Peut-on vraiment parler de « troisième guerre mondiale » aux yeux du droit international ?
Pour Olivier Corten, «il n’y a pas de véritable problème juridique à avoir cette opinion puisqu’il n’existe pas de concept juridique de guerre mondiale. Compte tenu de l’implication, d’une part, de la Corée du Nord et, d’autre part, des États occidentaux qui aident substantiellement l’Ukraine, Valeri Zalouzhny considère qu’il s’agit d’une Troisième Guerre mondiale. C’est son droit. Il n’y a pas de problèmes juridiques», explique le professeur à l’ULB.
Frédéric Dopagne va dans le même sens sur le plan juridique : «C’est une déclaration tonitruante. Légalement, en droit international, il n’y a pas de Troisième Guerre mondiale, ni de conflit international au-delà de l’Ukraine et de la Russie, et sans doute aussi au-delà de la Corée du Nord. Jusqu’à présent, il n’y a eu aucun conflit armé entre les États-Unis et les Européens contre la Russie. Même son de cloche pour le professeur de droit international et européen Pierre d’Argent, qui considère que cette déclaration est «un avis de gentleman, mais qui ne veut pas dire grand chose“, n’ayant aucune signification juridique.”C’est une déclaration un peu effrayante et je pense que nous allons faire tout notre possible pour empêcher la réalité de refléter cette déclaration, c’est tout.», indique Pierre d’Argent.
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Quels sont les critères pour affirmer une situation de « guerre mondiale » ?
« Il n’y a pas de critère particulier. Ce que dit le droit international, c’est dans quelles conditions une guerre peut commencer. » explique Olivier Corten. “Le problème est plutôt politique : jusqu’où veut-on aller à partir du moment où la Russie est une puissance nucléaire ? Légalement, il n’y a aucune limite au nombre d’États impliqués et à leur implication. Et si ce conflit était qualifié de « Guerre mondiale », qu’est-ce que cela changerait ? « Légalement, rien“, dit M. Corten.
La Pierre d’Argent coule dans le même sens. Il ajoute qu’aujourd’hui, « En droit international, il n’existe plus de déclaration de guerre. » Selon lui, « le critère de la guerre est un critère matériel de conflit armé entre les forces armées de deux Etats ».
Pour Frédéric Dopagne, cette notion de conflit armé n’est pas présente aujourd’hui entre les Etats-Unis et les Européens face à la Russie. “Le critère pour basculer dans un conflit armé n’est pas toujours tout à fait clair, il faut le reconnaître. Mais finalement, nous n’avons pas franchi le seuil», précise le professeur. “Il y aurait une implication militaire des États européens si, par exemple, des troupes étaient envoyées sur le terrain et participaient aux hostilités. Il y aurait également de la belligérance si des Européens, des Américains ou d’autres participaient à des combats aériens au-dessus de l’Ukraine, notamment en établissant une zone d’exclusion aérienne pour protéger l’Ukraine des attaques de missiles. Russes. Alors là, oui, il y aurait une implication militaire suffisante pour dire qu’il y a un conflit armé, mais nous n’en sommes pas du tout à ce stade.», ajoute-t-il.
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Qu’en est-il de l’implication des acteurs du côté russe ? Les trois experts conviennent que l’implication de la Corée du Nord et de la Biélorussie est interdite. Pyongyangne peut pas envoyer ses troupes pour aider à une guerre d’agression. Tout comme la Biélorussie n’a pas pu, dès le début, prêter son territoire à une guerre d’agression», explique Olivier Corten.
La parole d’un ancien commandant est-elle légitime pour affirmer cela ?
Pour Frédéric Dopagne, la légitimité de Valeri Zaloujny à tenir de telles déclarations peut être remise en cause : «Il a été licencié, il n’est plus aux commandes. C’est une déclaration plus personnelle qu’autre chose, mais elle a quand même un certain poids. Valeri Zalouzhny connaît la situation militaire, il était en première ligne lors de l’invasion de 2022, mais tout le monde sait qu’il ne représente pas la position officielle de l’Ukraine puisqu’il n’a plus de responsabilité.« .
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Est-ce une déclaration qui va changer le cours des choses ?
“Si j’ai bien compris, la volonté était de faire réagir les Occidentaux pour obtenir davantage d’aide pour mieux se préparer en prévision d’une escalade. Je comprends que Valeri Zaloujny nourrisse des ambitions présidentielles en Ukraine et qu’il puisse donc y avoir des arrière-pensées politiques.» estime Frédéric Dopagne. « Cette déclaration, isolée, je ne pense pas qu’elle changera la donne. Il y a aussi régulièrement des déclarations tonitruantes du côté russe avec beaucoup de menaces. Nous devons voir les actions« .
Olivier Corten explique que ces propos peuvent être vus comme un appel des Ukrainiens aux Occidentaux : «C’est une déclaration, c’est une position. Ce qu’il veut dire par là, je suppose, c’est « le conflit est déjà devenu mondial de toute façon, alors venez nous aider ». Je peux comprendre, dans la situation en Ukraine, que c’est ce qu’ils veulent, ce n’est pas illégal de vouloir cela. Si nous répondions positivement, nous ne violerions pas la loi. Cependant, ferions-nous quelque chose de approprié ? C’est autre chose« .
Sur la question de la poursuite du conflit, Pierre d’Argent affirme que l’Occident réfléchit au déploiement de troupes. “Je pense que ce qu’ils ont en tête, c’est de déployer des troupes au large des côtes de la Biélorussie. C’est quelque chose qui, je pense, est à l’étude en ce moment. Je ne suis ni secret, ni soldat, mais Emmanuel Macro l’avait évoqué il y a quelques mois. Je pense que nous y arrivons. Est-ce la Troisième Guerre mondiale ? Je ne pense pas. Je crois que les Européens feront tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter une confrontation directe avec la Russie.“
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