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Pensée magique | La presse

Face à l’avalanche d’analyses désastreuses commentant la victoire de Donald Trump, on peut comprendre que certains Canadiens cherchaient une bouée, un rayon de soleil, n’importe quoi pour les détourner du retour imminent des cavaliers de l’Apocalypse.

N’écoutant que son courage, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, a endossé le rôle de « rassurante en chef ». Empruntant maladroitement une expression rappelant des années d’enfer, Mmoi Freeland a tenté de calmer le jeu en disant « tout ira bien ». Le bureau du premier ministre Trudeau – dans un effort similaire pour apaiser – a rendu public le contenu de l’entrevue qu’il a eue avec le président Trump la semaine dernière. Les échanges ont été qualifiés de « chaleureux » et « courtois » et M. Trump a même fait l’éloge de Pierre Elliott Trudeau lorsque le premier ministre lui a rappelé que son père avait lui aussi connu un retour triomphal.

Connaissant la série d’échecs du gouvernement Trudeau avec Trump 1.0, il faut une confiance aveugle (ou une carte de membre du Parti libéral du Canada) pour penser pendant 30 secondes que nous sommes entre de bonnes mains.

Je parie que Sam Pollock, légendaire directeur général des Canadiens de Montréal, était « chaleureux » lorsqu’il appelait ses pairs pour discuter des échanges.

Et il a probablement fait l’éloge de toute la famille de Charles Finley, des Golden Seals de Californie, lorsqu’il a cédé Ernie Hicke en mai 1970 pour le premier choix du repêchage de 1971 (Guy Lafleur). La naïveté dont dégage encore M. Trudeau et son entourage nous fait craindre le pire.

Les exemples d’incompétence entre 2016 et 2020 sont nombreux et je redoute l’idée de les décliner. En grande partie parce que la même équipe est toujours en place au Canada, une équipe qui n’a jamais été capable d’interpréter les signaux ni d’identifier les bons influenceurs.

Lorsque M. Trump a lancé sa première campagne présidentielle en juin 2015, on se souviendra du ton colérique réservé au Mexique. Il allait construire un mur entre les deux pays pour empêcher les Mexicains d’expatrier leurs voyous aux États-Unis – il a même suggéré que plusieurs immigrants mexicains étaient des violeurs. Aujourd’hui, une déclaration similaire ne surprendrait personne. Mais il y a neuf ans, elle avait choqué toute la classe politique.

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PHOTO TRAVIS DOVE, ARCHIVES DU NEW YORK TIMES

Le président Trump lors d’un événement de campagne en Caroline du Sud en 2015

Lors des primaires républicaines et de l’élection présidentielle de 2016, on a beaucoup parlé de ce mur et du Mexique. Lorsque M. Trump a menacé de renégocier les termes de l’accord de libre-échange avec le Mexique et le Canada, il visait principalement le Mexique – il avait à peine parlé du Canada pendant la campagne. Mais M. Trudeau, imprudemment, a choisi de s’associer publiquement aux Mexicains pour former un front uni contre M. Trump, épousant du même coup un adage peu connu du grand public (l’ennemi de mon meilleur ami est aussi mon ami…) ).

En voyant soudain deux cibles plutôt qu’une, le président Trump a salivé.

S’en est suivi une série de mirages et de gestes tape-à-l’œil destinés à donner aux Canadiens l’impression que le gouvernement Trudeau avait le contrôle total. À commencer par le limogeage de Stéphane Dion aux Affaires étrangères le 10 janvier 2017, quelques jours avant l’arrivée de M. Trump à la Maison Blanche. On craignait que M. Dion, un homme politique cérébral avec 20 ans d’expérience, ne soit un mauvais casting pour traiter avec le clan Trump. Il succède alors à Mmoi Freeland, une recrue politique de l’aile gauche du parti.

Lors d’une sortie très médiatisée quelques mois plus tard, M. Trudeau a invité Ivanka Trump à la première d’une pièce de Broadway. Il a été laissé entendre que le théâtre n’était pas le seul sujet à l’ordre du jour. Et M. Trudeau a même recruté Brian Mulroney, l’architecte du libre-échange entre le Canada et les États-Unis, dans l’espoir de faire entendre raison au président Trump. Parfois, on se croyait sur le tournage de L’homme qui murmurait aux oreilles des chevaux.

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PHOTO RYAN REMIORZ, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Justin Trudeau s’adresse à la foule avant la première de la comédie musicale Viens de loinà laquelle il a invité Ivanka Trump en 2017.

L’accord de libre-échange a été renégocié et les libéraux fédéraux nous ont demandé de croire qu’ils étaient d’habiles négociateurs.

Mais le déclin pour le Canada a été substantiel, notamment en ce qui concerne la gestion de l’offre, où les produits laitiers américains ont obtenu des droits d’accès importants.

Il faut espérer qu’à court terme, le Canada demeure loin sur la liste des priorités de M. Trump. À ma connaissance, hormis cette menace d’imposer des droits de 10 % sur tous les produits importés aux États-Unis, il n’y a pas de différend particulier avec le Canada.

Les Canadiens se rendront aux urnes d’ici octobre prochain et la question des relations canado-américaines sera probablement débattue. Si les électeurs choisissent de ramener M. Trudeau au pouvoir, c’est leur droit. Mais dans le cas très probable où ils choisiraient une autre voie, il serait utile que M. Trudeau et son équipe ne prennent pas de mesures qui pourraient nuire au nouveau gouvernement. Restons chaleureux et courtois, mais évitons les effets toge.

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