Il s’agit bien plus qu’un simple remaniement… c’est l’implosion de la coalition gouvernementale tripartite allemande.
Dans la soirée du mercredi 6 novembre, le chancelier Olaf Scholz a demandé au président Steinmeier de limoger le ministre des Finances. Ce dernier, membre du parti libéral FDP, s’opposait ouvertement à la chancelière depuis des mois. Il a également été remplacé par un proche conseiller d’Olaf Scholz.
Un seul des ministres libéraux a décidé de rester au gouvernement, le ministre des Transports, mais il a annoncé vouloir quitter le parti FDP.
Comment les trois partis au pouvoir – SPD, FDP et Verts – ont-ils rompu leur alliance gouvernementale ?
Le président allemand peut exhorter les dirigeants politiques à la “raison” et à la “responsabilité”, mais Frank-Walter Steinmeier lui-même l’a dit dans son discours de ce matin (24.11.07) : “le pays a besoin de majorités stables et d’un gouvernement efficace”. D’où la convocation, attendue prochainement, d’élections législatives anticipées.
Référence du ministre des Finances
Le chancelier Olaf Scholz n’a pas caché sa frustration dans son discours à la nation mercredi soir, dont nous rapportons un extrait concernant le limogeage du ministre des Finances du FDP Christian Lindner :
«Trop souvent, les compromis nécessaires ont été étouffés par des querelles publiques et de fortes revendications idéologiques. Le ministre fédéral Lindner a trop souvent bloqué des lois de manière inappropriée. Il s’est trop souvent livré à de mesquines tactiques partisanes. Trop souvent, il a trahi ma confiance.
Une coalition trop hétérogène
Les trois partis constitutifs – les sociaux-démocrates du SPD, du FDP et des Verts – n’ont réussi à surmonter leurs divergences programmatiques que pour un temps.
Cependant, les projets de la coalition étaient initialement ambitieux pour trois partis idéologiquement éloignés sur le papier : l’Allemagne devait devenir un modèle en matière de protection du climat, 400 000 nouvelles maisons devaient être construites.
Il fallait moderniser l’État tout en conservant un caractère social : il fallait transformer l’aide aux chômeurs en un “revenu citoyen”, instaurer une protection de base pour les enfants, stabiliser le niveau des pensions, stabiliser le revenu minimum. augmenté, tout en investissant dans la science et la recherche.
Pour célébrer leur nouvelle alliance, les ministres écologistes et libéraux ont publié, en septembre 2021, un selfie de groupe sur tous leurs comptes Instagram simultanément, accompagné de la légende suivante : « Dans la recherche d’un nouveau gouvernement, nous recherchons des points communs et des ponts pour dépasser ce qui nous sépare. Et nous les trouvons. Quel moment d’émotion.
A l’époque, les trois partis avaient qualifié les négociations d’« enrichissantes » car centrées sur des points de vue différents et des divergences idéologiques. Ils affirment que « les contraires se complètent ».
Le chancelier Olaf Scholz (SPD) vante une « coalition d’égaux ».
Mais des différences fondamentales réapparaissent rapidement.
Protection sociale, politique d’asile, dépenses publiques, ventes d’armes… de nombreux sujets sont devenus sources de discorde et les citoyens allemands ont immédiatement eu l’impression que le gouvernement passait plus de temps à discuter qu’à prendre des décisions.
Argent : où est le problème
La finance, la politique sociale et énergétique ont cristallisé leurs différences. Les libéraux soutiennent l’austérité et le contrôle des dépenses publiques, tandis que les Verts et les sociaux-démocrates espèrent intervenir davantage sur les questions sociales, notamment le logement et la transition énergétique.
Fin 2023, la Cour constitutionnelle a estimé qu’il n’était pas conforme à la Loi fondamentale que le gouvernement décide d’utiliser les 60 milliards d’euros initialement prévus pour la lutte contre la pandémie de Covid-19 pour les réaffecter à la politique énergétique.
Ce verdict a empêché le SPD et les Verts d’injecter ces milliards « excédentaires » dans la protection du climat sans avoir à rogner sur le budget fédéral. Les finances étaient en fait gardées au sein du gouvernement par le ministre FDP démis, Christian Lindner, parcimonieux en matière de dépenses publiques et hostile à l’augmentation de la dette de l’État.
Crises mondiales
Et puis il y a eu les crises exceptionnelles qui se sont accumulées au cours de ce mandat : fin de la pandémie de Covid-19, invasion de l’Ukraine par la Russie, suspension des livraisons de gaz et de pétrole russes, menace de crise énergétique, inflation.
Depuis des années, le ver est resté dans les fruits et cet éclatement de la coalition n’a rien de surprenant.
Ces derniers mois, le conflit a pris le pas sur le débat politique, au point que la coalition SPD, Verts et FDP est devenue le gouvernement le plus impopulaire de toute l’histoire de la République fédérale.
Le désenchantement des citoyens s’est déjà reflété dans les urnes lors des dernières élections régionales à l’Est.
Les espoirs de Friedrich Merz (CDU)
L’opposition conservatrice, dirigée par Friedrich Merz au sein de la CDU, espère que son leader sera le prochain chancelier. Il demande à Olaf Scholz de poser la question de confiance au Parlement au plus tard “la semaine prochaine”.
Le 15 janvier, les parlementaires voteront la défiance envers le gouvernement sortant, qui ne dispose plus de la majorité pour approuver ses propositions législatives. La voie serait donc pavée pour l’organisation d’élections législatives anticipées en mars 2025.
D’ici là, le gouvernement Scholz continuera à s’occuper des affaires courantes.
Malgré ces nouvelles incertitudes, le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, se dit confiant dans la politique de défense et la politique étrangère allemande.
Selon lui, l’Allemagne pourra continuer à jouer pleinement « son rôle sur la scène internationale ».
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