News Day FR

«Si les États-Unis ne veulent pas que la Belgique retire ses F-35, ils resteront cloués au sol. Il faut comprendre cela »

La victoire de Donald Trump est une opportunité à saisir pour l’Europe et l’industrie de Défense…

Oui, il faut le saisir. Si l’arrivée de Donald Trump nous avait surpris en 2016, il faut aujourd’hui pouvoir réagir. Et attendez-vous à ce que les États-Unis se désengagent progressivement, voire brusquement, de l’Europe. Cela obligera les Européens à assumer la responsabilité de leur propre sécurité.

mouette

« Si l’Europe reste trop lente, nous aurons la Troisième Guerre mondiale avant d’arriver à une défense européenne. »

L’industrie de la Défense va devoir se réveiller. Les États-Unis dépensent chaque année plus de 900 milliards de dollars pour la défense. L’UE, c’est 240 milliards d’euros. Serons-nous capables de suivre le rythme en cas de baisse du soutien à l’Ukraine ?

L’enjeu n’est pas de dépenser autant que les USA. Ils ont un rôle mondial, en mer de Chine, au Moyen-Orient, etc. Mais nous devons pouvoir sécuriser notre continent sans l’aide des États-Unis. 240 milliards, c’est bien, mais ces dépenses sont fragmentées entre États non coordonnés. Il faut devenir plus interopérables (pour que les systèmes d’armes puissent travailler ensemble, avec entre autres des échanges potentiels de connaissances et de technologies, NDLR), que développer une défense européenne. Rester au niveau national ne sert à rien.

«C’est le paradoxe. Ceux qui ont voté pour Donald Trump seront les premières victimes de sa politique économique.»

On parle beaucoup dans ce sens. Et quelques milliards mis sur la table. Mais concrètement, l’Allemagne achète toujours aux USA, il y a des dissensions entre la et l’Allemagne… Peut-on parvenir ne serait-ce qu’à une industrie de défense européenne ?

C’est là que nous devons changer de vitesse. Si nous avons pu accepter la déstabilisation de l’Europe après l’élection de Trump en 2016, nous ne pouvons aujourd’hui plus l’accepter. Il va falloir réagir. Les Européens sont divisés mais parviennent à mettre en œuvre une politique de défense sans précédent, avec des budgets encore limités. Nous devons maintenant trouver des fonds au niveau européen et renforcer ces programmes. Seul, même un pays comme la France ou le Royaume-Uni ne pourrait pas suivre le rythme de la Russie, de la Chine et des défis d’aujourd’hui.

Un soutien financier à long terme est nécessaire pour développer l’industrie…

Le défi est de savoir comment financer cela. On pourrait utiliser un fonds de relance, un prêt. On évoque le chiffre de 500 milliards sur 7 ans. On pourrait taxer certains super profits, etc. Il est possible de trouver de l’argent…

Le dialogue est-il possible entre les pays qui souhaitent maintenir leurs industries chez eux ?

C’est tout le défi. Les États membres veulent conserver leur souveraineté mais se rendent compte qu’ils n’ont plus la taille et la masse nécessaires pour être compétitifs. Cela dit, avec l’élection de Donald Trump, il faudra se rendre à l’évidence : s’il y a une chose que la guerre en Ukraine nous enseigne, c’est que nous devons être souverains sur les armes dont nous disposons. . Les pays d’Europe de l’Est ne voulaient pas rompre leurs liens avec les États-Unis dans le passé, mais ils constatent que les États-Unis traînent désormais les pieds dans leur soutien à l’Ukraine et dans l’imposition de restrictions sur l’utilisation de leurs armes. Pouvez-vous imaginer que les Polonais soient obligés d’appeler Donald Trump pour qu’il utilise les armes américaines qu’ils ont achetées pour se défendre contre la Russie ? Non… je pense que ça va changer de ce côté.

mouette

« S’il y a une chose que la guerre en Ukraine nous enseigne, c’est que nous devons être souverains sur les armes dont nous disposons »

Ne l’a-t-on pas déjà dit en 2022, lors de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ? N’oublie-t-on pas trop vite les crises ?

En fait, il ne faut pas s’attendre à une révolution. L’UE ne fait pas une révolution, elle avance à petits pas. Probablement trop lentement. Et si l’Europe reste trop lente, nous connaîtrons la troisième guerre mondiale avant d’arriver à une défense européenne. Ce serait stupide. Mais il y a néanmoins une prise de conscience depuis 2016.

« Ses premiers investissements ont été plutôt ratés » : d’où vient la fortune de Donald Trump ?

Est-ce finançable ?

Tous les États européens sont endettés. Il ne s’agit pas seulement de la Belgique ou de la France. Les États ne réussiront pas seuls. Il faut prendre conscience et abandonner un certain repli sur soi et ce souverainisme « national ». Cela demande de l’ambition et du courage.

Réduire la souveraineté au niveau national mais la garantir au niveau européen…

Justement, il ne faut pas le réduire mais le transférer. De toute façon, la souveraineté nationale n’existe plus depuis longtemps, nous ne sommes plus compétitifs. Nous avons besoin de la souveraineté européenne.

Il existe déjà des liens entre les industries et les armées françaises et belges.

La Défense belge a l’inconvénient de dépenser moins que les autres pays européens en pourcentage du PIB mais a l’avantage d’avoir initié une coopération beaucoup plus développée avec ses voisins. Les Belges sont en avance et sont un exemple à cet égard. Il faut intégrer.

« Mon fils a été tué par le virus Woke Mind » : les moments charnières de la transformation d’Elon Musk depuis le rachat de Twitter

L’achat des États-Unis ne pourrait-il pas poser problème, comme le choix belge d’acheter le F-35 américain ? Nous sommes trop dépendants des États-Unis, en termes de missiles, d’avions, de systèmes de communication…

Nous sommes complètement à la merci des États-Unis. Notre défense est assurée par les États-Unis et le parapluie nucléaire. Et si les États-Unis ne veulent pas que la Belgique retire ses F-35, ils resteront cloués au sol. Vous devez comprendre cela. Par exemple, les Français seraient probablement favorables à ce que les Ukrainiens utilisent le Scalp pour mener des frappes en profondeur contre la Russie. Mais les États-Unis ne veulent pas et peuvent l’interdire, en raison des composants américains présents dans ces missiles. Il faut avoir l’autorisation de Donald Trump…

Regardez l’interview complète dans la vidéo ci-dessus, tirée de Mag Eco, l’émission économique hebdomadaire, diffusée pour la première fois chaque jeudi sur LN24.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :