(Ottawa) Le Canada perd 35 % de ses immigrants francophones, une tendance particulièrement marquée au Québec et en Ontario, conclut le Conference Board du Canada dans un rapport publié mardi.
Publié à 11h06
Mis à jour à 12h33
Émilie Bergeron
La Presse Canadienne
L’étude, commandée par l’Institut pour la citoyenneté canadienne, constate cette proportion de départs sur le long terme.
Toutefois, c’est au cours de leurs cinq premières années de résidence permanente au Canada que les nouveaux arrivants sont les plus susceptibles de partir, qu’ils soient francophones ou non. Pour les immigrants de langue maternelle française, ce sont les deux premières années qui sont décisives.
Il est impératif d’agir de toute urgence pour que ces premières années […] sont excellents. Autrement, nos données indiquent qu’ils sont très à l’aise pour explorer d’autres options.
Daniel Bernhard, PDG de l’Institut pour la citoyenneté canadienne, lors d’un point de presse
Le fait que l’exode des francophones soit plus marqué au Québec n’étonne pas les auteurs du rapport, puisque c’est « la province qui accueille le plus grand nombre d’immigrants francophones ».
La moitié des nouveaux arrivants francophones quittant le Canada résident au Québec, selon l’analyse.
«Un francophone qui part n’est pas un francophone qui contribue au caractère français du Québec», a ajouté M. Bernhard.
Selon lui, les données recueillies suggèrent que la seule maîtrise du français est loin d’être la seule raison pour laquelle un immigrant déciderait de rester définitivement ou non au Québec. Ainsi, les défis de l’accès au logement ainsi que de l’intégration à travers un tissu social et un réseau de collègues pèsent également dans la balance, a-t-il donné en exemple.
Le phénomène d’exode des immigrants francophones est plus surprenant en Ontario, selon le Conference Board du Canada. « Le taux cumulatif de migration ultérieure des francophones est élevé comparativement à la plus faible proportion d’immigrants francophones qui s’y établissent. Cela signifie que l’Ontario a du mal à retenir les immigrants francophones au même rythme que les immigrants s’y installent », peut-on lire.
Ainsi, les auteurs du rapport estiment que, sans une meilleure capacité de rétention, les objectifs du Canada d’augmenter la proportion d’immigrants francophones hors Québec pourraient être difficiles à atteindre.
« On parle toujours du nombre [de ceux] qui viennent. J’espère qu’avec ces données, nous parlerons également davantage du nombre [de ceux] qui restent », a soutenu M. Bernhard.
Ottawa a annoncé le mois dernier qu’il augmenterait ses cibles d’immigration francophone hors Québec à 8,5 % en 2025, 9,5 % en 2026 et 10 % en 2027, soit une augmentation de 1,5 point pour les deux premières années et une nouvelle cible pour la troisième.
La Fédération des communautés francophones et acadiennes réclame que la cible soit fixée à 12 %, qu’elle considère comme « le minimum » afin de restaurer et faire progresser le poids démographique des francophones.
« Une étude plus approfondie de la situation dans les provinces qui ont une part importante d’immigration francophone, mais où la migration ultérieure des francophones est absente ou faible [c’est-à-dire, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick] mettrait en valeur des pratiques exemplaires favorisant le développement de communautés francophones accueillantes », estime le Conference Board.
Chez les nouveaux arrivants francophones, anglophones et allophones, le taux d’exil est plus élevé chez les immigrants économiques, et particulièrement chez ceux qui étaient étudiants étrangers avant d’obtenir leur résidence permanente.
M. Bernhard croit qu’Ottawa devrait envisager de fixer des objectifs de rétention des immigrants. Le gouvernement pourrait les dévoiler chaque année, en même temps qu’il publierait ses niveaux fixés pour l’accueil de nouvelles personnes dans chaque programme d’immigration.
Le PDG de l’Institut pour la citoyenneté canadienne déplore que le Canada soit incapable de retenir les talents et les immigrants « triés sur le volet » pour leurs compétences.
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