Sa grande œuvre reste la création en 1929, avec Lucien Febvre, de la revue « Annales d’histoire économique et sociale », fer de lance de l’école historiographique française. Longtemps considérée comme la revue d’histoire la plus prestigieuse, elle influencera de nombreux historiens à travers le monde.
Il est le fondateur de l’histoire des mentalités, des croyances, des modes de pensée. »
« Il est le fondateur de l’histoire des mentalités, des croyances, des modes de pensée », résume l’historien Julien Théry. Avec notamment son livre maître « Les Rois thaumaturges » (1924), il donne « à l’histoire un autre objet que les grands noms, les grands événements, les batailles ».
Ses méthodes pionnières permettent une approche nouvelle, avec « une Histoire qui s’intéresse aux profondeurs de la société » et capte l’homme sous tous ses aspects. “Cela préfigure Fernand Braudel” et son “Identité de la France”, ajoute Julien Théry.
Grand patriote
« Passionné de République » et grand patriote signataire du manifeste des intellectuels antifascistes dans les années 1930, ce juif athée, Poilu de la guerre 14/18, est de nouveau mobilisé en 1939. À sa demande, alors qu’il a 53 ans. , six enfants et souffre d’une polyarthrite débilitante. “Je suis le capitaine le plus âgé de l’armée française”, a-t-il déclaré.
Petit et mince, d’apparence distinguée, de fines lunettes d’intellectuels à monture intellectuelle, cet homme au départ parfois glacial a tiré de la débâcle de 1940 une œuvre sans concession, « L’étrange défaite ». Son œuvre la plus connue, publiée à titre posthume après la guerre et racontant de l’intérieur, de manière implacable, « l’effondrement le plus atroce de notre histoire ».
Né le 6 juillet 1886 à Lyon, Marc Bloch grandit à Paris où son père, également historien, enseignait l’histoire ancienne à la Sorbonne.
Marc Bloch n’avait confiance qu’en une seule idée, la République.»
Sa famille est juive, non pratiquante. « Marc Bloch n’avait confiance qu’en une seule idée, la République », souligne sa petite-fille, Suzette Bloch. Il a déclaré n’avoir revendiqué sa judéité que « dans un seul cas : devant un antisémite ».
Élève brillant, reçu à l’Ecole Normale Supérieure, il obtient l’agrégation d’histoire-géographie et enseigne au lycée.
Après la guerre, où il se distingue (Légion d’honneur et Croix de guerre avec quatre citations), il épouse Simonne Vidal, fille d’un polytechnicien, avec qui il aura six enfants. Il est nommé professeur à l’Université de Strasbourg puis, en 1936, à la Sorbonne.
En 1940, avec les lois antijuives de Vichy, il est exclu de l’enseignement avant d’être temporairement réintégré.
C’en est fini lorsque les Allemands envahissent la zone libre en novembre 1942. Avec sa famille, il se réfugie dans la maison familiale en Creuse avant de choisir à nouveau la France qu’il aime tant.
“La France, dont certains comploteraient pour m’expulser […] restera, quoi qu’il arrive, la patrie dont je ne peux pas arracher mon cœur », a-t-il écrit.
Interné, torturé puis exécuté
Il entre dans la Résistance, se plonge dans la vie clandestine à Lyon et rejoint le mouvement des Francs-Tireurs.
Sous le pseudonyme de « Chevreuse », puis « Arpajon » et « Narbonne », il forme les Comités de Libération de la région. Il est arrêté le 8 mars 1944, interné à la prison de Montluc et torturé pendant des jours.
En captivité, il redevient professeur et instruit ses camarades d’infortune. « Si je m’évade, je reprendrai mes cours », leur a-t-il confié.
« Il y a deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France », résumait-il dans « L’étrange défaite », « ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la Journée de la Fédération.
Il fut finalement fusillé par la Gestapo le soir du 16 juin 1944 dans un champ broussailleux près de Lyon. Exécuté avec une mitrailleuse dans le dos. Avec 29 autres camarades, torturés par groupes de quatre.
Ses cendres furent transférées en 1977 au caveau familial du cimetière du Bourg-d’Hem (Creuse).
Related News :