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“Chaque jour, l’islamisme radical met à mal les écoles”, affirme la sœur de Samuel Paty

Quatre ans après la décapitation de votre frère par un terroriste islamiste, vous publiez « Le cours de Monsieur Paty » chez Albin Michel. Ce livre contient l’ensemble des slides ayant servi de support à son cours. Pourquoi est-ce important ?

C’est au nom de ce fameux cours qu’il fut tué. Il fallait montrer que ce cours n’était en rien « islamophobe » et que tous les moyens utilisés provenaient de l’Éducation nationale. Dans son parcours, mon frère entendait rapprocher liberté d’expression et liberté de conscience. C’est pourquoi il a proposé à tous les étudiants de voir ou non les caricatures de Charlie Hebdo. Il ne l’a pas imposé.

Ce n’était donc pas un cours activiste ?

En aucun cas. Le lendemain, il répond à la mère d’un élève bouleversé en sortant de cours. Il lui explique que sa fille ne doit pas venir en classe en tant qu’athée, comme elle le craignait, mais en tant que laïque. Qu’elle ne doit donc pas laisser sa foi à la porte, contrairement aux enseignes ostentatoires qui ne doivent pas entrer dans un établissement scolaire.

Ce même jour naissait la cabale qui allait conduire à la mort de Samuel Paty. Dans cette spirale fatale, on retrouve une écolière qui ment, son père qui relaie ses propos, un agitateur islamiste qui leur donne encore plus de résonance. Et un terroriste radicalisé qui ne faisait aucun bruit…

Ceux qui commettent cet acte tentent délibérément de rester le moins visibles possible afin de pouvoir mener à bien leurs projets macabres. Mais le terme « loups solitaires » est un terme inapproprié. Il y a, autour d’eux, une poignée de protagonistes qui mettent de l’huile sur le feu ou peuvent les aider avec une certaine forme de logistique.

Votre frère vous a-t-il parlé des menaces qu’il a reçues suite à son cours ?

Non, il n’a contacté personne dans ma famille. A cette époque, notre père était hospitalisé. Nous essayions tous de ne pas apporter de soucis supplémentaires. Et puis, à plusieurs moments, on a fait croire à mon frère que la situation était sous contrôle. Ce qui ne l’a pas empêché d’être inquiet, au point de porter un marteau dans son sac à dos le jour de sa mort.

Vous avez reconstitué la chronologie de ses onze derniers jours. A la fin de cette enquête, à qui reprochez-vous le plus ?

La réponse est compliquée. D’abord, bien sûr, à l’agresseur (Abdullakh Anzorov, abattu peu après l’assassinat par des policiers, NDLR). Puis à tous ceux qui gravitaient autour de lui et lui permettaient d’agir. Mais ce qu’il est fondamental de comprendre, c’est que lorsque l’on reste inactif face au mal, ce dernier finit toujours par gagner. À un moment donné, il faudra étudier précisément l’accumulation de fautes qui a conduit à la mort de mon frère. Si nous ne le faisons pas, il y aura inévitablement une récidive. La réplique tragique de la mort de Dominique Bernard le prouve.

Est-ce pour cela que vous avez décidé d’attaquer l’État ?

Oui, et parce que beaucoup de mes questions restent sans réponse. Ce que j’attends, en quelque sorte, c’est de recevoir la version exponentielle de mon livre.

Depuis l’attentat, qu’avons-nous appris collectivement ?

En quatre ans, les choses n’ont pratiquement pas changé. Certes, on observe une certaine forme de réactivité, avec des ministres qui se déplacent lorsque des incidents sont signalés. Mais alors que se passe-t-il réellement ? J’ai été interviewé au Sénat en 2023. Six mois plus tard, un rapport accablant était publié soulignant la « terrible solitude » des enseignants et montrant à quel point ils sont menacés. Personne, à l’heure actuelle, n’en a pris possession pour y faire adopter des mesures correctrices. Nous ne sommes toujours pas suffisamment armés pour répondre à cette menace islamiste qui gangrène les écoles.

Même si les statistiques s’améliorent cette année ?

Je ne suis pas sûr que tous les faits soient rapportés. D’après les nombreux contacts que j’ai dans le monde de l’enseignement, le « sans vagues » est toujours à l’œuvre.

Quel professeur était ton frère ?

Il était passionné par son travail. Il passait des heures à préparer ses cours, avec une grande rigueur. Il était convaincu que ce métier d’enseignant est le plus important car il permet d’élever des enfants. Que c’est par l’école qu’on peut s’émanciper.

Ce sont des messages symboliques importants. Cela invite chacun à œuvrer pour que cet événement tragique ne se reproduise plus.

Dans votre livre, vous évoquez les anciens collégiens condamnés, en décembre 2023, pour avoir guidé le terroriste. Vous signalez que l’un d’eux a accepté votre invitation à témoigner à vos côtés dans les collèges. Cela aurait-il pu être fait ?

Ce jeune n’est devenu adulte que cette année et il purge toujours sa peine. Pour le moment, cela n’est donc pas possible. Je pense d’ailleurs qu’il lui reste encore à travailler à la maturation de tous ces événements. J’espère en effet, comme il l’a annoncé au procès, qu’il viendra un jour dans un établissement pour expliquer pourquoi, à un moment donné, on peut faire le mauvais choix.

Après le procès des mineurs, le procès des adultes débutera en novembre. Qu’attendez-vous ?

Des actes d’accusation, pas grand-chose. Je ne suis pas sûr que leurs témoignages éclairent la réalité des événements. Mais ce que j’attends de la justice, c’est qu’elle soit ferme et montre qu’elle n’est pas dupe.

Quel serait le message le plus urgent à transmettre aujourd’hui ?

Dénoncer les islamistes radicaux n’est pas dénoncer les musulmans. Il faut ouvrir les yeux. Il y a des offensives. Ceux qui nous veulent du mal sont là. Chaque jour, l’école est mise à mal. Refuser de le dénoncer va à l’encontre de notre instinct de survie.

 
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