la santé et le bien-être.

Avec preuve scientifique, quel est le liquide à boire ou l’aliment à ingérer juste avant de se coucher, pour vous aider à dormir ?

Jean Pellerin, Montreal

On estime qu’un adulte sur quatre n’est pas satisfait de son sommeil. C’est beaucoup. Et c’est normal de vouloir tout mettre en œuvre pour l’améliorer.

Pour répondre à cette question, La presse a interviewé deux nutritionnistes et un neuropsychologue. Des deux côtés, nous soulignons d’abord ceci : le sommeil est influencé par plusieurs facteurs.

«Quand les humains ont un problème, par défaut, ils se demandent ce qu’ils peuvent ajouter», souligne la neuropsychologue Maude Bouchard, directrice de la recherche et du développement chez HALEO. Une méthode de relaxation ? Un supplément ? Un changement d’horaire ? «Mais en clinique, c’est souvent un ajout de choses qui va avoir un impact positif sur le sommeil», précise-t-elle.

Si vous recherchez la nourriture ou la boisson qui va changer la donne… vous pourriez être un peu déçu.

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PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Anne-Julie Tessier, professeure adjointe au département de nutrition de l’Université de Montréal

Il n’existe aucune preuve scientifique qui nous conseille de consommer un aliment ou une boisson en particulier avant de nous coucher pour mieux dormir.

Anne-Julie Tessier, professeure adjointe au département de nutrition de l’Université de Montréal

En matière d’alimentation, ce sont plutôt les habitudes à long terme qui jouent un rôle clé dans la qualité du sommeil, dit-elle. Des études suggèrent que suivre les recommandations d’une alimentation saine, ou manger plus de fruits et légumes pendant quelques mois, pourrait favoriser un meilleur sommeil (durée, qualité et insomnie), note la nutritionniste.

La glycémie pendant la nuit pourrait influencer la qualité du sommeil. « De manière occasionnelle, on peut donc privilégier un dîner avec des glucides complexes, comme les grains entiers et les légumineuses », indique Anne-Julie Tessier.

Voyage d’étude

Les premières études portant sur l’effet d’aliments spécifiques sur le sommeil remontent aux années 1970, avec le lait malté britannique Horlicks. Pas étonnant qu’ils se soient concentrés sur le lait, traditionnellement associé à l’endormissement en Occident. C’est même sous-entendu un passage de l’Ancien Testament (lorsque l’héroïne Yaël tue Sisera dans son sommeil après lui avoir servi un verre de lait).

Les scientifiques se sont intéressés à un composé spécifique du lait : le tryptophane, que l’on retrouve également dans les noix, les légumineuses, la volaille et le saumon, entre autres. « C’est un acide aminé essentiel que l’organisme utilise pour produire de la sérotonine, un neurotransmetteur qui favorise la relaxation et le bien-être, ainsi que de la mélatonine, une hormone clé dans la régulation du cycle veille-sommeil », explique Anne-Julie Tessier.

Les études sur le lait sont petites et limitées. L’une d’entre elles a montré qu’un verre de lait de 500 ml était insuffisant pour avoir un impact sur le taux sanguin de mélatonine… La consommation d’aliments riches en tryptophane (céréales enrichies, milkshakes) pourrait améliorer le sommeil, selon certaines données, mais « des recherches complémentaires permettront Il serait nécessaire de confirmer les effets de la consommation de ces aliments », indique Anne-Julie Tessier.

Des études similaires ont été réalisées sur le jus de cerise, le saumon, les noix et même… le kiwi. Le protocole testé ? Deux kiwis par jour, une heure avant de se coucher. L’étude chinoise, financée par le plus grand distributeur de kiwis au monde, n’a porté que sur 24 participants. «On est donc loin des faits établis», résume la nutritionniste Stéphanie Côté.

« Toutes les études se terminent par « ce sont des études préliminaires, et nous avons besoin de plus de recherches pour valider les résultats », souligne Stéphanie Côté. Bref, nous ne tenons rien pour acquis dans ce domaine. »

L’expérience kiwi vous tente ? Votre verre de lait chaud fait-il partie d’un rituel relaxant ?

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PHOTO FOURNIE PAR HALEO

Maude Bouchard, neuropsychologue, directrice de recherche et développement chez HALEO

Il n’y a aucun problème à utiliser des choses comme celle-ci, car cela fait partie d’une routine, et les routines vous aident à vous calmer, à vous déconnecter et à laisser le sommeil venir naturellement.

Maude Bouchard, neuropsychologue, directrice de recherche et développement chez HALEO

On se laisse aussi tenter par les tisanes (comme la fameuse camomille) ou encore par les compléments alimentaires en magnésium. «Quand on regarde la littérature scientifique, les preuves scientifiques sont plutôt minces, et c’est ça qui est ennuyeux», constate Maude Bouchard. Mais cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas les utiliser si cela nous fait du bien et si nous savons qu’ils n’ont pas d’effets négatifs. »

Du côté des suppléments, la mélatonine est utilisée pour aider les personnes ayant des horaires atypiques, et le fer peut améliorer le syndrome des jambes sans repos dans certains cas, note Maude Bouchard. « Cela vaut la peine de parler de vos symptômes à votre médecin », dit-elle.

Comportements à adopter (ou pas)

Les comportements alimentaires peuvent également avoir un impact sur le sommeil. On suggère par exemple d’attendre deux à trois heures après le dîner avant de se coucher pour que le corps puisse commencer à digérer.

« Une chose est sûre : si vous buvez du café tard dans la journée ou si vous mangez un repas très gras ou épicé le soir, cela peut nuire à votre sommeil », ajoute la nutritionniste Stéphanie Côté. Il en va de même pour l’alcool : mieux vaut s’en priver dans les heures qui précèdent le coucher, voire s’en passer complètement.

Une autre habitude qui nuit au sommeil ? Se lever au milieu de la nuit pour prendre un verre de lait, des céréales, un supplément, un somnifère…

«Le cerveau y voit une récompense, et il la voudra peut-être la nuit suivante», résume la neuropsychologue Maude Bouchard.

Traitement de première intention de l’insomnie, la thérapie cognitivo-comportementale de l’insomnie (CIBT) permet également de revoir les comportements et les pensées qui aggravent les problèmes de sommeil. « Et ces programmes ont été beaucoup étudiés », conclut Maude Bouchard.

 
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